tout ce qui est réel est fabulatoire, tout ce qui est fabulatoire est réel, mais il faut savoir choisir ses fabulations et éviter les hallucinations.

vendredi, décembre 30, 2011

La plus importante question de notre temps


Dans le couple matière/énergie, c'est l'énergie qui domine, même si nous avons plus de facilité à parler de matière - qui semble être au repos - et même de matérialisme pour nous opposer à toute idée de transcendance religieuse ou idéaliste. Je ne devrais pas me déclarer matérialiste athée, mais énergétiste athée. Le mot semble laid, même s'il est beaucoup plus pertinent que "matérialiste". La matière n'est que de l'énergie au repos, ou plutôt en équilibre éphémère. Car il n'y a pas de repos dans l'univers. Les atomesz vibrent et tournent sans cesse. C'est le mouvement perpétuel.
Pourquoi avons-nous traditionnellement survalorisé l'espace et la matière, plutôt que le temps et l'énergie. Parce qu'ils sont d'apparence plus saisissable, bien sûr; parce qu'ils nous font moins peur. Parce que le temps et l'énergie échappent à notre contrôle, nous défient, nous angoissent. Ils peuvent éventuellement apporter le progrès, certes, mais nous craignons l'inconnu, même quand nous souffrons de notre état présent.Nous craignons notre mort, notre dissolution dans l'énergie.
A l'Âge du numérique, il semble bien pourtant que nous allons devoir nous adapter à la domination de l'énergie et du temps. Comment serons-nous capables de nous en rendre maître et possesseur, comme jadis de l'espace et de la matière? C'est la question fondamentale de notre nouvelle époque. La question la plus importante à laquelle nous sommes confrontés. Un terrible défi pour CyberProméthée.

vendredi, décembre 23, 2011

Mythanalyse de la divergence


La répétition du même: voilà ce que refuse et brise la divergence. Elle casse la pensée linéaire, le refrain de la causalité. Elle papillonne dans l'arabesque. Elle regarde de tous côtés, dans l'apesanteur. Elle s'aventure dans l'incertain. Et elle risque l'affirmation transgressive.
Elle est résistance au pouvoir et à l'autorité. Elle est délinquante. Elle est suraffirmation de liberté. Elle est la création. Et elle en assume le vertige fondateur. Elle est mythe du fils, de l'autre, du vagabond contre le mythe du père. Elle brise le monument. Et elle en lance les éclats dans un geste créatif recommencé.
Elle picote Sisyphe, elle le bouscule lorsqu'il remet sa charge sur ses épaules, pour qu'il essaie un autre sentier d'escalade que les matins précédents.

dimanche, novembre 27, 2011

Le cinéma et les jeux vidéos sont des drogues socialement acceptables


Il n'y a pas que les champignons, la magie et la religion qui soient des drogues. Le cinéma, comme les jeux vidéos, sont aussi des drogues, socialement acceptables, qui nous divertissent de l'ordinaire vie quotidienne. Au cinéma, nous entrons dans le noir pour sortir de la grisaille. Au cinéma, la drogue nous soumet passivement. Avec les jeux nous devenons hyperactifs et nous excitons sur des consoles.
Ce sont des drogues visuelles, comme la plupart des drogues. Elles nous permettent de nous projeter dans d'autres univers, dans les vies d'autres personnes. Nous y jouissons d'émotions différentes. Ce sont des drogues douces, mais qui peuvent devenir dures. Nous y vivons des good and bad trips. Le retour à la réalité est parfois bancale.
Ce sont des drogues désirables, voire socialement nécessaires. Elles ne sont pas chères et se vendent bien. Mais nous devenons des consommateurs exigeants. Les réalisateurs sont en compétition. Il y en a que nous aimons beaucoup plus que d'autres. Le marché se renouvelle. Chaque prise de drogue est différente. Et nous en devenons dépendants, mais sans trop d'effets secondaires pervers. Les drogues sont un art. Les arts sont une drogue.
Pourquoi fuyons-nous ainsi dans un ailleurs? La réalité est-elle plus forte que nous? Notre impuissance y est-elle trop frustrante? Ce sont plutôt la répétition et l'ennui qui en résulte qui nous déçoivent. Les autres animaux ne semblent pas ressentir cette lassitude de la répétition. Lorsque se dressent des défis, lorsque la vie devient très difficile, elle ne nous ennuie plus. L'instinct de puissance en nous se réactive pour faire face. Dans les jeux vidéo, CyberProméthée s'exalte. Au cinéma, ce sont plutôt Dieu et le Diable. Ces trois figures, Prométhée, Dieu et le Diable sont nos trois grandes drogues occidentales.

vendredi, novembre 25, 2011

Le Diable et Prométhée


Prométhée et le Diable, ce sont les deux figures fondatrices de la conscience occidentale. Tous deux nous ont invités à prendre notre destinée en main, en nous offrant la conscience. Dans la mythologie grecque, c'est le feu, volé à Zeus, que Prométhée nous donne, qui symbolise la connaissance. Dans la Bible, c'est la pomme dans laquelle Adam et Ève mordent, à l'invite du Diable, qui leur donne la conscience. Mais au-delà, les deux mythes sont opposés. Dans la Bible, c'est Dieu qui domine l'Homme, qui le chasse du Paradis terrestre, et qui le punit en le condamnant à travailler pour vivre. Dans le mythe grecque, c'est l'homme qui vainc Zeus, et qui s'engage glorieusement à changer le monde grâce à la maîtrise du feu. La Bible nous condamne à la soumission. Le mythe grec nous libère de la soumission.
Les deux récits fondateurs s'opposent. Et de la naît toute l'ambiguïté, mais aussi la puissance de l'Occident. Notre histoire se présente comme une tentative constante de concilier ces deux visions.
Aujourd'hui même, nous retrouvons ces deux mythes fondateurs dans les deux industries du cinéma et des jeux vidéos. Le cinéma opère sous le regard de Dieu. Les jeux vidéos dans la main de Prométhée. Le cinéma est biblique, le jeu vidéo est grec.
Le cinéma développe des récits, avec une dimension psychologique et des implications morales. Beaucoup de films jouent sur l'émotion et aimeraient nous faire pleurer. Nous y assistons passivement, sans pouvoir changer l'histoire. Les films sont souvent doloristes et fatalistes, comme le catholicisme et la Bible.
Inversement les jeux vidéo se passent facilement de scénarios.Ils nous proposent plutôt de vaincre les méchants et de gagner. Nous offrant l'interactivité, ils nous invitent à l'action. L'issue dépendra de nous. Ils ne jouent pas dans le registre psychologique, ni dans la mauvaise conscience. Ils roulent les mécaniques. Ludiques, ils nous proposent des moments joyeux. Même lorsque nous perdons, ce n'est pas bien grave. On peut recommencer la partie. Rien de tel dans la vie, ni dans le cinéma.
Dans le cinéma, le Diable est présent. Le mal et le bien nous dominent. Nous perdons. Les jeux vidéo, au contraire, sont d'inspiration grecque. Nous vainquons les démons. Pas de mauvaise conscience. Le mal est là pour que nous le dominions. Nous tuons les dragons. Nous décidons de notre sort à chaque instant. Nous gagnons.
On nous parle aujourd'hui de plus en plus de convergence entre le cinéma et les jeux vidéo. Mais il ne s'agit pas seulement d'un défi technologique. Les différences sont beaucoup plus profondes, au niveau de l'imaginaire. La rencontre du Diable et de Prométhée, des deux mythes fondateurs de l'Occident, demeure improbable. Elle serait difficile à maîtriser.Je ne crois pas au film interactif, même avec des téléphones intelligents dans les mains des spectateurs. On explorerait mieux cette voie avec des jeux vidéos de qualité cinématographique (scénario, direction, qualité esthétique, etc.) Mais l'arrimage des mythologies grecque et biblique demeurera problématique. Ce sont les imaginaires qui ne ne convergent pas.

