tout ce qui est réel est fabulatoire, tout ce qui est fabulatoire est réel, mais il faut savoir choisir ses fabulations et éviter les hallucinations.

samedi, juin 30, 2018

Les lois de la nature évoluent-elles?


Je me pose la question: Les lois de la nature évoluent-elles? Si la réponse est oui, s'ouvre devant moi un abîme aussi vertigineux que fascinant. Mais je peux me tirer de ce faux-pas - ou de cette décohérence insondable (un concept de la mécanique cantique) - en répondant.: certainement pas; nous sommes dans un univers mathématique donc fixiste. Ce sont nos connaissances et nos formulations des lois de la nature qui évoluent. Ce dont on ne saurait douter, mais qui referme le débat sans oser l'aborder, donc dans une certaine tristesse.
S'il y a eu un jour naissance de la vie à partir de la matière - ou au sein de la matière - dans l'évolution de la nature, j'userai de la métaphore de l'accouchement! En gestation foetale, la vie un jour sort de la matière.
Ou bien je refuserai cette naïveté et j'affirmerai: Oui, il y a eu une divergence, un saut, un changement d'état de la matière, comme l'eau gelée qui devient fluide, comme l'eau liquide qui devient fumée. Avant il n'y avait pas de fumée, après il y eut une sorte de vapeur.
Lorsqu'on essaie de comprendre les fabulations des derniers grands Prix Nobel de la physique, de la mécanique quantique, on découvre - et eux-mêmes l'admettent - qu'il entre en pleine imagination scientifique, indémontrable, inobservable ou "pseudo-science", selon  leurs propres termes. Si Paul Dirac a raison, je dirai comme lui que l'idée de l'évolution des lois elles-mêmes de la nature, est certainement vraie parce qu'elle est belle. Peut-être  conduit-elle au chaos. Mais ne faut-il pas détruire un ordre pour créer un nouvel ordre? Ainsi, les lois esthétiques évoluent-elles, se renient-elles pour se réaffirmer autrement. Et il en est de même des lois sociales. La Nature ne fait pas autrement.
Notre rapport au monde, sous toutes ses formes, est fabulatoire, mythique, sujet à toutes les conjectures.
Sauf la souffrance, vis-à-vis de laquelle je ne saurais prendre aucune liberté mentale, scientifique, éthique, humaine. C'est hélas la seule pierre de fondation qui demeure absolue et universelle dans toute ontologie, et même dans la théorie-fiction de la mythanalyse.

vendredi, juin 29, 2018

Actualité et sensibilité mythique


Chacun de nous garde la mémoire neuronale des fabulations qui ont marquées les stades successifs de développement de son rapport imaginaire au monde (Weltanschauung). Il en résulte chez chacun de nous une sensibilité aux mythes que véhicule notre culture d'adulte, lorsque ceux-ci entrent en résonance avec notre inconscient. Cela se produit lorsque des situations émotionnellement intenses se présentent à nous qui réactivent spécifiquement ces matrices neuronales individuelles et les récits d'expériences vécues qui leur sont attachées. 
C'est en ce sens que de fortes émotions indiquent toujours l'affleurement de mythes dans notre conscience. Elles indiquent que notre mémoire neuronale de nos fabulations singulières sont orchestrées par les mythes présents dans notre culture. C'est ainsi que se fait en temps réel le lien entre notre inconscient singulier et nos imaginaires collectifs. Et ces liens mythiques opèrent dans les deux sens. Le succès des productions cinématographiques, littéraires, musicales, artistiques tient à ce qu'elles activent des mythes sociaux auxquels nous sommes sensibilisés singulièrement. La série Star Wars de George Lucas est construite sur les mythes bibliques de notre culture, que notre éducation religieuse nous a inculqués lorsque nous étions enfants. À l'âge de 10 ans, j'imaginais que le monde avait été créé par Dieu et que je devais éviter de pécher sous peine d'être puni. Cela restera inscrit dans ma mémoire toute ma vie, même lorsque je m'en défendrai. 

mercredi, juin 27, 2018

Mythanalyse de deux fabulations rationalistes, celle de Spinoza et celle de Hegel




Spinoza est, selon moi, après Démocrite et Lucrèce le premier grand philosophe matérialiste ou athée. Deus sive Natura, écrit-il (Eth., IV, 4, dem.). Il identifie Dieu à la Substance et à  l'Étendue. Il rejette toute idée d'un Dieu singulier, personnel et créateur. Appelant la Nature Dieu, il se présente en athéiste masqué, du fait des persécutions dont il a été victime, comme le souligne l'un de ses plus grands connaisseurs et traducteurs: Robert Misrahi. Dieu est là de toute éternité, parce qu'il est la Nature. Jusque là, nous sommes d'accord, sans savoir, ni lui, ni moi, ni personne ce que peut-être cette éternelle éternité. 
Mais Spinoza considère la Nature comme une substance géométrique et il adopte lui-même une présentation géométrique de sa démonstration dans l'Éthique. Ce qui est pertinent, bien que terriblement ennuyeux à lire, puisqu'il inclut la pensée dans sa conception de la Nature. Il y inclut aussi, ce qui est logique les affects, qu'on peut traduire comme les émotions et les sentiments. Pour Spinoza, Dieu est la Raison absolue et éternelle. Il en résulte, selon lui, que la Nature est absolument rationnelle et que notre joie et notre liberté humaine consistent à adhérer totalement à la conscience de cette rationalité. Nous sommes libres, parce que nous sommes capables de dépasser nos émotions et passions qui nous cachent cette rationalité universelle pour la découvrir et nous y identifier. C'est évidemment là un sophisme. La Raison universelle ainsi conçue est absolument déterministe et ne laisse aucune place à la liberté humaine, si ce n'est dans l'erreur où nous conduisent nos passions, ou dans la conscience rationaliste de notre non-liberté. Je dirai comme Luc Ferry que cette position philosophique est "délirante". Elle tellement contradictoire qu'elle est intenable pour l'esprit humain, même celui qui est relativement rationaliste, et a fortiori pour un rationalise intégral de style spinoziste. 
Je résumerai donc la philosophie de Spinoza en ces mots: Deus sive Natura, sive Ratio. Les passions humaines ne sont que des défauts (manques) de Raison. 
Affirmer que la Nature est absolument rationnelle, géométrique ou mathématique, c'est certes la position d'Einstein ou de Stephan Hawkings, deux génies de l'astrophysique, lorsqu'ils parlent de l'Univers, (ce qui est plus confortable ou satisfaisant quand on est scientifique),  mais j'y vois plutôt un intégrisme de la Raison qui devient par son jusqu'auboutisme irrationnel et relève de la fabulation. Il s'agit d'une métaphysique rationaliste dont le purisme est une "pure" hypothèse intéressante en science positiviste, mais intenable en science contemporaine incluant la physique quantique. 

L'autre grand philosophe qui a affirmé à son tour que tout ce qui est réel est rationnel et que tout ce qui est rationnel est réel, c'est Hegel. Mais alors que la fabulation spinoziste est immuablement, éternellement fixiste, celle de Hegel y introduit l'Histoire par le biais de la dialectique. Au lieu du fixisme éternel de Spinoza, la dialectique hégélienne fonde une vision dynamique de la Nature, et dès lors, ce n'est plus la Nature qui est Dieu, mais la Raison. Deus sive Ratio. Mais ce Dieu identifié à la Raison, contrairement à celui de Spinoza, est créateur. Il n'est pas fixiste, mais évolutionniste. Il introduit dans sa métaphysique rationaliste la "flèche du temps" chère à  Ilya Prigogine. Non pas dans le sens darwinien de l'adaptation, mais par un certain désordre, par la contradiction qui fait progresser la Raison, et cela s'appelle l'accomplissement de l'Histoire vers le règne final de la Raison. 
Contrairement à Spinoza, Hegel n'est pas un matérialiste et athéiste masqué, mais un idéaliste déclaré qui croit que ce sont les Idées qui font progresser l'Histoire et non la matière. Le réel n'est pas pour Hegel une Substance et une Étendue, mais les Idées. Il réactive ainsi selon une nouvelle fabulation théorique la philosophie idéaliste de Platon. Il faut attendre la dialectique marxiste et la célébration des Révolutions du prolétariat pour aboutir à nouveau à un matérialisme de la Nature.

