tout ce qui est réel est fabulatoire, tout ce qui est fabulatoire est réel, mais il faut savoir choisir ses fabulations et éviter les hallucinations.

lundi, mai 06, 2013

Mythanalyse et société,1983 (3)


Enquête à Lyon sur l'art d''aujourd'hui, octobre 1982. Affichage aléatoire des lés de papier. Une trentaine d'affiches et de panneaux de signalisation.

(Ce texte est paru dans L’oiseau-chat, roman-enquête sur l’identité québécoise, aux éditions La Presse, Montréal, 1983, qui a fait suite à mon exposition-rétrospective d’art sociologique au Musée d’art contemporain de Montréal en 1981-82. Il en constitue la troisième partie. J'étais à l'époque manifestement influencé par l’émergence du postmodernisme et ce texte reprend la critique de l’exacerbation avant-gardiste que j’avais dénoncée dans L’Histoire de l’art est terminée, Balland, 1981. Ce n'est que plus tard que je me suis libéré de l'idéologie postmoderne. Avec le recul, je mentionnerai aussi qu’en 1982 je sortais d’une période difficile de ma vie et aspirais au bonheur. Le texte s’en ressent profondément. La mythanalyse est aussi une thérapie individuelle.)

L’Histoire et la répétition. La mort de Prométhée

Qu’on en finisse donc avec la conscience historique hégélienne ou prométhéenne. Prométhée est mort enfin. Revient le temps vertical de la répétition, toujours pareille et différente comme la vie. Qu’on en finisse avec l’aliénation de l’Histoire. L’Histoire sacrificielle. Pour retrouver la plénitude accomplie de l’instant, de l’homme contemporain à lui-même, centre de lui-même, centre du monde, doué de mémoire, dans un temps événementiel, un monde anecdotique, une structure répétitive. Discours de la méthode : il faut nier l’Histoire pour sauver l’Homme. Le concept d’Histoire est un concept d’Etat et de pouvoir manipulateur. La répétition est aussi pareille et changeante que la vie. Bien plus vivable que l’Histoire. L’Histoire n’a pas de mémoire,  ni de dimension contemporaine : c’est son paradoxe, elle existe et s’écrit en fonction du seul futur. L’Histoire est la grande effaceuse, mangeuse d’être et de temps, obsédée de son projet d’avenir. L’Histoire est une chimère qui nous enchaîne et qu’il faut fusiller.
Prométhée est mort, enfin après un si long supplice, délivré des aigles qui lui dévoraient le foi, délivré de son angoisse, délivré par un surhomme et demi-dieu. Il a pu jouir d’une longue retraite au vert, dans la paix de l’âme et du corps. Baroudeur d’occasion, toujours prêt sans doute à renaître…