samedi, novembre 19, 2011

Étrange paradoxe


Le pragmatisme est un réalisme très limité, qui ne saurait vaincre l'imaginaire.

jeudi, novembre 17, 2011

Le CyberProméthée de Jacline Bussières


J'ai eu la surprise, à l'occasion d'une conférence que je donnais au Musée de la civilisation à Québec, de rencontrer Jacline Bussières, avec des photos d'un CyberProméthée en bronze, que lui a inspiré mon livre paru sous ce titre en 2003.
C'est une impressionnante sculpture, volontariste, iconique, qui affirme sa puissance brutale mais aussi sa doulour et comporte sa part d'ombre. Elle a deux faces, titanesque devant et cérébrale en arrière. Les lettres qui y sont gravées, dont le nom de CyberProméthée, évoquent notre pouvoir de création, d'abstraction, qui s'est traduit notamment par l'invention de l'alphabet phonétique, ancêtre des caractères mobiles de l'imprimerie de Gutenberg, puis du code binaire de l'informatique.
Les écrivains ont des lecteurs qu'ils ne connaissent pas. Je le regrette toujours. Voilà donc une belle rencontre.
La figure de CyberProméthée est plus actuelle que jamais. Ce Titan, qui créa, selon la légende, les hommes à partir d'eau et de terre - comme le dieu de la Bible - , puis leur donna le feu de la connaissance et de la fabrication après l'avoir volé à Zeus, symbolise la victoire des hommes sur Zeus, à l'inverse de la Bible, qui relate le bannissement d'Adam et Ève, et leur soumission à Dieu. Prométhée célèbre le travail, tandis que pour Adam et Ève, la nécessité de travailler à la sueur de leur front est une malédiction. Deux mythes qui s'opposent diamétralement, mais qui ont coexisté dans la civilisation occidentale. Résultat ironique: les aristocrates se targuèrent de ne pas travailler et d'avoir de l'argent grâce à leur naissance supérieure, tandis que les serfs et le peuple étaient condamnés au labeur. La bourgeoisie le fut aussi. Mais lorsqu'elle adopta la Réforme pour s'opposer à la religion catholique d'État, elle devint vite plus riche que l'aristocratie, car le protestantisme identifiait travail et piété, comme l'a souligné Max Weber.
Les mythes sont récupérés idéologiquement et politiquement pour le meilleur et pour le pire.

mercredi, novembre 16, 2011

Les grands récits mythiques


Les mythes nous immergent dans de grands récits cosmogoniques, que ce soient des mythologies animistes, polythéistes ou monothéistes. L'occident moderne a bâti son récit sur le Big Bang, qui se présente comme la création de notre univers. Ce récit scientifique est lié dans notre constellation mythique à la théorie darwiniste de l'évolution, ainsi qu'à l'épopée hégélienne de l'avènement chaotique de la Raison, donc du Progrès, qui s'annoncent comme notre futur accomplissement humain.

vendredi, novembre 04, 2011

Il n'y a pas de progrès en art


L'art véhicule les mythes. Il peut être aussi un interrogateur de mythes, un démystificateur. C'est le choix qui a fondé l'art sociologique dès le début des années 1970. Ce que j'appelais "l'hygiène de l'art", en est l'exemple. J'ai insisté dans cette démarche avec les panneaux de signalisation imaginaire "Art! Avez-vous quelque chose à déclarer?", et avec "La déchirure des oeuvres d'art".
En choisissant de reprendre les contre-empreintes de main des peintures préhistoriques sur mes toiles, je soulignais qu'il n'y a pas de progrès en art. Le mythe du progrès est étranger à l'art. Et c'est une erreur des arts numériques que de condamner les beaux-arts en les déclarant obsolètes au nom du progrès de la technologie.

jeudi, novembre 03, 2011

L'ombre


Il n'y avait pas d'ombre dans la peinture iconique du Moyen-Age. La symbolique de la noirceur renvoyait au diable. L'Église nous tournait vers la lumière divine. C'est la Renaissance qui l'a prise en compte dans son exploration du réalisme pictural. Pour autant, la représentation de l'ombre n'a pas depuis perdu cette symbolique. Le rationalisme aussi veut y "voir clair".
Sur ce tumulus ancien des autochtones américains à Marietta (Ohio), l'ombre portée de l'artiste s'incline et s'allonge la terre en descendant les marches de l'escalier. Une émotion le saisit, celle du compte à rebours qui l'entraînera dans la mort. (2010). L'imaginaire est plein d'ombres. Il est hanté par l'ombre.
L'ombre le regarde. Mais ce regard en pongée semble aussi se relever et se dresser vers son destin, vers une marche de lumière.
Voilà une image de l'homme bien différente, dans sa fragilité et dans sa force, du héros homardisé des images numériques que j'évoquais hier.

mercredi, novembre 02, 2011

le mythe de l’humanoïde homardisé


La science fiction, que ce soit dans les films, les jeux vidéo ou la bande dessinée, réactivent des monstres moyenâgeux aux cuirasses de homard. Cherchant à évoquer le futur, les créateurs reprennent toutes les formes les plus archaïques de notre imaginaire: animaux chimériques mêlant les organes de diverses espèces - queues, cornes, ailes, griffes et palmes, poil et écaille -, guerriers cuirassés, indigènes primitifs et bêtes hybrides de chair vive et de quincailleries vieillottes - tubes, gaines, boîtiers, engrenages, leviers, rotules, pistons et j'en passe.
Il semble bien difficile d'inventer un avenir inédit et faute de mieux on rafistole. Il est vrai que les réseaux numériques et les algorithmes sont invisibles et difficiles à représenter. Les univers qui se situent au-delà de la vitesse de la lumière échappent à nos sens aussi bien qu'à notre esprit.
La science-fiction est vieillotte et même archaïque. Notre imaginaire, pourtant, est obsédé par le futur!

mardi, novembre 01, 2011

L'imagination monumentale


Dessine un monument imaginaire pour ton quartier
Art sociologique au musée d'art moderne de Mexico, Evento social imaginario, La calle Adonde llega? 2003

lundi, octobre 31, 2011

mythanalyse du féminisme


Jacques Languirand a réuni une série de capsules vidéo dont celle-ci où je me risque sur un thème important: Mythanalyse des valeurs féminines: http://www.repere.tv/?p=12735

jeudi, octobre 27, 2011

le futur


Imaginer le futur. Nous y rencontrons nos mythes les plus actuels.

mercredi, octobre 26, 2011

Où va l'imaginaire ?


La calle imaginaria Adonde llega? Evento social imaginario, Museo de arte moderno, Mexico, 2002-2003

mardi, octobre 25, 2011

Evento social imaginario à Mexico


Un événement social imaginaire au Museo de arte moderno de Mexico: Où va la rue?.
En 1982 et 83, l'imaginaire de la société mexicaine. Ici la façade du musée transformée par le collectif mexicain avec des guirlandes de papel picado, des groupes de musique, de théâtre de rue, etc.

samedi, octobre 22, 2011

Sociedad mexicana


Rencontre avec le champion de lucha libre célèbre El Santo pour lancer l'enquête sur la société mexicaine Evento social imaginario, La calle Adonde llega? en 1982.

vendredi, octobre 21, 2011

Mythanalyse du jeu


Le jeu crée des gagnants et des perdants. Il introduit une loi dure dans une réalité molle. Il met en heu le destin, la chance, la tromperie, l'illusion. Il est chargé.Il simule la vie réelle. Il prétend en divertir, nous permettre de nous en échapper. Quelle illusion!

samedi, octobre 15, 2011

mythanalyse de l'indignation


Après les indignés du saccage de l'environnement, devenus les verts, ce sont maintenant les indignés des dérives spéculatives des financiers qui prennent la rue, occupent Wall Street et les autres places financières de la planète. Les Bourses sont devenues des salles de jeu, de violence spéculative cynique aux effets les plus pervers sur les économies. Ces dérives boursières tuent l'économie et le capitalisme. Les jeux d'argent passent aujourd'hui du rouge de l'encre à celui du sang.
Les enfants se révoltent contre la violence et l'injustice des parents qui les tuent, qui les réduisent au chômage et à la pauvreté. La révolte des jeunes dans les pays arabes a gagné la jeunesse de l'Espagne, de la Grèce et maintenant de New York et de toutes les places boursières. Ils sont prêts à répondre par la violence de la rue à celle des manipulateurs de l'argent. Les parents ont créé le chaos par leur cupidité irresponsable et les fils et filles se révoltent et exigent un nouvel ordre mondial.
Les pères ont été indignes. Bien sûr, je suis un indigné. Depuis des années. Et le moment vient enfin, peut-être, où les gouvernants les plus conscients pourront s'appuyer sur la rue pour imposer aux fauves de la finance la justice de la démocratie.

mercredi, octobre 12, 2011

La mythanalyse en question?