Nous voyons ainsi deux variantes du rationalisme intégral ou extrémiste qui nous apparaissent comme deux fabulations audacieuses, géniales, qui relèvent toutes deux d'un désir d'ordre, éternel pour Spinoza, attendu et final pour Hegel, qui expliquent le sens de l'Univers, du Cosmos, de la Vie, selon le terme qu'on voudra choisir.
Ce sont paradoxalement, aux yeux du mythanalyste deux versions fabulatoires extrêmes du rationalisme. Dans les deux cas, selon deux récits différents, l'un fixiste, l'autre dynamique, c'est le culte de la Raison qui est sur scène. On y verra une quête de perfection, au sens latin du mot: l'accomplissement de l'Être. La mythanalyse en cherchera l'origine dans le Stade de la tortue sur le dos: une impuissance durable qui crée chez le nouveau-né une frustration qu'il compensera par la suite, au Stade du homard, par un désir d'accomplissement de son être, une soif d'imaginer et de construire un monde qu'il puisse contrôler entièrement (Spinoza) ou espérer contrôler à terme (Hegel).
De fait, rien ne permet d'affirmer et encore moins de démontrer que le réel soit rationnel, ni que le rationnel soit réel, ni que ce rationalisme soit indiscutablement "vrai" comme la géométrie, ni que le Progrès de l'Histoire nous conduise au règne final de la Raison. 
Nous observons plutôt l'irrationalisme de la nature, son imperfection, son chaos, son désordre qui laissent place à son évolution par le hasard et la divergence (un concept fondamental que j'oppose au darwinisme)*. Ce désordre crée souvent de grands malheurs humains, mais il laisse une place fondamentale à la liberté, qui donne un sens humain à notre évolution, permet le meilleur comme le pire. Nous cherchons, sans adopter les postures fabulatoires de Spinoza, ni de Hegel, à construire un ordre, un mieux-être dans la condition humaine, en relation avec la nature à laquelle nous appartenons, mais nous sommes des hommes qui aspirons à cet ordre, qui le construisons par moments, selon nos désirs, nos valeurs, donc nos fabulations humaines, sans faire monter en scène la géométrie mathématique absolue, ni la déesse Raison pour nous en remettre à leur pouvoir absolu. Nous ne leur déléguons aucune parcelle de notre modeste pouvoir ni de notre entière responsabilité. 

La mythanalyse est un humanisme, une philosophie humaniste, relativiste, fabulatoire, en quête d'une meilleure condition humaine. Nous sommes beaucoup plus humble que Spinoza et Hegel, dont les excès de rationalisme fabulatoire nous ont appris à être plus auto-critiques.

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*Hervé Fischer, La divergence du futur, vlb éditions, Montréal, 2014.

jeudi, juin 21, 2018

Colloque de Catania: mythanalyse de l'insularité

Le colloque s'est tenu à Catania (Sicile) les 21 et 22 mai 2018




Dans la bibliothèque de l'Université de Catania


                     Hervé Fischer, Anna-Maria Pacanha, Orazio Maria Valastro, Christian Gatard

                         Luc Dellisse, Hervé Fischer, Orazio Maria Valastro, Sylvie Dallet



Voir le diaporama à:

http://analisiqualitativa.com/portale/galleria-immagini/convegno-internazionale-mitanalisi-dellinsularita/



mercredi, juin 20, 2018

L'inconscient collectif n'existe pas.



L'inconscient individuel est de gestation biologique. L'inconscient collectif n'existe pas, quoi qu'en ait pu écrire Jung. Il n'est pas dans l'air que nous respirons, ni dans un monde archaïque antérieur à l'apparition de l'homo sapiens. Il est de gestation historique et sociologique, inscrit dans notre culture collective, qui est  notre mémoire sociale, incluant notre langue, notre syntaxe, nos mots, nos idéologies, nos monuments, nos récits mythiques. Cette culture dans laquelle nous sommes immergés est sociologique et elle influence chaque individu, incluant son développement biologique fabulatoire (c'est le rôle de l'autre, la société). L'inconscient individuel comme l'imaginaire collectif sont des acquis, qui s'installent dans nos modes de pensée et nos comportements par la répétition, la saturation des idées.

mardi, juin 19, 2018

Mythanalyse et évolution biologique



Notre évolution biologique se fait par inscription dans la plasticité de nos cerveaux dès le stade fœtal de nos  émotions, plaisirs et douleurs, puis de nos modes de fabulation, puis de pensée, qui se constituent en matrices dans nos réseaux neuronaux individuels et se transmettent partiellement biologiquement dans notre ADN.
Notre postulat est donc que nos sensations, fabulations et idées les plus récurrentes ou les plus marquantes s'inscrivent dans notre biologie humaine. 

lundi, juin 18, 2018

Dé-idéaliser la pensée



En Occident, l'idéalisme, d'origine magique, religieuse et platonicienne, est devenu notre seconde nature. Nous avons tellement pris l'habitude de prendre les mots pour des "essences", de nous référer à des êtres supérieurs, des dieux, des vérités éternelles, des archétypes, que même Marx demeurait idéaliste lorsqu'il parlait de l'art. L'idéalisme est une aliénation terriblement ancrée en nous, dont nous peinons à nous libérer.
Quand admettrons-nous que les mots ne sont que des métaphores issus de nos fabulations, notre logique des habitudes et des liens familiaux transposés en rationalisme?
Reconstruire une pensée, un langage matérislistes, démystifier notre logique ,se présentent comme un défi inaccessible. Je me surprends moi-même constamment, malgré ma volonté d'adopter une attitude mentale matérialiste, à employer des figures de pensée idéaliste. Bien que je postule avec insistance que la mythanalyse est matérialiste, une théorie biologique et constructiviste du développement de nos facultés fabulatoires, je cherche constamment à élucider nos processus inconscients. Comme si la lumière était la vérité. J'emploie manifestement ainsi une métaphore religieuse! Je l'emploie parce que je lui trouve la vertu d'être claire! Et donc compréhensible pour tous. C'est tomber une deuxième fois dans la pensée idéaliste et la partager avec mes lecteurs ou auditeurs. Le mot tomber lui-même n'évoque-t-il pas la chute de l'ange ? Comment me sortir de cette configuration idéaliste héritée de mon histoire occidentale et qui devenue une pensée convenue, stéréotypée ? La pensée chinoise m'offrirait-elle une porte de sortie? Je ne connais pas assez cette langue pour l'affirmer. Je devrai consulter des experts. Mais d'avance je ne doute pas que le chinois repose sur d'autres métaphores, sans doute aussi aliénantes, pour asseoir ses vérités. Pour libérer notre pensée (ce qui est impossible), nous ne pouvons qu'opposer des métaphores à d'autres métaphores, donc des mythes à d'autres mythes. C'est ainsi que le mythanalyste peut développer une combinatoire mentale plus efficace, se désancrer (encore une métaphore et un mythe), se déraciner, se libérer dans sa pensée.

dimanche, juin 17, 2018

La pensée fabulatoire





La mythanalyse souligne l'importance du développement des facultés fabulatoires chez l'enfant avant même qu'il accède au langage dans son rapport pratique au monde et dans son interprétation de celui-ci. L'enfant est in-fans, en latin celui qui ne parle pas encore. Pourtant, il pense!
Adultes, fussions-nous professeurs de philosophie, orateurs ou philosophes, nous pensons constamment de façon non-verbale avant de peaufiner éventuellement notre pensée avec des mots, avant de construire des démonstrations textuelles qui ne font que préciser et consolider des pensées fabulatoires ou intuitives. Et il est clair que la conviction qui nous anime en écrivant ou en lisant n'est pas un dispositif langagier linéaire et mécanique, mais un sentiment lié à l'imagination, au désir ou au rejet, c'est-à-dire qui relève de l'intuition plutôt que d'une métaphysique langagière strictement rationnelle. La pensée qui m'anime dans ma foi religieuse est de l'ordre de la foi irrationnelle  et non pas d'une opération textuelle comme 2+2=4.
Le principal de notre pensée est antérieure à sa formulation langagière. Notre fabulation joue un rôle plus déterminant que notre pensée textuelle dans notre rapport au monde, quoiqu'en aient pu dire et croire Derrida ou Lacan.
C'est dire à quel point la mythanalyse est plus importante en épistémologie que la logique rationnelle.
Nietzsche l'avait bien saisi, lui qui écrit dans Par delà le bien et le mal que les philosophes "font tous semblant d'être parvenus à leur opinion par le développement naturel d'une dialectique froide, pure et divinement insouciante (...) tandis qu'ils défendent au fond une thèse anticipée, une idée subite, une inspiration et, le plus souvent un désir intime qu'ils présentent d'une façon abstraite, qu'ils passent au crible en l'étayant de motifs laborieusement recherchés." Qui dit mieux? Nietzsche est décidément un immense philosophe, qui a su déceler avant les autres, avant les phénoménologues des intentions, avant Husserl et Merleau-Ponty, avant Lacan, Wittgenstein, et Varela le désir intime dans le rationalisme le plus prétentieux.
La théorie de Lacan réductrice de l'inconscient individuel au langage paraît fort étrange pour un intellectuel qui se prétendait obscurantiste ou faisait tout pour le paraître.

samedi, juin 16, 2018

le stade de la conscience augmentée


              Le stade de la conscience augmentée, acrylique sur toile, 122 x 183 cm, 2012

Le développement biologique de nos facultés fabulatoires ne s'arrête pas lorsque nous atteignons le stade adulte. Je le savais, bien sûr, mais j'ai longtemps recherché comment identifier ce stade ultérieur de la vie, lorsque nous passons de l'autre côté du sommet de notre énergie vitale.
Je l'avais exprimé intuitivement dans ce tableau de 2012, peint la même année que les autres de ma série Mythanalyse présentée dans mon exposition au Centre Pompidou en 2017 et que j'avais d'abord intitulé La vie. Pourtant, je n'avais pas encore décidé d'y fixer mon choix et l'avais mis en attente. Six ans plus tard, je n'hésite plus à l'intégrer dans ce bestiaire qui compte donc désormais 10 peintures.

Tandis que la vie s'esquive lentement mais irréversiblement, telle une femme élégante qui évoque ma mère, commence le compte à rebours accéléré qui nous conduit vers la maturité puis la mort, diverse, joyeuse mais tragique aussi, invincible quoi qu'on veuille et fasse, dont la perspective inverse notre rapport au monde.
Avec la maturité apparaît cette conscience que j'appelle la conscience augmentée, nourrie par l'information planétaire en temps réel de l'âge du numérique, et par l'exigence éthique qu'elle implique, mais aussi construite par l'expérience vécue au sein de la société, qui modifie profondément nos fabulations. L'intensité le cède au calme et à la densité, l'impatience à la distanciation, l'aventure  au parachèvement d'un édifice de vie et le nomadisme du coureur de planètes à l'enracinement.
Je tiens à cette référence d'actualité aux médias numériques, pour souligner le déterminisme sociologique de nos facultés fabulatoires.

vendredi, juin 15, 2018

PROGRAMME DU COLLOQUE DE CATANIA, 21-22 mai 2108




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MYTHANALYSE DE L'INSULARITÉ

COLLOQUE INTERNATIONAL EN SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, 21-22 mai 2018
21 mai 2018 - 09h00 18h00
Bibliothèques Réunies "Civique et A. Ursino Recupero" - Pétit Réfectoire - Via Biblioteca n. 13 Catania Monastère Bénédictin de Saint Nicolò l'Arène
22 mai 2018 - 09h00 19h00
Chœur de Nuit - Monastère des Bénédictins - Piazza Dante Alighieri n. 32 Catania Département de Sciences Humanistes, Université des Études de Catania
Colloque international organisé par
M@GM@ Revue internationale en sciences humaines et sociales - Osservatorio dei Processi Comunicativi, Association Culturelle Scientifique
Société Internationale de Mythanalyse, Montréal (Québec)
Thrinakìa, Prix international d'écritures autobiographiques, biographiques et poétiques dédiées à la Sicile - OdV Le Stelle in Tasca
Avec le parrainage de l'Université des Études de Catania
En collaboration avec
Département de Sciences Humanistes, Université des Études de Catania Assessorat pour la Culture de la ville de Catania
Bibliothèques Réunies "Civique et A. Ursino Recupero"
Institut Français de Palermo
Alliance Française de la ville de Catania Lycée Artistique d'État Emilio Greco, Catania
Argumentaire synthétique
Le colloque est centré sur le thème de l’insularité. Il se propose de dresser un état des recherches et des travaux récents, de questionner l'insularité entre mythe et imaginaire et dégager des nouvelles perspectives d'études autour d'une mythanalyse de l'île. Le colloque est associé au prix international Thrinakìa, centré sur la mémoire, le patrimoine culturel immatériel de la mémoire et de l'imaginaire de la Sicile.
ABSTRACTS DU COLLOQUE
Traduction depuis l'italien et le français par: Nella Cutuli et Sylvie Lescuyer
Alliance Française de Catania
PREMIÈRE JOURNÉE DU COLLOQUE MYTHANALYSE DE L'INSULARITÉ
Lundi 21 mai 2018
Bibliothèques Réunies "Civique et A. Ursino Recupero" - Pétit Réfectoire - Via Biblioteca n. 13 Catania Monastère Bénédictin de Saint Nicolò l'Arène
Mythanalyse de l’île, 
Hervé Fischer
Président de la Société Internationale de Mythanalyse, directeur de l'Observatoire international du numérique - Université du Québec à Montréal
Du point de vue de la théorie mythanalytique que je construis, la fascination pour l’île illustre la nostalgie du "stade fœtal" que j'ai décrit, ce premier stade de la fabulation utérine dans l'évolution des étapes fabulatoires de l'être humain. On en retrouve l'imaginaire dans tous les mythes d'un âge d'or, d'un paradis perdu, si fréquent dans les religions. De nos jours encore, l'attraction pour les îles, supposées merveilleuses, qu'exploitent les agences de voyage, ne laisse aucun doute sur le lien profond qui demeure dans notre mémoire inconsciente par rapport au stade fœtal. Nous sommes sensibles à la ressemblance entre la poche utérine où le fœtus se développe dans le liquide amniotique et la configuration de l'île, isolée du monde extérieur dont les côtes et les plages évoquent la membrane utérine chaude et protectrice. Les atolls offrent l’image même d’une poche d’eau de mère entourée par la barrière de corail.
Hervé Fischer: artiste multimédia, fondateur de la Société internationale de mythanalyse (www.mythanalyse.org), est de double nationalité française et canadienne. Il a publié une vingtaine de livres sur l’art, le numérique et les imaginaires sociaux, notamment L’avenir de l’art, La société sur le divan, Mythanalyse du futur, En quête de mythanalyse (dir.), Le choc du numérique, La pensée magique du Net, La postmodernité à l’heure du numérique - Regards croisés avec Michel Maffesoli. Le Centre Pompidou lui a consacré en 2017 une rétrospective « Hervé Fischer et l’art sociologique ».
Le stade fœtal - Hervé Fischer (2014)
Mythanalyse de l’île
Orazio Maria Valastro
Sociologue et chercheur indépendant, directeur scientifique de M@gm@ - Revue internationale en sciences humaines et sociales, docteur de recherche en Sociologie, Université Paul Valéry Montpellier III
Réfléchir sur la condition insulaire, sur le fait concret de se percevoir comme une île ou sur le sentiment de vivre sur une île, c'est considérer l'île comme un espace physique et existentiel enfermé sur elle-même, réexaminant en même temps les stéréotypes et les idées préconçues autour d'une insularité d'esprit qui nous limite et circonscrit notre vision du monde. Il est possible de solliciter une réflexion sur le monde social pour nous le révéler tel qu'il est, à travers une analyse attentive des mythes et de l'imaginaire qui deviennent porteurs d'espoir, pour reconnaître les mythes et l'imaginaire nuisibles à notre humanité, et accompagner le désir de regarder au-delà des frontières physiques et existentielles de l'insularité, en reconsidérant le monde comme nous le voudrions, pour regarder au-delà de soi en relation avec les autres. En ce sens, le patrimoine immatériel de l'Archive de la mémoire et de l'imaginaire sicilien, nous permet d'observer les représentations de nous-mêmes et du monde à partir d'une Sicile s'érigeant à mythe paradigmatique des contradictions de la vie quotidienne.
Mythanalyse de l'insularité - Colloque International en Sciences Humaines et Sociales Catania 21-22 mai 2018
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Orazio Maria Valastro: Sociologue et chercheur indépendant né à Catane en 1962, affilié à la Société internationale de mythanalyse, fondateur et directeur scientifique de M@gm@ - Revue Internationale en Sciences Humaines et Sociales, Docteur en Sociologie - Université Paul Valéry Montpellier III, maîtrise en Sociologie à la Sorbonne - Université Paris Descartes.
Président de l'Organisation de volontariat Les Étoiles dans la poche, il a conçu Thrinakìa - prix international d'écritures autobiographiques, biographiques et poétiques, dédiées à la Sicile. Depuis 2005 dirige les Ateliers de l'imaginaire autobiographique, et préside l'Archive de la mémoire et de l'imaginaire sicilien.
Ses études et ses expériences de vie l'ont conduit à se spécialiser dans l'écriture autobiographique, et ils l'ont préparé à accompagner l'autre pour expérimenter l'écriture de soi, conjuguant une pédagogie de la mémoire et de l'imaginaire avec une éthique d'écoute sensible de soi et de l'autre.
Dessin: détail AT9 - Test anthropologique à 9 éléments Dessin de Giuseppa Gusmano (2018)
Ateliers de l'Imaginaire Autobiographique
Parmi ses publications récentes: Mythanalyse de l’île: polysémie de l’imaginaire de Thrinakìa (in Hervé Fischer, En quête de mythanalyse, Aracne Editrice, 2017), Il dispositivo autobiografico tra ricerca esperienziale trasformativa e pedagogia dell'immaginario (Encyclopaideia Journal of phenomenology and education, 2017), Immagini contemporanee del dissenso (in Boumard P., D'Armento V.A., Carnevale A., Etnografie del dissenso: teorie e discorsi, Pensa Multi Media, 2017), Thrinakìa: antologia della terza edizione del premio internazionale di scritture autobiografiche, biografiche e poetiche, dedicate alla Sicilia (Casa Editrice Kimerik, 2017), La Sicilia come mito paradigmatico dell'insularità postmoderna (Agorà, v.56, 2016), Diario di un formatore autobiografico: esperienze di narrazioni e scritture di sé (Edizioni Nuova Cultura, 2016), Mythanalyses postmodernes de la santé mentale (Aracne Editrice, 2014), Cartografia minimale dell’immaginario autobiografico (Edizioni Mythos, 2013), Écritures sociologiques d’ailleurs (Les Éditions du Net, 2013), Biographie et mythobiographie de soi: l’imaginaire de la souffrance dans l’écriture autobiographique (Editions Universitaires Européennes, 2012), Écritures de soi en souffrance (Aracne Editrice, 2012).
Quelques mythes siciliens dans les Métamorphoses d’Ovide : Cérès et Proserpine, Cyané, Alphée et Aréthuse
Rosalba Galvagno
Maître de conférences de Critique littéraire et littératures comparées, Département de Sciences Humanistes, Université de Catane
Ovide a passé quasiment une année entière en Sicile entre 25 et 23 av. J.C., pendant son voyage de retour d'Athènes à travers l'Asie Mineure, où il s’était rendu de Rome pour continuer et perfectionner ses études.
«J’ai visité les villes magnifiques d’Asie, sous ta conduite, j’ai découvert la Trinacrie; nous avons vu le ciel resplendir des flammes de l’Etna, que vomit la bouche du géant enseveli sous la montagne, et le lac d’Henna, et le marais fétide de Palicus, et Cyané à qui l’Anapus mêle ses eaux, non loin de la nymphe qui, fuyant le fleuve de l’Élide, court encore aujourd’huy cachée sous les eaux de la mer». (Ovide, Pontiques, II, 10, 21-29, tr. par Jacques André, Les Belles Lettres, Paris, 1977)
C’est justement à Syracuse que le poète a pu admirer la merveilleuse source qu’on peut encore voir aujourd’hui au fond de la rue Aretusa, où une petite bande de terre sépare la mer de la fontaine actuelle que Cicéron mentionnait dans les Verrines et que Sénèque évoquera comme l'une des merveilles qui invitent à entreprendre un voyage en Sicile.
Ovide insère à son tour le mythe d'Aréthuse dans un mythe plus important, celui de Cérès et Proserpine, par lequel commence la deuxième partie du livre V des Métamorphoses, sujet du long chant de Calliope. C'est Ovide qui provoque la rencontre de Cérès et d'Aréthuse sur le sol de la Sicile et qui met ainsi en présence les deux mythes. Dans ce même mythe apparaît également une autre source, qui précède celle d'Aréthuse. Il s’agit de Cyané, un étang qui tire son nom de l'une des nymphes les plus célèbres de Sicile. Cyané, comme Aréthuse, se transforme en fontaine pour avoir essayé d'empêcher,
Mythanalyse de l'insularité - Colloque International en Sciences Humaines et Sociales Catania 21-22 mai 2018
 