Nous affirmons plutôt qu'elle s'impose. Et elle questionne nos sociétés. J'ajouterai même qu'elle propose de choisir entre les mythes, selon qu'ils nous paraissent bons ou mauvais pour l'homme. Elle demande des réponses!

mercredi, septembre 14, 2011

mardi, septembre 13, 2011

l'eau

Celle qui dort, celle que je bois, celle qui féconde, celle qui transporte, celle qui relie, celle qui arrache, celle qui tue, celle qui brûle en vapeur, celle qui durcit comme de la pierre, qui râpe le bouclier canadien ou qui fond dans la bouche, cette eau qui est partout là où il y a de la vie, c'est une énergie renouvelable, une industrie, un enjeu de guerre. Une source inépuisable d'imaginaire, dont nous avons fait le plus ambivalent de tous les mythes. Une bénédiction. Une plaie. L'eau du déluge ne fut pas bénite.
Mythe maternel, plastique, protéen, dont la confusion, les contradictions, les incohérences disent bien le chaos de notre imaginaire.
Sans image aujourd'hui.

lundi, septembre 05, 2011

De l'optimisme


Le radicalisme de la critique des situationnistes ou de Jean Baudrillard, aussi lucide puisse-il paraître, est une voie sans issue et sans retour. Finalement un sophisme. Je lui préfère de beaucoup la critique nietzschéenne, tout aussi jusqu'auboutiste, mais qui célèbre la liberté créatrice.

jeudi, septembre 01, 2011

La diversité des cultures


Les cultures sont comme les écosystèmes de la nature, d'une grande diversité, en compétition, en vigueur, en transformation ou menacés d'extinction. Chacune est soutenue par une constellation mythique, qui est elle-même dynamique ou faible, conquérante ou soumise, optimiste ou fataliste. Oswald Spengler, analysant les destinées des civilisations comme des fleurs saisonnières ou vivaces, se rapprochait de cette notion actuelle d'écosystème culturel, dont l'imaginaire est porteur ou périclite. On pourrait ainsi développer une écologie des cultures et des systèemes mythiques qui les animent.

mercredi, août 31, 2011

Le paradoxe de l'imaginaire et du réel


Est-ce une sorte d'équilibre fragile de l'écosystème humain?
Est-ce la métamorphose continuelle d'un paradoxe permanent de notre espèce, qui stimule notre évolution?
Cela pourrait-il devenir une combinaison détonante, faute de détenir la sagesse collective de notre pouvoir instrumental en croissance accélérée?

En tous les cas un immense défi pour l'espèce humaine.

mardi, juillet 26, 2011

le simulacre implique le réalisme


Il n'est pas possible de réduire la réalité à des simulacres qui dévorent tout. L'idée du simulacre, dont Jean Baudrillard a fait un nihilisme radical,implique la référence à un réalisme, au moins hypothétique.
Lorsque le monde vient à la conscience du nouveau-né, celui-ci apprend à faire la différence entre le réel et l'absence ou l'illusion. Pourquoi l'adulte prétendrait-il renoncer aux vertus et à la résistance du réel. La phénoménologie et les sciences, aussi bien physiques que cognitives, nous apprennent le relativisme et le jugement que nous nécessitons pour vivre. Mais ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain.
L'intelligence brillante de Baudrillard ne doit pas nous entraîner dans cette dérive. Il y a une position d'équilibre pratique à adopter. L'expérience du réel que nous construisons commence avec la naissance et se termine avec la mort. Nous demeurons toute notre vie des nouveaux-nés. Le monde vient à nous jusqu'au jour où nous le... quittons.

lundi, juillet 25, 2011

dimanche, juillet 24, 2011

Le bonheur de vivre


Le voyeur est celui qui jouit de voir. Il ressent le plaisir de l'oeil. Il voit le monde dans lequel il vit, il s'étonne de la beauté des formes et des couleurs. Il jouit du désir physique.
La voyelle est dans le jeu des lèvres, de la langue, dans l'ondulation musculaire qui fait vibrer les cordes vocales. La voyelle surgit dans le bonheur de parler, d'exprimer le plaisir voluptueux de voir.
Nous ne sommes pas sur terre au paradis. Mais nous imaginons le paradis en sélectionnant des morceaux de la Terre. Comment pourrions nous d'ailleurs l'imaginer autrement?
Quand tout va mal, quand la Terre se dresse devant nous comme un enfer, il suffit parfois de bouger, de voir d'autres images de la Terre pour retrouver la force de vivre.
Il y a en nous un instinct puissant de vie, une aptitude fondamentale au bonheur. Certes, les malheurs peuvent s'accumuler, qui nous plongent dans les ténèbres. Mais sachant, si nous en venons à la désirer, que la mort viendra de toute façon, et avec elle la paix à laquelle nous aspirons dans le malheur, pourquoi ne pas chercher en attendant le dérivatif de notre peine. Il est toujours dans la nature à laquelle nous appartenons corps et âme et qui remet la pierre dans la pierre, l'eau dans l'eau, l'arbre sur ses racines, la fleur au sommet de la tige.
C'est dans la nature que nous ressourçons la vie. Et cela signifie beaucoup. Il faut remettre dans le courant de l'eau le poisson qui en a été arraché pour qu'il reparte vivement. La nature, aussi longtemps que nous ne la détruisons pas, que nous ne la renions pas, que nous la célébrons avec nos yeux, nos voyelles, nos désirs, est une puissante merveille. Elle est notre mère. Les hommes l'ont compris depuis toujours. Ils l'ont oublié souvent. Orphelins, ils ont souffert. Mais ils peuvent toujours y revenir et y retrouver leurs désirs, leurs joies leurs bonheurs et leurs peurs d'enfant. Ils peuvent s'y régénérer, s'y reconstruire. Ils peuvent y renaître.

samedi, juillet 23, 2011

Mythanalyse du soleil


Le soleil n'est qu'un astre - une étoile - parmi des milliards d'autres. Avouons que ce seul fait scientifique donne à réfléchir d'une toute autre façon que celle des Incas et de tant d'autres sociétés anciennes dont les mythologies en ont fait leur dieu suprême.
On se demandera aussi pourquoi toutes les mythologies n'en ont pas fait de même leur Dieu principal. Cela dit, comme tout dieu central d'une cosmogonie, le soleil prend figure paternelle. Dès lors, nous nous retrouvons en terrain familier, dans le carré parental.
Si nous abordons le mythe solaire de la lumière, nous abordons un autre domaine d'analyse.
L'esprit, la lumière, la lucidité, par opposition à l'ombre, à l'obscurantisme, à la peur: c'est là le thème de la sécurité physique et psychologique indispensable au nouveau-né, qui met en scène la relation de familiarité et de confiance qui lie l'enfant à la mère et au père. Ce sont eux qui savent, qui sécurisent et qui éduquent. La lumière, la connaissance et la sécurité mentale sont les attributs des parents. La mythanalyse de la vérité ou de la lumière nous conduit encore au carré parental.
Oui, une mythanalyse du soleil est donc possible; Même si le soleil n'est plus un dieu ni un mythe pour nous, il en reste quelque chose dans notre sédimentation imaginaire. Le soleil garde une valeur de symbole social. Et la mythanalyse du soleil se décline selon la diversité des paramètres sociologiques et historiques du carré parental. Un beau thème d'analyse.

vendredi, juillet 22, 2011

La mythanalyse est-elle possible?