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dans les eaux dont il était la divinité, le passage de Pluton lors de sa course avec Proserpine. En effet, dans la variante ovidienne de l'enlèvement de Proserpine, Pluton ouvre un passage dans le sol en enfonçant son sceptre dans l'étang de Cyané qui, suite à cette violence, se transforme en eau. Le chant de Calliope ne fait alors que se tisser, au beau milieu d'un mythe, avec celui d'une mère qui subit le deuil pour la perte de sa fille, d'autres mythes symétriques comparables à celui- ci.
Rosalba Galvagno est maître de conférences de Littératures comparées et de Théorie de la littérature à l'Université de Catane. Elle s’est habilitée comme professeur titulaire de Littérature italienne, Critique littéraire et Littératures comparées, et de Littérature italienne contemporaine. Elle étudie en particulier les relations entre le discours littéraire et le discours psychanalytique, dans le domaine duquel elle a étudié le mythe métamorphique et ses variations dans la littérature moderne et contemporaine, et les différentes configurations du thème de l'illusion dans la littérature occidentale (Ovide, Shakespeare, Rousseau, Balzac , Kafka, Leopardi, Pirandello, Carlo Lévi, Consolo, Capuana, Flaubert, Verga, Lacan).
Parmi ses publications: Pizzuto e lo spazio della scrittura, Messine, Sicania 1990; Le sacrifice du corps. Frayages du fantasme dans les Métamorphoses d'Ovide, Panormitis, Paris, 1995; Carlo Levi, Prima e dopo le parole: scritti e discorsi sulla letteratura, Rome, Donzelli Editore 2001 (avec Gigliola De Donato); ); Carlo Levi, Narciso e la costruzione della realtà, Olschki, Florence 2004; Federico De Roberto, Catania, Editions Papiro, Enna 2007 (avec Dario Stazzone). I viaggi di Freud in Sicilia e in Magna Grecia, Maimone Editore, Catania 2010. «Diverso è lo scrivere». Scrittura poetica dell’impegno in Vincenzo Consolo, Sinestesie, Avellino 2015. La litania del potere e altre illusioni. Leggere Federico De Roberto, Marsilio, Venise 2017. Elle est également l'auteur de nombreux essais critiques publiés dans des revues et des volumes italiens et étrangers.
L'île du désir, de la mémoire et du nostos: la Sicile d'Ovide à Consolo Dario Stazzone
Président du Comité Dante Alighieri de Catane
Dans la dixième élégie du deuxième livre des Epistulae ex Ponto, Ovide se rappelle son voyage de jeunesse en Sicile, entre 26 et 25 av. J.C., en compagnie de Pompeo Macro. Dans l'amertume de la relegatio à Tomi, le poète entonne un hymne à l'île. La Sicile est transfigurée dans la mémoire et la nostalgie, elle devient une image lumineuse de la jeunesse. Le motif se répète dans les écrits de l'un des poètes arabes de la Sicile, Ibn Hamdis, forcé de quitter l'île au cours de la « Reconquista » normande; ce motif revient parmi les écrivains et les poètes du XXe siècle. La nostalgie, le motif de l’odyssée, le nostos impossible, caractérisent l’œuvre de Vincenzo Consolo: l’Olivo e l’olivastro est le roman qui, dans le souvenir de la Sicile, prend les tons les plus intenses et pathémiques.
Dario Stazzone est Chercheur auprès du Département des Sciences humaines de l'Université de Catane. Après une Maîtrise en Lettres Modernes et en Philosophie obtenue avec le maximum des notes, les félicitations du jury et la dignité de publication de la thèse, il obtient le titre de Docteur en Etudes Italiennes. Il est professeur assistant de Théorie de la littérature et il a enseigné Rhétorique à Sciences politiques. Il est l'auteur d'articles publiés sur "Sinestesie", "Belfagor", "Bohèmien", "Oblio", "Annali della Fondazione Verga" et "Otto/Novecento" et d'essais consacrés à Levi et Consolo. Il a édité la réimpression de la monographie Catania et de Il patrimonio artistico di Catania de Federico De Roberto.
Les archétypes de l'insularité pour l'identité du territoire et des villes
Carlo Truppi
Architecte, professeur de Conception environnementale, Doyen de la Faculté d'Architecture de l'Université de Catane (Syracuse), directeur du Département d’Analyses, de Représentation et de Projet dans les Zones Méditerranéennes (ARP)
L'objectif principal est l'identité, enregistrer les caractéristiques territoriales, «voir» pour en tirer des indications, respecter en honorant les archétypes, «signes» archaïques qui caractérisent la nature et les constructions, «incarnent l'identité et la tradition des lieux», expression de la culture qui, à travers les images reçues et réalisées, identifie le patrimoine environnemental. Dans les interventions, nous devons considérer ce qui est le plus approprié pour notre culture et pour notre territoire, pour une formation substantielle continue du paysage. En reprenant les caractéristiques du lieu, en honorant les archétypes, outre la culture et les signes de la nature, nous ne pouvons ignorer le visuel et l'émotionnel, une harmonie enveloppante entre la nature et les constructions, avec des significations éternelles archétypiques, des valeurs permanentes à évoquer et à renouveler.
Une valeur primordiale des archétypes est d'incorporer et de communiquer l'identité des lieux. Une valeur commémorative et projective! L'identité, reconnue et valorisée, est le fondement des hypothèses d'intervention, de plaisir
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social, d'attractivité touristique. Pour ses valeurs intrinsèques, l'identité correspond aux particularités que nous aimons reconnaître, trouver et que nous devons préserver et valoriser. Pour l'intérêt que cet environnement spécifique suscite, pour l'attrait touristique dû à ses particularités, au lieu de s'appuyer sur l’international style, l'homologation générée en faisant la même chose partout, mettons en valeur le local.
Le paysage est connecté à la nature, à l'histoire et à la vie, dans la création et dans l'édification il ouvre une vision énorme sur la culture, sur les conditions existentielles. Avec l'évolution de la racine des conditions fondamentales, les archétypes font, préservent les aspects significatifs emblématiques des caractéristiques qui améliorent le lieu. Je prends en considération principalement: la typologie; l'utilisation naturelle de vrai matériel; la signification des formes dans les constructions; l’espace dans la zone urbaine et dans les habitations. La côte, frontière entre la terre et la mer, souligne les «signes», encadre dans le paysage les caractéristiques de la nature et les archétypes des constructions. La morphologie côtière est l'une des preuves des particularités du lieu.
La préservation de leurs qualités, liées à la beauté, au plaisir visuel et des habitations, à l'utilisation habile de la technologie, à l'adéquation des formes, fait clairement respecter le territoire, les caractéristiques de l'environnement. Si cela se produit, nous sommes vraiment dans le pay-sage, l'aboutissement d'un pays vraiment sage, un lieu responsable, qui préserve et prend soin de ses caractéristiques, programme le développement durable, contribue au bien social, au plaisir de l’habitation et du visuel. Résultats culturels naturels, qui apportent le bien social, l'attrait touristique et les avantages économiques conséquents.
Carlo Truppi: il obtient sa Maîtrise en Architecture en 1976, il devient chercheur en 1984 en Technologie de l’architecture, à la Faculté d'Architecture de l'Université Federico II de Naples, en 1991 il passe le concours pour professeur agrégé de Technologie de l'architecture, en 1999 il passe le concours de Professeur de Technologie d'Architecture à la Faculté d'Architecture de Naples. Il est appelé pour ce rôle par la Faculté d'Architecture de Catane, dont le siège est à Syracuse. En 2005, il est élu Directeur du Département ARP de la Faculté d'Architecture de Syracuse. En 2008, il est nommé Président du Pôle didactique scientifique de Syracuse. En 2010, il est élu Doyen de la Faculté d'Architecture de Catane dont le siège est à Syracuse. Il coordonne le Master universitaire de deuxième cycle en Intégration de l'architecture dans le paysage, organisé par l'Université de Catane avec la collaboration du Consortium Universitaire Archimède de Syracuse.
Parmi ses publications récentes: Carlo Truppi, Vedere i luoghi dell’anima con Wim Wenders, Mondadori Electa, Milan, 2012 (deuxième édition enrichie et mise à jour); Carlo Truppi, Ruga. Sentieri nell’arte e nell’amore, SE, Milan, 2013 (deuxième édition); James Hillman et Carlo Truppi, L’anima dei luoghi, Rizzoli, Milan, 2004).
Les images de l'île verte : l’île d’Ischia entre mythe et modernité
Luigi Caramiello