Une définition des mythes actuels est-elle crédible? Significative? Leur analyse est-elle possible? Crédible? Selon quelle postulats? Quelle méthodologie? Peut-on évaluer que certains mythes sont bons ou mauvais pour l'humanité?
Comment peut-on comprendre leur gestation? Leurs transformations, leurs disparitions?
Comment sont-ils liés? Ou pas liée, autonomes les uns des autres?
Comment sont-ils structurés?
Les mythes sont-ils de simples erreurs courantes de jugement? Ou ont-ils une signification sociale déterminante?
Voilà toute une série de questions, des plus légitimes. Et je pourrai augmenter cette liste.

Et ma réponse est sans ambiguïté. Je crois avoir répondu à toutes ces questions de façon claire et précise, y compris en ce qui concerne les limites de notre capacité d'élucidation.
La mythanalyse est aujourd'hui peu considérée, incomprise ou détournées vers des conceptions questionnables. Par exemple, les jungiens ont inventé un Olympe d'archétypes pour expliquer nos mythes. Ce n'est pas une explication plus acceptable que celle d'un dieu ou d'esprits mystérieux pour expliquer nos comportements sociaux ou individuels. Les archétypes n'expliquent rien. Ils sont eux-mêmes des figures imaginaires hypostasiées comme principes excplicatifs!
Quant à moi, je ne doute donc pas de l'avenir de la mythanalyse. J'ai souvent souligné que la mythanalyse, comme toute théorie, est une fiction. Mais il est des fictions plus lucides, plus éclairantes que d'autres. Plus explicatrices et plus instrumentales que d'autres. Par exemple, Dieu est une fiction qui nous fait errer au lieu de nous éclairer. La démocratie, un autre mythe, est une fiction qui nous sert mieux que les dictatures de l'armée, de l'Eglise ou de l'argent. Il faut savoir relativiser ces considérations.
Il y a beaucoup de travail à faire dans ce domaine des plus importants. Je n'ai fait que construire les fondements. Je les crois solides. Je ne sais pas de combien d'années je disposerai encore pour continuer tranquillement cette analyse. Peu importe. D'autres poursuivront. Car avec le temps, l'importance de la mythanalyse sera de moins en moins mise en doute. Les imaginaires sociaux jouent un rôle majeur dans toutes les populations, dans toutes les cultures, à toutes les époques. On se rendra de plus en plus compte de l'importance de les repérer, de les déchiffrer et de les transformer au service des valeurs hyperhumanistes auxquelles nous aspirons.

mercredi, juillet 20, 2011

mythanalyse, philosophie et technologies numériques


Le numérique est une technologie qui requestionne la philosophie occidentale et met en scène les mythes les plus actuels.

mardi, juillet 19, 2011

Pharmacie Fischer, Perpignan


Performance échange de la Pharmacie à la Librairie Torcatis, à Perpignan en 1976

lundi, juillet 18, 2011

Qui suis-je?


Autoportrait. Vu par l'Autre. Peinture acrylique sur toile, 2000.

dimanche, juillet 17, 2011

Mythanalyse du féminisme


L'imaginaire du féminisme: voilà un sujet de réflexion difficile et dans lequel il peut paraître pour un homme fort risqué de s'aventurer. Le mythanalyste dès lors prendra la précaution de rappeler qu'il ne donne qu'un avis d'homme et demandera, pour faire avancer l'analyse, aux femmes de le lire et de le critiquer.

Nous avons déjà souligné à maintes reprises que la Révolution de 1789 marque le moment où les fils se révoltent contre le père. Ils le guillotinent, coupent aussi les têtes des statues dans les églises, profanent les tombes des prêtres, s'emparent des biens de l'Eglise qui légitimait son pouvoir. Ils instaurent le temps des fils. Non plus le respect du passé, mais l'Histoire à accomplir et le Progrès. Ils remplacent la vérité révélée par le culte de la raison. Bref, ils prennent la place du père et veulent changer la société, ses institutions et ses valeurs, pour établir les leurs. Nous sommes depuis 1789 dans le temps des fils, même si nous observons que ceux-ci ont souvent repris des postures paternalistes et autoritaires, et reproduisent les valeurs qu'ils avaient reniées, comme la bourgeoisie napoléonienne a instauré le néo-classicisme après avoir découvert le préromantisme du XVIIIe siècle.
Bien sûr, les femmes ont participé dans les Salons et dans les rues à cette révolution. Elles aussi ont pris le Bastille. Elles-mêmes avaient été reléguées jusqu'alors à des rôles sociaux conformistes, restrictifs. Elles étaient absentes de l'histoire de la philosophie, des arts et des sciences, à quelques rares exceptions près. Il suffit d'ouvrir le dictionnaire pour le constater avec consternation. Mme du Châtelet, l'amie de Voltaire, Mme de Staël et quelques autres se sont distinguées, mais dans l'ensemble, la condition féminine instituée par le machisme social était rétrograde. Et les femmes n'ont pas obtenu de la révolution française un nouveau rôle, une reconnaissance, ni un nouveau pouvoir. Le code civil napoléonien ne leur accorde pas grand-chose, Napoléon lui-même étant convaincu qu'elles ne doivent pas se mêler des affaires publiques. Il faudra d'ailleurs attendre un siècle et demi pour qu'elles se voient reconnaître le simple droit de vote (par de Gaulle en France).
C'est contre ce blocage idéologique et social que les femmes vont finir par se révolter à leur tour, et élaborer le programme féministe.
Lorsque j'ai émigré au Québec, au début des années 1980, on finissait de discréditer le marxisme en France, mais c'était là encore le coeur du débat idéologique (Raymond Aron contre Sartre). Au Québec, le débat social portait sur le féminisme. Les femmes écrivaines, poètes, comme en France, Simone de Beauvoir ou Françoise Giroud, en étaient les principales actrices: Nicole Brossard, Suzanne Lamy, France Théoret et tant d'autres inspirées par Marie-Gérin-Lajoie ou Thérèse Casgrain. Et elles y mettaient une ardeur qui n'a jamais existé en France. Les suffragettes et les écrivaines ont été radicales, voulant instaurer un conflit libérateur avec les hommes; elles se déclaraient lesbiennes. Elles rejetaient bien sûr les valeurs maternelles, domestiques, aussi bien que celles d'objet sexuel dans lesquelles les hommes les avaient enfermées. Elles avaient fait leur révolte contre les mères dans la vie familiale et quotidienne, mais ce n'est plus contre la mère que les filles voulaient établir à leur tour le temps des filles. C'était contre les fils qui avaient maintenu vis-à-vis d'elles les postures réactionnaires du père. Et elles ne voulaient plus reproduire avec ces fils le modèle traditionnel, nourricier du couple familial dominé par l'homme et les exigences maternelles. Cet égalitarisme féministe revendiqué rappelait dans les années 1970-1980 l'égalitarisme citoyen réclamé par les révolutionnaires de 1789. La révolution féministe exigeait avec un siècle et demi de retard son dû de 1789, dont les fils, une fois au pouvoir, les avaient privées.
Au-delà des excès inévitables de toute révolution, même de celles qui sont idéologiques seulement et ne font pas couler le sang, ce que nous retiendrons aujourd'hui, c'est que les femmes ont dû alors inventer ce que nous appellerons les valeurs féminines, dans leur différence avec les valeurs masculines. Elles n'en avaient aucun modèle. Elles ne voulaient surtout pas répéter les valeurs de leurs mères, alors que les fils avaient, après la transgression, largement repris les valeurs confortables du père. Elles devaient repenser la société, non seulement au niveau des institutions politiques, mais, ce qui est beaucoup plus difficile, dans la vie quotidienne, privée, intersubjective, celle du couple, de la famille, de la maison. Et les hommes le ressentaient comme une agression directe contre leur machisme traditionnel (naturel, inconscient, et d'autant plus fort et résistant).
Le temps des filles, qui émerge un siècle et demi plus tard que le temps des fils, c'est donc celui de l'innovation sociale. Les fils se sont rangées, ont oublié leurs audaces. Pas les filles, qui veulent désormais changer les règles du jeu.
Et c'est un paradoxe historique pour nous, les hommes, que de voir ces femmes, que nous avions toujours pensées plus traditionalistes que nous, fonder les nouvelles valeurs féminines qui changent aujourd'hui les sociétés, aussi bien en Afrique, en Inde, en Chine qu'en Europe. Les femmes sont devenues les acteurs les plus innovants, créatifs de nos modes de socialisation. Il faut leur donner l'espace qu'elles revendiquent légitimement aussi en politique, dans l'économie, dans la gestion des entreprises, dans les institutions internationales, dans les sciences, dans les arts. Globalement, dans la foulée des changements sociaux qu'elles provoquent, elles peuvent aujourd'hui changer plus le monde que les hommes. En tout cas, il faut leur en donner la chance. Le monde va mal et ce sont les hommes qui l'ont mené là. Avec les femmes, ce ne sera peut-être pas mieux demain matin, tant les verrous sont bloqués, mais du moins un juste équilibre des responsabilités entre fils et filles est absolument nécessaire. Nous en sommes encore très loin de cette équité et de cette intelligence.

samedi, juillet 16, 2011

Eros et Prométhée


En instituant la figure de Thanatos en psychanalyse, Freud était assurément influencé par les désastres de la Seconde guerre mondiale.
Aujourd'hui, c'est sans doute par la puissance émergente du numérique qu'il aurait été frappé, comme moi.
Lorsque j'ai publié mon CyberProméthée (vlb, 2003), j'ai ajouté Prométhée aux instincts freudiens, proposant un attelage à trois têtes. J'ai changé d'avis depuis. Je situe plutôt Thanatos comme l'une des deux faces de Prométhée. Autrement dit, je modifierai le couple freudien des deux instincts fondamentaux Éros et Thanatos pour affirmer plutôt l'importance d'Eros et Prométhée, les deux dragons de la psyché. Thanatos est le pôle destructeur de l'instinct de puissance Prométhée, tandis que la fabrication en est le pôle créateur. Nous savons que l'artiste détruit pour construire.
Freud avait ramené la création et notamment l'art à une sublimation de la libido, une sorte de déclinaison énergétique éventuellement pathologique. C'était l'attitude d'un grand pessimiste. Il faut redonner au travail, à la production, à l'art toute sa légitimité positive, transformatrice, porteuse de progrès humain.

mercredi, juillet 13, 2011

Le monde actuel est aussi mythique que celui des Égyptiens, des Grecs ou des Wikings des


Repérer, déchiffrer les mythes actuels de nos sociétés, c'est ce que tente la mythanalyse. Elle postule qu'ils sont aussi nombreux, puissants que ceux des anciens. Certains se sont métamorphosés ou sont disparus, d'autres sont apparus, les noms ont changé, les constellations et les récits aussi. Mais nous y sommes plus aveugles que les anciens Grecs, Incas, Egyptiens ou Germains, qui, savaient les désigner. Bien sûr, nous nommons Dieu, Le Progrès, la Société, la Raison, l'Histoire, le Hasard et la Nécessité, mais il y en a beaucoup d'autres auxquels nous sommes aveugles, mais dont nous dépendons dans notre imagination et qu'il faut donc repérer.

mardi, juillet 12, 2011

Toute théorie est une fiction


Voilà l'un des postulats fondateurs de la mythanalyse, une théorie des imaginaires sociaux actuels, qui n'échappe certainement pas à ce postulat, pas plus que les théories astrophysiques, quantiques, mathématiques,biologiques, économiques, politiques,ETC.
Le rationalisme lui-même est une fiction. Pas la moindre. Dont l'excès a inspiré le positivisme. Le nihilisme aussi est une fiction.

lundi, juillet 11, 2011

L'illusion de la clarté


Toute clarté n'éclaire que ce que nous savons, désirons, voire ce que nous craignons - encore que cela relève davantage de l'obscurité. Les oiseaux nocturnes voient dans la nuit. beaucoup d'êtres vivants n'ont pas d'yeux. La clarté n'est que la rencontre du soleil et des yeux. Beaucoup? Pas grand-chose. Un champ spectral très limité. La clarté est plutôt une vertu de la familiarité que de la vision. De l'habitude que de l'esprit. Une fiction. Et pourtant, la clarté est tout pour nous. La nuit est la peur, l'imaginaire hyperactif. La clarté est réductrice, apaisante. Le lait du sein.

Signalisation imaginaire dans un champ de Winnekendonk, en Allemagne, en 1982.

dimanche, juillet 10, 2011

L'accélération du temps social


Pourquoi avons-nous développé une telle obsession de l'accélération du temps, alors que pendant des millénaires l'humanité a vécu selon un temps cyclique saisonnier, vertical, ahistorique, un temps lent sans flèche du temps, ce que nous appellerions un "temps ralenti". Il s'agissait même, pour plusieurs cultures d'un temps orienté vers le passé, vers l'origine, peut-être même d'un temps qui se dégradait de génération en génération. N'est-ce pas ce que symbolise la perte du Paradis terrestre?
Comme je l'ai expliqué dans l'analyse critique de l'idéologie avant-gardiste (L'Histoire de l'art est terminée,Balland, Paris, 1981), cela tient à l'inversion du temps qu'a provoquée la Révolution de 1789.
Alors que le temps était légitimé par la création divine, que l'humanité occidentale fondait le sens des choses sur cette origine, que l'art imitait le passé, la vertu l'exemple du Christ, en guillotinant le roi, le père, les fils ont instauré le Progrès à venir pour remplacer le Bien divin originel, L'Histoire à venir et son achèvement pour remplacer l'explication des origines bibliques. Bref, les hommes ont créé le temps des fils, qui mettait fin au temps du Père. Ils ont inversé le Temps. Ce Temps de l'Homme est une révolution mythique fondamentale qui instaure la modernité.
Et il est alors logique que cette fixation sur l'horizon du futur, dont l'accomplissement dépend désormais de l'Homme, crée un désir d'y parvenir rapidement, de s'en rapprocher avec la même exaltation qu'inspirait auparavant le désir de Dieu. Nous avons hâte que le Progrès arrive, du moins en Occident, mais aussi maintenant en Chine, en Inde, au Brésil. Nous avons institué une idéologie de l'innovation, accéléré en conséquence la recherche technoscientifique, créé les Prix Nobel pour statufier les plus grands chercheurs. Nous fondons le progrès économique, social et même l'équilibre de notre course folle sur l'innovation permanente. La loi de Moore affirmant le doublement tous les 18 mois du progrès des technologies numériques, s'est imposée, au point de servir de fondement aux utopies barbares du trans- et du posthumanisme. Le temps se cannibalise.
Nous avons vu que l'avant-garde dans le champ de la création artistique a rencontré l'aboutissement de sa propre logique mortifère. Admettons que cela ne se répétera pas dans le cas de notre idéologie sociale et scientifique qui sont fondées sur le progrès, contrairement au champ de l'art. Mais ne nous laissons pas emporter par le mouvement sans pratiquer l'arrêt sur image, nécessaire pour garder le temps de la réflexion critique et de la jouissance vitale. Nous avons remplacé la domination de l'idée d'espace par celle du temps. Il y a un abus du temps dans notre façon d'envisager la vie.
Je ne veux pas dire pour autant qu'il n'y ait pas urgence de résorber la violence sociale, l'injustice, la misère humaine. Décidément, il est difficile aujourd'hui de ralentir notre temps social. Les fils sont impatients. Nous avons adopté la vitesse comme un mode d'existence et de pensée.