Professeur de Sociologie de l'art et de la littérature, Département de Sciences Sociales, Université de Naples Federico II
L'antique Pithecusa, peut-être la première colonie grecque dans le sud de l'Italie, avec un immense fond "mythique", possédait depuis des temps immémoriaux un certain charme et pouvoir d'attraction. Nombreux sont les poètes, les artistes, qui l'ont aimée, non seulement en tant qu’étape du Grand Tour, et qui l’ont évoquée de différentes façons dans leurs œuvres. Et pourtant, jusqu'à une date assez récente, l'île n'avait pas encore réussi à combler un certain retard, qui contraignait ses habitants à une existence pauvre et défavorisée. Mais à partir des années 30 l'île verte est découverte par le cinéma, elle devient le lieu d'élection de certains films de grande popularité. Elle parvient, à travers un dispositif «moderne», à trouver sa place dans l'imaginaire, refondant sa dimension mythique dans des formes tout à fait originales. A partir de ce moment-là, un mécanisme de changement est activé, il inclut le territoire local et la façon d'être des habitants de l’île. L'arrivée sur l'île, de façon pratiquement permanente, de personnages du calibre de Luchino Visconti et d’Angelo Rizzoli marque un tournant. Le premier s'engage à exalter la poétique de son côté sauvage, tandis que le second met en marche, concrètement, les dispositifs essentiels d'un processus typique de modernisation. L'usine à rêves attire de grandes stars et de grandes productions sur l'île. Il ne s’agit pas seulement de chefs-d'œuvre, le cinéma des films qui font recette voit aussi dans l'île un lieu approprié et pratique. L’économie pauvre de l'île voit ses humbles ouvriers se transformer en entrepreneurs. Un processus synergique d'évolution systémique, à partir des années 60, voit l'affirmation, non sans contradictions bien sûr, de l'île comme important district touristique international.
Luigi Caramiello (Naples, 1957), professeur de Sociologie de l'Art et de la Littérature à l'Université de Naples "Federico II", a enseigné à l'Université de Salerne, à l'Université de Bologne, à l'Université Parthenope, à l'Institut Universitaire Oriental, à l'Université de Budapest. Il a publié 12 livres et plus de 150 contributions scientifiques. Titulaire d’une Maîtrise obtenue avec 110/110 et félicitations du jury, il est journaliste professionnel, critique, réalisateur pour la RAI et auteur SIAE. Membre du réseau UNAR (bureau national de lutte contre la discrimination raciale) de la Présidence du Conseil des
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Ministres, il a dirigé plusieurs projets de recherche et participé à de nombreuses conférences et initiatives internationales. Parmi ses publications, Il Medium nucleare, Edizioni Lavoro, Rome, 1987; Da amore a Zapping, Pironti, Naples, 1995; La natura tecnologica, Curto, Naples, 1996; La droga della modernità, UTET, Turin, 2003; La gioventù del Silenzio, Pironti, Naples, 2007; Ischia fra sogni e bisogni, Edizioni della Meridiana, Florence, 2009; Frontiere culturali, Guida, Naples, 2012; L'Energia politica, Naples, Editorial Scientifica, 2015; Percorsi di sociologia dell'arte, Libreria Universitaria, Padoue, 2015; Il Maestro dei grandi, Pensa, Brescia, 2016; Oltre il luogocomunismo, Naples, Editoriale Scientifica, 2016; Sulle strade della Musica, Editorial Scientifica, Naples, 2017.
En passant par la Sicile: fée Morgana, en voyage dans la méditerranée
Ana Maria Peçanha
Chercheur associé Laboratoire d’Éthique Médicale et Médecine Légale, Faculté de Médecine, Université Paris Descartes, Séminaire Franco Brésilien
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SECONDA GIORNATA DEL CONVEGNO MITANALISI DELL'INSULARITÀ
Martedì 22 maggio 2018
Coro di Notte - Monastero dei Benedettini - Piazza Dante Alighieri n. 32 Catania Dipartimento di Scienze Umanistiche, Università degli Studi di Catania
Des Isles d’Auvergnes aux Outremers, parcours d’aventures utopiques
Sylvie Dallet
Professeure des universités (Arts), directrice de recherches au Centre d’Histoire Culturelle des Sociétés Contemporaines (Université Versailles ST-Quentin), présidente de l' Institut Charles Cros (Création Formation Recherche), Paris, historienne, philosophe, et peintre
L’Auvergne est peu connue pour ses îles quoique ses volcans et ses sources (« eaux vertes ») suggèrent, par leurs expressions sporadiques abruptes, une étrangeté qui suggère une insularité de principe. Les continentaux n’ont pas la même perception des îles que les continentaux comme le remarque le philosophe Gille Deleuze dans un recueil (L’ile déserte et autres textes, éditions de Minuit, 2004) publié en 2004 qui parle de l’île comme matière d’un immémorial profond du recommencement.
L'abbé Rougier (1864-1932) est un aventurier du début du siècle grandi près de Lavaudieu en Auvergne qui, après une enfance familiale au Château des Isles, s’installe en Océanie vers 1888 et y bâtit un espace de coprospérité îlien qui bâtit des villes, fait du commerce, développe la recherche ethnographique grâce à l’héritage fabuleux d’un bagnard. En 1993, deux illustrateurs de la même région, Paul Basselier et Franck Watel, commencent une aventure dessinée Les Iles d’Auvergne, croquées dans le futur d’une région inondée, désormais parsemée d’iles volcaniques prospères. La saga mythique continue jusqu’en 2017, au gré des aventures de l’explorateur scientifique, Imago Sekoya. En 2017, le futur président Macron dit que la Guyane est une île, phrase reprise par les médias, jusqu’à que le géographe Emmanuel Lézy démontre que les Guyanes (française, hollandaise, anglaise), ces « pays des mille eaux », lieux de relégation et de paradis, peuvent être perçues comme un archipel détaché mythiquement du socle des Amériques.
Ces parcours portent, dans l’opiniatreté de leurs expressions singulières, la remarque fondamentale que Deleuze formule sur « les îles continentales accidentelles et dérivées ». L’île est à la fois le continent compact vers quoi l’esprit dérive et le point d’origine de sa construction personnelle, la possibilité de jouer les multiples rôles dont la société le prive.
L'organisation de l'île : Robinson et la liberté
Luc Dellisse
Écrivain et poète, professeur de scénario du cinéma à la Sorbonne et à l’École supérieure de réalisation audiovisuelle (Esra), ainsi qu’à l’Université libre de Bruxelles (ULB)
L’existence des humains se présente comme une suite de rencontres et d’actions cloisonnées entre elles. On agit comme si on avait dix morceaux de vie dissociés. Et pourtant, l’unité fondamentale de notre personnalité ne fait pas de doute – c’est même un des principes les plus féconds de la psychologie. « On entre dans Hegel comme on entre dans une histoire d’amour, et comme on entre dans sa salle-de-bains ». Ce n’est pas la diversité de nos agissements, mais la forme de transmission des savoirs dans la société actuelle, qui produit cet effet. Les études, les amitiés, les mouvements du cœur, les repas en famille, les épisodes sportifs, les lectures et les jeux, sont traités comme s’ils n’avaient presque rien à voir entre eux. Les enfants apprennent très tôt à compartimenter leur esprit. Devenus adultes, ils poursuivent le mouvement.
La grande affaire de l’esprit est de trouver son unité. C’est-à-dire, de créer un dispositif mental et un mode de vie pratique qui établissent des relations de suivi et de nécessité entre chacun des moments de notre vie, chacun de nos « hasards », chacune de nos créations. L’unité absolue de nos activités est un idéal inatteignable. Mais l’unité relative tient à l’organisation d’un espace imaginaire. Appelons-le : l’île de Robinson.
Le célèbre naufragé ne s’adapte pas aux conditions de son île : il en fait un double miniature et sommaire, conforme à ses besoins, de la civilisation dont il est issu. Il ne vit pas en solitude personnelle, mais en société virtuelle. Il similarise (Korzybski) les acquis de la société, c’est-à-dire le passé, au milieu de l’éternel présent de l’île déserte. A ce prix, il est à la fois plus libre qu’aucun citoyen de York ou de Birmingham, et plus complet et complexe qu’un sauvage et qu’un homme seul. Le travail de réunification peut commencer.
Le fripon divin qui est aux dieux ce que l'île est au continent
Christian Gatard
Sociologue, expert en dynamique de groupes et en créativité, fondateur de Gatard & Associés (Paris) - Institut international d'études qualitatives