Intervention de signalisation imaginaire urbaine en 1982, dans le cadre de la Biennale de Sao Paolo.

samedi, juillet 09, 2011

Angoulême


Angoulême, la ville de province, périphérique de la métropole parisienne, une fille de la famille. Géographie politique anthropomorphique, pensée sur le modèle de la structure familiale. Nous pensons beaucoup plus sur ce modèle que nous n'en avons conscience, beaucoup plus selon la hiérarcie familiale que selon la géométrie.

jeudi, juillet 07, 2011

art sociologique à Angoulême (1)


"Paris - père", "Angoulême - fille". Le centralisme parisien et le régionalisme français. Nous pensons les relations entre centre et périphérie, capitale et régions selon le modèle anthropomorphique des relations familiales, la matrice de nos structures mentales.

Intervention urbaine, signalétique imaginaire, 1980.

mercredi, juillet 06, 2011

Rêves et cauchemars


Nos contes et légendes populaires sont des merveilles de récits mythiques. L'imaginaire y déborde, évoquant les inconscients sociaux, selon la diversité sociale et historique de ces cultures.
Chacun de nous fait aussi l'expérience chaque nuit de débordements oniriques agréables ou cauchemardesques. Malgré le désordre des liens entre les séquences de nos rêves, la volatilité des images, les répétitions obsessionnelles qui réactivent des traumatismes ou simplement des évènements marquants de nos vies, il semble que nous observions dans les rêves une polarisation entre le désir et l'anxiété, entre Éros et Thanatos. Le loup se fait mouton, l'agneau devient menaçant, sans que nous soyons capables d'analyser ces mutations binaires. Il apparaît que notre imaginaire individuel, comme les imaginaires sociaux, se structure principalement selon cette bipolarité du plaisir et de l'anxiété. La Bible elle-même met en scène dramatiquement cette structure en se bâtissant sur l'opposition entre le Bien et le Mal. La religion en a fait son fondement et cette structure se retrouve dans toutes les mythologies, toutes les légendes, tous les contes. Sans doute les figures de la mythologies ne sont-elles pas simplistes. Par exemple, celles de la mythologie grecque, sont souvent ambiguës, tantôt vertueuses, tantôt jouisseuses, tantôt méchantes, tantôt victimes, bref plus proches de notre humanité. Mais il demeure que nous les caractérisons selon le bien et le mal, le bonheur et la souffrance. Demeurent la punition, la cruauté, la jouissance et la douleur, comme deux pôles marquants de la vie des dieux et demi-dieux et autres formes de nos inventions.
Cette bipolarité peut trouver son origine biologique dans le carré parental, dans l'alternance de la faim qui fait crier l'estomac et de la satisfaction du nouveau-né apaisé par le sein. Il n'est pas nécessaire de faire des hypothèses métaphysiques, manichéennes, d'inventer un Dieu et un Diable, pour traduire cette expérience fondatrice du désirable et du redoutable que fait chaque nouveau-né. Demeurons matérialistes, dans le biologique, le physiologique, lorsque nous cherchons les sources et les structures anthropologiques de notre imaginaire. Cela semble plus modeste et plus sûr que les tentatives structuralistes, qui dérivent dans la littérature, l'érudition et l'idéalisme.

mardi, juillet 05, 2011

Kant, un philosophe sans sensibilité


Qu'est-ce que le temps qui dure? Le temps qui n'est pas volatile, pas éphémère, mais qui a une intensité. Un temps court? Long? Répétitif? Monotone? Intense?
Nous avons du temps toutes sortes d'impressions différentes et contradictoires. Bergson en a abondamment parlé.
Je vois surtout dans la durée une stabilité. Celle d'un effort persévérant, celle d'un développement durable, comme on le dit souvent aujourd'hui pour faire référence à l'aménagement écologique. Nous avons, bien sûr un - des problèmes - avec le temps. Une oeuvre, un couple peuvent bénéficier de la durée. La durée n'est pas l'éternité. Il y a des durées longues et d'autres courtes. Etre de courte durée paraît négatif, encore que si nous parlons d'un mal, cela devientne positif. Nous mettons donc dans le temps des valeurs, des qualités ou des défauts, comme dans l'espace.
L'idée kantienne de l'espace et du temps comme des formes a priori de la sensibilité est une pauvre abstraction théorique, bien digne d'un philosophe qui a une vie ordinaire et répétitive. Un philosophe qui n'a justement pas de sensibilité!
La sensibilité fait étroitement partie de l'intelligence, parce que l'intelligence s'est formée dans le climat affectif du carré parental, où tout lien implique une émotion, une valeur rassurante ou inquiétante. La construction neuronale du cerveau est fondée sur l'affectif.
Si Kant avait su conserver cette sensibilité affective, il aurait évité de perdre des années è réfléchir et écrire sur les formes a priori de la sensibilité, avec lesquelles j'ai perdu à mon tour trop de temps lorsque j'étais étudiant en philosophie.
L'abstraction est une démarche fort utile, instrumentalement très efficace, qui nous a valu beaucoup de réussites scientifiques. Elle est le fondement du mythe platonicien des eidos, les idées abstraites. Nous lui devons le rationalisme. Ce n'est pas rien! Mais la réalité qui nous intéresse est dans la caverne de Platon, pas dans l'air éthéré et vide de l'idéalisme.
Cela aussi, la mythanalyse nous le rappelle avec force. La lucidité est du domaine de l'affect. La vérité est une construction théorique, qui quitte ses fondations vitales et devient vite fictive. Même de la mythanalyse, inévitablement théorisante, j'ai pris soin de dire qu'elle est une théorie-fiction.

Le champ signalétique de Winnekendonk, Allemagne, 1982

lundi, juillet 04, 2011

Lust - le désir


Cette signalisation imaginaire choisie et placée par les habitants du petit village allemand de Winnekendonk dans un champ en 1982 se reflète dans l'eau au bord du bois.
Envie, désir, libido, Éros: un thème intime que la nature anime de vibrations narcissiques.
Freud a génialement mis en évidence ce fondement érotique de nos vies dans sa théorie psychanalytique. La psychanalyse en a fait abusivement une obsession. On pourra écrire tout ce que l'on voudra contre Freud et contre la psychanalyse, souvent à juste titre - et je ne m'en suis pas privé moi-même en théorisant la mythanalyse (La société sur le divan, 2008), il n'en demeure pas moins que nous devons à Freud cette mise en évidence dont la puissance demeure incontournable.
Éros est à coup sûr présent dans le carré parental, sous forme nourricière, même si l'éveil à la sexualité est retardé physiologiquement chez l'enfant pendant plusieurs années. (Retardé ne veut pas dire absent. Mais l'explosion sexuelle déclenchée par les hormones à l'âge de la puberté devient alors effectivement obsessionnelle chez beaucoup de personnes.)

dimanche, juillet 03, 2011

le sommeil


Vie diurne et vie nocturne, veille et sommeil, vie pratique et rêve ou cauchemar: nous avons une vie à deux temps, deux facettes, que nous imposent les configurations de l'univers et de nos corps, mais qui fonde aussi la structure de notre imaginaire. Ayant déjà évoqué précédemment ici la physiologie du rêve,je n'y reviendrai pas. Mais il faut admettre que l'ombre et la lumière sont pour nous deux sphères symboliques très élaborées, dans toutes les cultures humaines, qui ont largement contribué à déterminer nos religions, nos inconscients collectifs et individuels, nos mythes, et qui les modèlent encore aujourd'hui.
Conséquemment, le sommeil apparaît certes comme un temps de repos du corps, exception faite du cerveau. L'interprétation des rêves semble avoir toujours été un domaine privilégié de connaissance, jadis des devins et autres pythies, aujourd'hui des psychanalystes. L'oeil de la nuit, l'oeil de l'oreiller, voit, évoque, prescient le passé, le présent et le futur de nos vies. Nous prêtons au sommeil des vertus de communication avec les esprits et l'au-delà. Certes, Freud, le mystificateur mystifié, a ramené cette science occulte à l'expression inconsciente mais très matérialiste de nos instincts Éros et Thanatos, et au défoulement répétitif de nos traumatismes infantiles. Il demeure que pour lui le sommeil et l'hypnose, deux états qui nous dépossèdent du contrôle rationnel par le Surmoi de nos mouvements et de notre auto-contrôle, permettent de mettre à nu notre inconscient. Le sommeil impose la nudité du corps et de l'inconscient. Une nudité individuelle qui revêt les voiles de nos mythes collectifs et de leurs échos individuels.

vendredi, juillet 01, 2011

Mythanalyse et mythologie


L'un des postulats fondamentaux de la mythanalyse est de reconnaître la présence incontournable des mythes dans nos sociétés contemporaines. Alors que nous nous étonnons de la naïveté des Égyptiens, des Grecs ou des Incas, qui croyaient à des dieux que nous jugeons totalement imaginaires, et que nous nous pensons modernes, la réalité est que nous mythifions nous-mêmes aujourd'hui tout autant des figures imaginaires qui sont tout aussi ingénues. La mythanalyse explore les mythes actuels, tandis que la mythologie déploie des trésors d'érudition historique sur des mythes anciens. Il n'est pas question ici de dévaloriser la mythologie, extrêmement intéressante et significative de notre passé, et qui peut nous éclairer sur notre présent, mais de marquer la différence avec l'actualité de la mythanalyse. C'est en ce sens que nous nous sommes, dès les années 1970, orientés différemment des historiens importants de la mythologie, tels que Gilbert Durand, Henri Corbin, Mircea Eliade, etc.
Certes, les mythes naissent, meurent, se transforment, et beaucoup de nos mythes actuels ont de nouvelles apparences, que nous appellerons modernes, postmodernes, posthumanistes, etc. Mais nous demeurons aveugles à la naïveté de nos monothéismes actuels, de nos croyance dans la Raison, l'Economie, le Progrès, la Technoscience, le numérique, etc. Il n'en demeure pas moins important de distinguer nous aussi aujourd'hui entre les bons et les mauvais mythes et dans leur ambivalence entre leurs bonnes et leurs mauvaises facettes.

jeudi, juin 30, 2011

Naissance de la mythanalyse


La naissance de la mythanalyse peut se raconter. Le récit que j'en ferai sera inévitablement personnel et d'autres pourront proposer une autre histoire.
Je dirai que la mythanalyse doit beaucoup à l'émergence idéologique et la légitimation de l'irrationnel dans notre chère maison occidentale. Il faut ici rendre hommage à Rimbaud, Lautréamont, à Dada et au surréalisme. La poétique des éléments premiers ou l'analyse critique de la science , telles que déployées par Gaston Bachelard, constitue aussi un moment important. Bien sûr, cette histoire compte avec Freud, son Totem et tabou, son Malaise dans la civilisation, deux textes qui tentent d'élargir la psychanalyse à l'anayse sociale. On se doit de souligner aussi l'importance de Jung, de son idée d'inconscient collectif, de son invention des archétypes, d'Erich Fromm, notamment de son Langage oublié : introduction à la compréhension des rêves, des contes et des mythes. Nous citerons aussi les tentatives de la socioanalyse, en particulier de Gérard Mendel. Mais la mythanalyse doit beaucoup plus à la sociologie. Il faut reconnaître l'importance des Formes élémentaires de la vie religieuse de Durkheim, mais selon moi plus encore rendre hommage aux analyses des rapports entre espace pictural et société publiées par Pierre Francastel. Francastel a été mon maître à penser, tant pour concevoir l'art sociologique que la mythanalyse.
Nous nous ferons un devoir de souligner l'approche de Gilbert Durand, surtout de ses Structures anthropologiques de l'imaginaire, un livre dont le titre portait un ambitieux projet, mais qui en réalité a beaucoup déçu et n'a pas eu de suite, même pour ceux qui, comme lui, se sont passionnés pour la mythologie ancienne. Plus récemment, j'ai trouvé beaucoup d’intérêt dans l'ethnopsychanalyse de Tobie Nathan.
Pour ce qui me concerne, j'ai eu l'intuition de l'importance de la mythanalyse en construisant la théorie de l'art sociologique dans les années 1970. C'est la critique de l'idéologie avant-gardiste qui m'a fixé sur l'analyse du mythe du progrès et de son incompatibilité avec les mythes de l'art. J'en ai parlé assez précisément dans le dernier chapitre de L'Histoire de l'art est terminée (Balland, Paris, 1981) et j'ai commencé dans la foulée à rédiger un manuscrit intitulé Mythanalyse qui a été refusé par André Balland en 1983. Pour toutes sortes de raisons personnelles - divorce, émigration au Québec, création de la Cité des arts et des nouvelles technologies de Montréal en 1985 et engagement dans les arts numériques -, j'ai laissé reposer ce manuscrit que je n'ai repris qu'en 1999, en même temps que la peinture et que j'ai publié en ligne en 2000, sous le titre Mythanalyse du futur (www.hervefischer.net).
Ce texte a été pour moi une sorte d'atelier de pensée, d'où sont sortis successivement depuis trois livres qui, selon moi, fondent sérieusement la mythanalyse et en proposent la théorie: CyberProméthé ou l'instinct de puissance (vlb, Montréal, 2003), Nous serons des dieux (vlb, 2006) et La société sur le divan, éléments de mythanalyse (vlb, 2007).
Les deux éléments les plus fondamentaux me paraissent être, outre l'affirmation de la pleine actualité des mythes dans nos sociétés contemporaines, l'élaboration théorique de l'instinct de puissance, que j'ai appelé Prométhée, reprenant la tradition grecque de Freud actualisant Eros et Thanatos, et la structure élémentaire du carré parental (la mère, le père, l'autre et le nouveau-né).
Cette structure élémentaire qui est le fondement de la mythanalyse, est biologique et culturelle. Je ne suis pas prêt à admettre dans la mythanalyse d'autre théorie que matérialiste. Les approches idéalistes, telle celle de Jung ou de Fromm déconsidèrent la mythanalyse en se fondant naïvement sur un mythe non reconnu comme tel.
Bien sûr, je compte publier un autre livre sur la mythanalyse, qui développera et articulera les idées que j'accumule dans ce blogue. Un de ces jours.

mercredi, juin 29, 2011

mythanalyse du temps


Pensez-y: le temps vaut mieux que l'éternité! Bien sûr, le temps passe. Il faut savoir en profiter d'autant plus, précisément, qu'il n'est pas éternel. C'est le cycle de la nature qui est en jeu. La brièveté de la vie nous a incité à doter les dieux d'une vie éternelle. Dès qu'on en analyse les vertus et inconvénients, on ne peut qu'en constater l'incongruité. L'éternité est un concept limite impensable.
Voilà donc typiquement un concept imaginaire qu'on ne peut imaginer, et métaphysique qu'on ne peut rationaliser. Ce que j'appelle en mythanalyse une limythe.
Nous en avons beaucoup d'autres, comme l'infini (grand ou petit), l'absolu, le néant, etc. Ce sont des concepts abstraits symétriques du réel où s'inscrit ce que nous n'avons pas, ne sommes pas, ne pouvons ni penser ni imaginer, mais qui signalent des peurs ou des désirs bien réels. Nous ne pouvons sortir des limythes de l'existence. Mais constamment nous aspirons à surmonter nos frustrations. L'instinct de Prométhée.