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Le fripon divin est présent dans toutes les cultures. Il joue des tours pendables, possède une activité désordonnée incessante, une sexualité débordante. Il est une personnalité chaotique, à la fois bonne et mauvaise, une sorte de médiateur entre le divin et l'homme. Il passe avec facilité de l'autodérision au sérieux le plus total ; mourir, renaître, voyager dans l'au-delà et conter sont certains de ses attributs. Il est indispensable à la société : sans lui, elle serait sans âme. Claire Dorly parle de sa dérangeante diversité dans les registres de l'ombre et c'est précisément dans ces registres que l'on pourrait situer ce que les anglo-saxons nomment le trickster.
S’il est une créature mythique des légendes, il est aussi une composante de notre âme. Celle qui permet à l'enfant et plus tard à l'adulte d'avoir ce dialogue intérieur qui lui permet de se situer dans le monde et de grandir toujours, de se renouveler toujours. Nous partirons de ce constat pour situer le rôle symbolique de l’île qu’on dira être au continent ce que le fripon est aux dieux qu’il nargue et désarçonne, aux hommes les héros espiègles et narquois que sont Maïtre Renart, Till l’espiègle, Loki, Puck et tant d’autres, aux femmes Lilith (la première femme d’Adam) , Ishtar (la dame provocatrice de Babylone)...
Dans l’Odyssée combien d’îles pour combien d’aventures différentes pour le rusé Ulysse ? L'effet île concentre dans l'Odyssée les représentations du désir amoureux, mais aussi de l'abandon et de la solitude et surtout, l'aimantation indéfectible de l'île ... L'île, surtout lointaine et inconnue, nourrit un rêve dont elle est le miroir, une sorte d'Eden qui associe la symbolique de l'île à une philosophie de l'ailleurs. L’île est l’autre, l’ailleurs. L’île stimule l’imaginaire, c’est le lieu ultime de soi l’island en anglais : le I, land dit la psychanalyste Martine Estrade. L’inquiétante étrangeté de soi ?
Christian Gatard, entrepreneur dans le domaine des sciences humaines, il a publié une dizaine de livres, romans, récits et essais dont Nos 20 prochaines années, le futur décrypté, Mythologies du Futur, Chroniques de l’intimité connectée... Il est traducteur d’ouvrages de psychanalyse. Il publie régulièrement des articles liés à l’innovation sociale et culturelle et intervient dans différentes écoles et institutions (EHESS, CELSA, Sciences PO, ESCE...). Il dirige la collection « géographie du futur » aux éditions de l’Archipel. Il est le fondateur de christiangatard&co, Institut d’études internationales de marchés. Il propose une approche de la prospective entre le culturel (prendre de l’avance sur l’avenir, s’y préparer) et le légendaire (comprendre les rouages profonds de l’histoire des hommes, interroger les mythes, émouvoir, repérer notre place dans la longue durée).
Ses études de littérature anglaise et de sociologie s’enrichissent dès le départ d’expériences diverses. L’année 1969 est consacrée à Steve McQueen qu’il accompagne en tant qu’interprète sur un film. En 1971, lecteur de français en Corée du Sud, il rentre en délicatesse avec l’Ambassadeur de France après un dîner où leurs conceptions de l’ésotérisme élisabéthain ne concordent pas. De retour en France il traduit des essais de psychanalyse qui paraissent chez Calmann Levy. Il crée bientôt avec quelques amis, en parallèle avec son Institut, dans un loft sur le Canal St Martin, « Au Lieu d’Images » un garage à musiques, théâtres et arts plastiques. Il monte des installations sur l’imaginaire des objets aratoires, puis sur les bêtes à cornes.
Profitant de nombreuses missions d’études en Asie, Christian Gatard visite Bornéo à de nombreuses reprises, de 1980 à 1995. Il invente la réactique transculturelle, une confrontation des objets de la consommation occidentale avec les tribus primitives de Bornéo. Il raconte ces aventures dans Bureau d’Etudes, récit autobiographique, paru en 2008, aux Impressions Nouvelles.
En 1999 il publie L’Ile du Serpent-Coq, un roman également inspiré de ses périples au Sarawak et au Kalimantan. De Conchita Watson le ciel était sans nouvelles parait en 2001, et en 2003, En respectant le chemin des Dragons. Ces trois romans se réfèrent au réalisme fantastique. Le Peuple des Têtes Coupées, un essai sur les mascarons, paraît en 2005 chez Coprah et Nos 20 prochaines années, essai de prospective buissonnière, est publié en 2009 chez Archipel. En 2010 il contribue au Dictionnaire de la Mort chez Larousse et Jean Daniel Belfond, fondateur des Editions l’Archipel, lui confie la collection Géographie du Futur. En 2012, il participe aux livres collectifs Manuel Social Media Marketing, Comprendre les Réseaux Sociaux ! et Clés de la Mutation. Mythologies du Futur, nouvel essai de prospective, est publié en 2014. Rupture vous avez disrupture (2015) et Chroniques de l’Intimité connectée (2016), deux essais collectifs du think tank Les Mardis du Luxembourg sont publiés aux éditions Kawa.
Les fictions littéraires considérées comme des îles...
Lorenzo Soccavo
Prospectiviste, Institut Charles Cros (Création Formation Recherche), Paris
Cette réflexion prend la forme d'éclats, une succession de courts paragraphes à considérer comme autant d’îlots formant un archipel et donc ayant, au-delà des apparences, une certaine unité, laquelle unité pouvant être annonciatrice d'un isthme, une langue de terre qui s'avancerait dans l'océan du langage comme la presqu’île d'un vaste continent inexploré qui serait celui de la fiction littéraire. Des kabbalistes considèrent le monde comme étant un phénomène linguistique. Marcel Proust lui-même n'est-il pas chaman lorsqu'il écrit dans Le temps retrouvé, ultime étape de son intime
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galaxie A la recherche du temps perdu : « Ce que nous appelons la réalité est un certain rapport entre ces sensations et ces souvenirs qui nous entourent simultanément », avouant avoir créé son œuvre : « comme un monde, sans laisser de côté ces mystères qui n’ont probablement leur explication que dans d’autres mondes et dont le pressentiment est ce qui nous émeut le plus dans la vie et dans l’art. » ?
Lectrices et lecteurs sont par nature des insulaires, mais ce sont aussi des navigateurs, pris par le texte, tantôt poussés au large, tantôt rejetés vers le rivage. (L'imaginaire des îles s'harmonise bien, me semble-t-il, à ce mouvement qui se saisit du lecteur de fictions ballotté entre le monde du texte qu'il lit, et, le contexte du monde dans lequel il lit, comme entre le monde et la langue maternelle qui structure le monde, et s'éclairerait des explorations psychanalytiques de Marie Bonaparte sur Edgar Allan Poe – je pense notamment à l'île aux abîmes et aux "gouffres alphabétiques" –, et des travaux de Bachelard sur L'eau et les rêves.) Ce balancement exprime subtilement le débat qui se croit contemporain sur l'attention et la distraction. En 1905 Proust l'aborde dans un texte qui n'était qu'une préface et est connu sous le titre Sur la lecture dont l'incipit a traversé le temps : « Il n’y a peut-être pas de jours de notre enfance que nous ayons si pleinement vécus que ceux que nous avons cru laisser sans les vivre, ceux que nous avons passés avec un livre préféré. ». Aux fondements de la lecture littéraire niche une ambiguïté entre le contexte et le texte. Le lecteur est dans cet entre-deux, comme entre deux îles, il lit entre texte et contexte et se retrouve ainsi dans un inter-dit et ce que j'appellerais un outre- autre : un au-delà qui est autre, cet inconnu vers lequel il est attiré comme un navigateur l'est par des îles.
Considérer les îles comme des textes et le langage comme un océan, considérer lectrices et lecteurs comme des insulaires navigateurs n'est-ce pas approcher une vérité de l'être qui serait lettre, créature anthropoglyphe : une lettre qui aurait une forme animale humaine ? Qu'écriraient alors nos navigations ? Passer de la figure du fictionaute, que je définis comme la densification de la part de soi qu'un lecteur de fictions littéraires projette dans ce qu'il lit, à celle du navigateur, c'est passer d'Ulysse navigateur à Ulysse voyageur interstellaire. En 1981 une série télévisée d'animation franco-japonaise avec Ulysse 31 au... 31e siècle, proposait cette lecture.
Pour les îles les frontières sont ailleurs, dans les eaux territoriales, aux confins des réalités et de l'imaginaire. Dans une perspective mythanalytique les îles et les voyages d'une île à une autre dessinent une graphie qui pourrait être la transcription d'une méthode de lecture en écho à la double métaphore bien connue du monde comme livre et du livre comme monde, qui deviendrait ainsi l'île comme livre et le livre comme île. Nos références bibliographiques sont ici l'Odyssée d'Homère, Mardi de Herman Melville, Les aventures d'Arthur Gordon Pym d'Edgar Allan Poe, Flatland de Edwin A. Abbott. Chaque île, comme chaque livre, offre une lecture de soi et est remise en question de son identité narrative.
Lorenzo Soccavo: Membre de l’Institut Charles Cros (Paris) et chercheur associé au programme de recherche Éthiques et Mythes de la Création, Lorenzo Soccavo est chercheur indépendant en prospective du livre et de la lecture. Membre de la Société internationale de mythanalyse (Montréal) il est collaborateur scientifique de la revue internationale en sciences humaines et sociales M@gm@ (Catania). Auteur de plusieurs ouvrages dont Gutenberg 2.0, le futur du livre (2007), il est le concepteur de la prospective appliquée au livre et à la lecture et intervient comme conseil en innovation, mais aussi conférencier et enseignant. Son projet Bibliosphère est membre du Collectif i3Dim (incubateur 3D immersive) et plusieurs de ses prototypes de médiation numérique sont développés sur la plateforme web 3D immersive EVER (Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'université de Strasbourg. Depuis deux ans ses travaux s'orientent vers la recherche des conditions nécessaires au déclenchement d'un processus d'autonomisation des lectrices et des lecteurs de fictions littéraires.
L'insularité dans la littérature entre stéréotypes et transformation des identités culturelles Rosalba Perrotta
Écrivaine, Professeur ordinaire, Faculté de Sciences Politiques, Université de Catane
L'île au trésor, l'île qui n'existe pas, l'île de Robinson Crusoé, Utopie, l'île idéale de Thomas More, l'île idyllique de Paul et Virginie ... Notre imagination est nourrie par des mondes entourés par la mer: des îles inventées et de véritables îles. L'Angleterre de Jane Austen, des soeurs Brönte, d'Agatha Christie: des tasses de thé, des landes, des bastides, des fantômes, des bibliothèques en bois de chêne. L'Irlande verte enfermée dans son catholicisme bigot, le Japon de Mishima et le Japon, inspiré par les mangas, de Banana Yoshimoto. La Sardaigne rude et ancestrale de la Deledda, de Gavino Ledda, de Fois, de la Murgia: Roseaux au vent, Padre Padrone, l’éducation d’un berger sarde, In Sardegna non c’è il mare, Accabadora. Parmi les îles racontées, la Sicile occupe une place privilégiée. Le monde l’a vue à travers Verga, Pirandello, De Roberto, Brancati, Tomasi di Lampedusa, Sciascia ... Et, plus récemment, Camilleri avec son commissaire Montalbano, Simonetta Agnello Hornby, et une floraison de nouveaux écrivains.
La Sicile des romans, des films et des séries télévisées, cependant, est souvent stéréotypée: des histoires de Cumpari Turiddu et Donna Lola, de mafia et de Guépards, de machisme provincial, de passions incontrôlables et de victimes de meurtre. Figues de barbarie, soleil et mer bleue. La postmodernité est déconcertante, et conduit à rechercher la sécurité
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dans la récupération des racines, elle nous pousse à nous réfugier dans la célébration du passé dont on a entendu parler. Nous assistons donc ainsi à l'affirmation de romans où le dialecte a une forte présence et d’histoires qui reproduisent de vieux clichés: l'industrie de l'édition tente d'attirer le lecteur en lui suggérant des images rassurantes parce qu'ils les connaissent déjà, des réalités aux contours nets, faciles à décoder. L'île fascine et vend. Les auteurs ressentent donc une volonté, parfois clairement explicitée par les éditeurs, de proposer un produit «typique»: le dialecte, les plats traditionnels, les panoramas de cartes postales. Et les personnages qui ont la fixité des masques: comme si l'insularité était une maladie endémique ou une marque de fabrique indélébile.
La marque « Sicile » dans certains cas, est déjà clairement annoncée dans le titre: par le dialecte (La criata Antonia, La mennulara, Panza e prisenza), par la référence aux desserts traditionnels (Il conto delle minne, La pupa di zucchero) ou par les anciennes villas de l'île (Le stanze dello scirocco), ou, aussi, en insérant des noms de villes: (Bagheria, L’ultimo treno da Catania). Et sur les couvertures alors: la mer, le soleil, les citrons, les oranges, les figues de Barbarie, les palais baroques. Dans le blog Sognando leggendo, on peut lire dans le commentaire d’un roman: «il réussit avec son style à recréer les sensations et les parfums du sud de l'Italie, dans la tradition des grands succès qui se déroulent en Sicile»; et, à propos du même livre, la blogueuse Libridinosa commente: «il aurait pu avoir l'odeur des citrons siciliens (...) il se réduit à une cassata avec peu de sucre et de la ricotta aigre». Parfums du Sud, citrons, cassata ... voilà quels sont les attentes et les paramètres. En tant qu '«écrivaine sicilienne», je ressens la pression du marché mais, en tant que sociologue, je considère les clichés comme des narcotiques pour l'esprit et comme des sources de préjugés. Dans la Sicile que je connais ce n'est pas toujours l'été, les passions extrêmes ne font pas rage, et toutes les femmes ne sont pas brunes et n’ont pas des yeux de braise. Les fusils couvrent des contextes bien définis, et les sceccarelli (ânes) et les figues de barbarie ne sont pas aussi répandus qu’on le croit. Dans l'île dont j'ai l'expérience, ce ne sont pas les héritages ancestraux qui dominent: la tradition et l'innovation coexistent, s'opposent et se fusionnent souvent.
Alors quoi? Alors j’essaie de satisfaire les attentes du lecteur qui veut "la Sicile" en observant et en réfléchissant sur ce qui est effectivement en moi et autour de moi. Je mets donc l'été et le soleil dans mes romans, mais aussi l'hiver et les tempêtes: L’uroboro di corallo commence, l'avant-veille de Noël, justement après un après-midi de pluie et de rafales de vent. Parmi les aliments, en plus des pâtes alla Norma, de la cassata et des cannolis, j’introduis le bouillon de cappelletti, le bavarois, la chicorée rouge de Trévise; et je présente aussi de nouveaux plats, fruits de la créativité et de l'expérimentation. Le dialecte apparaît seulement de temps en temps, et généralement dans des formes italianisées, comme cela arrive maintenant.
J'essaie de proposer des personnages variés et complexes, dans lesquels des éléments anciens et nouveaux entrent en collision, se rencontrent et se mélangent. Dans All’ombra dei fiori di jacaranda, estropiée et orpheline, la sicilienne Arabella se construit une vie à sa taille: elle cultive son esprit, elle étudie, elle voyage, elle donne naissance à un enfant sans être mariée ... Dans L’uroboro di corallo, Anastasia, qui a plus de soixante-dix ans, est née et a été élevée sur l'île, déprimée par l'abandon de son mari, apprend enfin l'art de la désobéissance (il n'est jamais trop tard!) et s’invente lentement une nouvelle vie. En racontant des histoires siciliennes, je voudrais pousser le lecteur à réfléchir, à se méfier des stéréotypes et à élargir sa vision. Le devoir de la bonne littérature et des sciences sociales, je crois, est d'aiguiser le regard, de s'opposer aux clichés et de combattre les préjugés.
L'île des Sanguinaires : territoires de l'imaginaire au cinéma et vertiges de soi
Yannick Lebtahi
Maître de conférences habilitée à diriger des recherches en Science de l'information et de la communication, Université de Lille, GERIICO
L’imaginaire puissant du passage de l’an 2000 – symbolisant le changement de millénaire – fut le prétexte à la création cinématographique. Dix films réalisés dans dix pays différents ont été produits dans le cadre de la collection internationale intitulée « 2000 vu par » proposée par La Sept ARTE sous la direction de Pierre Chevalier en 1998. Pour la France, le cinéaste Laurent Cantet a réalisé le moyen métrage Les sanguinaires. L’analyse filmique de ce récit fictionnel explore la quête existentielle d’un homme marqué par un insaisissable spleen : François, le personnage central, s’exile avec sa famille et quelques amis sur l’île des Sanguinaires au large d’Ajaccio, une manière plus spécialement pour lui de refuser les marques du temps.
Aliéné par de nombreux mythes comme celui de "se mettre au vert" ou celui du rejet du confort technologique, François en porteur d’utopies cherche à s’exclure du monde en effervescence à l’approche de la nuit du 31 décembre et ainsi à échapper aux célébrations de l’an 2000. Nous verrons alors comment, dans un environnement énigmatique et surréaliste cette forme d’aliénation le conduira à s’exclure de soi. Et, comment cette idée de la claustration sur l’île, où le temps est suspendu, renvoie à l’espace métaphorique de la condition humaine. Les partis pris du réalisateur détournent la prévisibilité du réveillon du Nouvel An pour laisser place, de manière imprévue, au naufrage des certitudes de François. En effet, nous verrons que c’est à la frontière entre le trouble identitaire et la lucidité des personnages que la liberté