mardi, juin 28, 2011

le dieu Janus


Divinité romaine qui préside aux commencements et aux passages, Janus avait deux visages dos à dos. On l'invoquait avant les autres, pour favoriser le rituel. Il savait ce qu'il y avait des deux côtés, le passé et le futur, l'intérieur et l'extérieur. Il commençait l'année (mois de janvier). Chaque homme raisonnable s'assurait de le prier pour guider ses actes. Il offrait la sécurité d'avoir des yeux dans le dos, si l'on peut dire - principe de prudence -, mais aussi deux cerveaux, peut-être.
Ce double pouvoir a valeur emblématique contre toute pensée simpliste, binaire, catégorielle. Il vaut pour le philosophe artiste aussi, celui qui adopte deux modes de connaissance, le théorique et le sensible, le rationnel et l'intuitif, le conceptuel et le visuel, l'écriture et la peinture, l'installation et la performance.
Il incarne les doubles facultés que nous avons tous, mais que la catégorisation aristotélicienne, la pensée binaire de Platon, le système institutionnel académique ont opposées et dont elles nous interdisent le double usage. On a même tendu à les opposer selon les genres: la rationalité masculine et l'intuition féminine. Ce mode de pensée caricatural nous renvoie à la structure élémentaire biologique du masculin et du féminin, qui détermine certainement beaucoup de cultures, de mentalités, d'organisations sociales, à partir de l'expérience du carré parental.
Cette complexité du dieu Janus, qui lui confère tant de puissance, n'a pas été jusqu'à lui reconnaître les vertus d'Hermaphrodite, même s'il y a en chacun de nous, admet-on, des facettes masculines et féminines.

lundi, juin 27, 2011

Maîtriser les monstres


La magie nous protège des méchants, les grigris des ennemis. Le beau Prince tue le dragon pour libérer sa princesse et accéder à elle. Le centaure tue l'aigle qui dévore le foie de Prométhée enchaîné et le libère. Hercule tue bien des monstres. L'archange Saint-Michel tue le diable incarné en serpent monstrueux. Quand le démon ou le cyclope deviennent des gargouilles de nos églises, ils sont maîtrisés, soumis. Bons à recueillir l'eau de la toiture et à la faire couler loin des murs. Nous avons une longue tradition humaine de divers fétiches, formules, prières et rituels pour nous mettre à l'abri des forces obscures du Mal. L'homme est inventif, tant en menaces qu'en remèdes.
Mais pourquoi imaginons-nous ces forces ténébreuses? Pourquoi avons-nous peur de ce que nous ne voyons pas et croyons d'autant plus effrayant? D'où nous vient cette anxiété créatrice de figures horribles? Pourquoi ce sentiment si puissant d'insécurité? D'un traumatisme de notre enfance? De notre genèse? Découvrirons-nous dans les mythologies de toutes les civilisations des sagas explicatives? La boîte de Pandore? Adam et Ève chassés du Paradis?
Nous hypostasions ce qui menace notre sécurité physique, notre vie, nous donnons des visages à notre peur de souffrir. La vie foetale est-elle si fatale, celle du nouveau-né à ce point dramatique? Est-ce l'instinct qui angoisse si profondément le nouveau-né lorsque qu'il a faim ?Pourquoi l'enfant grandissant a-t-il si peur du noir?
Parmi toutes les hypothèses qu'il faudra étudier, on ne peut manquer de considérer la dépendance totale, vitale du nouveau-né qui s'agite sur le dos pour obtenir le sein. L'obscurité aussi contribuera à priver de sécurité physique celui qui aspire à dormir. On observe les craintes des animaux, leur habitudes pour se mettre à l'abri, se cacher lorsque la nuit donne l'avantage aux prédateurs bien réels qui profitent de ll'obscurité pour chasser et ont une vision ou un odorat adaptés à cette fin.
La peur n'est pas dans nos gènes, sinon au niveau de l'instinct. Et elle est dans notre culture, qui nourrit notre imaginaire. Elle est déjà présente dans le carré parental, dans l'angoisse des parents.

dimanche, juin 26, 2011

Le cyclope



Géants, fils d'Ouranos (le ciel) et de Gaia (la terre), les cyclopes ont un seul oeil, rond. Ils possèdent une force exceptionnelle et ont créé le tonnerre, la foudre et l'éclairs, dont la foudre Zeus, pour le remercier de les avoir libérés du Tartare, et qui permettra à celui-ci de dominer le monde. Cette saga mythologique grecque évoque donc la force brutale et la capacité de voir l'adversaire pour mieux le tuer. Ce sont l'une des figures de monstres qui ont personnifié dans toutes les mythologies nos peurs les plus grandes. Dans la cosmogonie actuelle, ils ne seraient plus les porteurs de l'éclair, du tonnerre et de la foudre, mais des tremblements de terre, de la guerre atomique, du cancer, du sida ou du terrorisme.
On constate que dans la mythologie grecque, l'anthropomorphisme dominait: c'étaient des figures monstrueuses, mais toujours des déformations humaines. Aujourd'hui, notre effroi s'image avec des virus et des cellules, des bombes ou des plaques tectoniques. L'imaginaire s'est en quelque sorte refroidi. Notre peur est plus précise, plus objectivée, donc mieux maîtrisée. Seules des sectes extrêmement marginales nous annoncent encore l’Apocalypse pour demain. De moins en moins de gens croient aux Enfers. Nos connaissances scientifiques, aussi limitées soient-elles encore, nous libèrent de nos peurs ancestrales et nous donnent l'espoir de vaincre les monstres.
Voilà un magnifique progrès de notre évolution. Le pouvoir de la science est certes un mythe - un mythe récent, parmi les plus actuels; mais c'est un mythe bénéfique. Un mythe qui mérite qu'on y croie, comme au mythe du progrès, et qu'on travaille à le développer. Ces mythes nous libéreront des cyclopes et autres monstres de notre irrationnel.

samedi, juin 25, 2011

Structure élémentaire de nos mythes


La peur est la peur de quoi? Peur du noir? Peur de l'inconnu? Peur de l'autre? Peur de la perte? Peur de la mort? La mort réunit toutes ces peurs: la perte, le noir, l'inconnu, l'autre. La peur se contrôle très mal. Elle nous saisit, le plus souvent elle devient irrationnelle, elle tourne à l'effroi, qui est une sorte de peur totale, quasi religieuse, d'une puissance très supérieure à nous. qui nous glace et nous paralyse, comme la mort.
Le vocabulaire multiplie les émotions: affolement, crainte, épouvante, horreur, terreur. Le physiologique se mêle au religieux dans ce saisissement. Le mystère menaçant entre en scène. Nous imaginons le tremblement qui pouvait saisir les premiers hommes en cas d'orage, de tremblement de terre, d'éruption volcanique, ou simplement face aux bruits de la nature, du vent dans la forêt.
L'imaginaire est le catalyseur de l'effroi. Nous voilà confrontés à la peur de l'imaginaire, que l'obscurité favorise, que la lumière chasse, comme elle éloigne les fantômes, les monstres, les mauvais esprits. Notre imaginaire est structuré par ce binôme de l'ombre et de la lumière, ce rythme binaire éternel auquel l'homme a dû s'adapter, cette nuit, dont nous avons parlé tout récemment. L'ombre appelle l'imaginaire, la lumière l'éloigne, ou l'oriente autrement, plus créativement, moins peureusement.
Voilà bien une structure élémentaire, anthropologique, aurait dit Gilbert Durand, de l'imaginaire et de nos mythes.