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vertigineuse se révèle, et cela jusqu’au mythe de l’effacement total de l’individualité.
Au passé riche et chargé de mystère, l’île des Sanguinaires devient le point culminant du vertige et pose le lien au réel.
Territoire d’un imaginaire sublimé, l’île est traitée comme un personnage à part entière, elle fait corps en quelque sorte et s’apparente du point de vue mythologique à un espace où se confronte – entre l’intime et le collectif – les désirs.
Yannick Lebtahi est maître de conférences HDR en Sciences de l’Information et de la Communication à l’université de Lille3. Sémiologue, analyste des médias, mais aussi réalisatrice de documentaires, ses travaux portent principalement sur l’histoire et la théorie de la télévision régionale ainsi que sur l’image et ses enjeux contemporains.
Membre du laboratoire GERIICO Lille3 (Groupe d’Études de Recherches Interdisciplinaires en Information et Communication) et membre associé du CEISME Paris3 (Centre d’Étude sur les Images et les Sons Médiatiques). Elle est directrice scientifique et éditoriale du CIRCAV (Cahiers Interdisciplinaires de la Recherche en Communication AudioVisuelle) et directrice de la collection DeVisu aux éditions L’Harmattan.
Clinique psychanalytique de l'insularité entre confinement et ouverture à l'altérité
Giovanni Lo Castro
Chercheur en Psychologie clinique, Département de Sciences de la Formation, Université de Catane
Le parlêtre est inextricablement lié à son Autre. Pouvoir s'en passer est l’un des mythes de la contemporanéité, dont la fonction est de réduire le poids de l'angoisse qui dérive de la dépendance à l'Autre. C'est une souffrance omniprésente, à laquelle il est impossible d'échapper et qui produit, conscients de l'odi et amo de Catulle, le hainamour (hainamoration) dont Jacques Lacan nous a fait saisir la subtile logique. Chaque être humain vit l'expérience de vivre sur une île: lui-même, qui lui est en grande partie inconnu et dont l'existence lui est renvoyée à travers le miroir de l'autre. Il est structurellement une île, même si "aucun homme n'est une île". La contingence de vivre sur une île peut faire en sorte que la relation avec l'altérité prenne la forme d'une rencontre avec le Réel.
Giovanni Lo Castro: psychologue clinicien, psychanalyste, membre du SLP et de l'AMP, il est agrégé de Psychologie Clinique à l'Université de Catane. Il enseigne dans des cours de Maîtrise en Psychologie, en Sciences et techniques psychologiques et en Médecine et Chirurgie, ainsi que dans de nombreuses Ecoles de spécialisation universitaires, notamment en Psychiatrie et en Neurologie. Il dirige la Clinique de Psychologie Clinique et de Psychodiagnostique du Polyclinique de l'Université de Catane et il est Président de l'Institut Supérieur d'Etudes Freudiennes Jacques Lacan, Ecole de Spécialisation en Psychothérapie, reconnue par le MIUR. Il a publié des articles dans des revues et des chapitres dans des volumes, et a tenu des discours lors de conférences nationales et internationales. Ses principaux domaines de recherche sont: les changements de la fonction paternelle, les problèmes inhérents à la sexualisation et à l'utilisation du corps, et leurs relations avec les changements sociaux.
Mythanalyse d'une insularité (in)-consciente
Vito Antonio D'Armento
Maître de conférences de Sociologie de la déviance, Sociologie de la marginalité et de la déviance, Faculté de Sciences de la Formation, Sciences Politiques et Sociales, Université du Salento, directeur du Centre d'Études Qualitative Approach Ethnography (AQuE) UniSalento
L'insularité in-consciente (non consciente) peut être prise comme métaphore pour une connotation spécifique des probables hominidés in-cultes de la préhistoire - expressions de cet âge des géants muets que Vico imaginait « forcés » à communiquer avec des « signes » et que l'éthologie n’a libérés que récemment de la sécheresse initiale des sons gutturaux pour leur donner une explosion linguistique décisive qui les a émancipés et spiritualisés en même temps. Un processus qui ne s'est pas limité à la réalisation d'une "hominisation" générique, pour orienter leurs pairs vers leur propre individuation afin que chacun puisse prendre conscience du surplus d'énergie collective qui permet aux groupes de se représenter (dans) une socialité consciemment critique puisque partagée par les individus. La prise de conscience progressive d'une réalité aussi complexe (qui, bien qu’externe, est encore tissée par l'énergie interne des membres individuels qui «établissent» le social au fur et à mesure qu’ils interagissent dans la socialité) permet à l'acteur individuel d'acquérir la conscience des deux niveaux dans lesquels verse la connaissance: d'une part, celle de l’auto-conscience dans laquelle se conforme la psyché - et de l'autre, la conscience de la forme émancipée de la psyché dans l'intelligence. En ce sens, en faisant un raisonnement métaphorique, la conscience individuelle peut être considérée comme insularité (subjectivité absolue et intime), même si, au delà de la prise de conscience, il faut être conscient du fait qu’elle partage les mêmes connaissances conscientes (angoisses, agitations, frayeurs, peurs, inquiétudes, pulsions, occurrences, besoins ...). Un tel kaléidoscope d'implications logiques et émotionnelles, subjectives et collectives, est nécessairement structuré sur
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les deux fronts de la pure subjectivité comme de la pure socialité - et surtout il exige qu’on ne donne pas de distinctions incompatibles d'une structuration à l'autre. Une prémisse nécessaire – celle-ci! – pour saisir la seule source des deux formes de la conscience et de la connaissance: dire que la conscience subjective est constituée par le même «verbe» qui élabore la connaissance collective.
Vito A. D’Armento: professeur d’Ethnographie (Unisalento), il dirige le “Centre d’Etudes AquE” – Qualitative Approach in Ethnography; il a été visiting professor auprès des Universités de La Havane (Cuba), de Valence (Espagne), de Bucarest et Timisoara (Roumanie), de Paris 8 et Rennes 2 (France), de Tirana (Albanie), de Madère (Portugal). Avec Patrick Boumard, Ferdinando Sabiron Sierra et alii. il a fondé la Société Européenne d’Ethnographie de l’éducation (SEEE-Madeira), dont il a été le vice-président et il est co-fondateur et Secrétaire Général de la Société Internationale d’Ethnographie (SIE-Paris). Il a fondé différentes collections éditoriales, dont: “micro-macro” avec Georges Lapassade et Patrick Boumard; écologiquesavec Rémi Hess et Christoph Wulf. Il est consultant scientifique de la Eurolink Fundation de Bucarest. Parmi ses publications, on signale: L’etnografia storica (2008); Lingua e Naturaleza: orquestracao em tres movimentos (2008); Analisi istituzionale (2009: avec Remi Hess et Georges Lapassade); Institution démocratique de la science ethnographique (2010); Tragedia della pedagogia (2012); Ri-scritture : tecnica ed espressione (2014); La recherche en éducation. Pluralité et complexité (2015); Etnografie del dissenso (2017: avec Patrick Boumard et al.).
Insularité : éthique d'une cognition synesthésique
Bernard Troude
Chercheur, Société Française et Francophone d'Éthique Médicale (SFFEM), Académie Internationale d’Éthique en Médecine et Politiques Publiques (IAMEPH)
En quelques mots, voilà un poème chanté qui répond à toutes nos questions. Questions qui font barrage à toute envie de s’évader malgré les horizons géographiques, malgré les distances et les contradictions amoureuses, malgré des déterminations d’appartenance à un être et un territoire fermé. Questions qui ouvrent une possibilité de résonnance avec une vie espérée. Il s’agit bien d’une éthique d’être dans l’île, pour l’île et d’être soi-même une île : comprenant l’idée d’insularité dans sa complexité singulière, corrélative à une sophistication de la parole et à la faculté plastique du cerveau. Pour l’île, comme pour d’autres sujets/objets, l’opposition géographique fondamentale est peut-être celle de la surface et de la profondeur ; sans confusion entre profondeur et bassesse.
Être insulaire par nature et de naissance expose les limites synesthésiques bornées à la périphérie de l’île, aux horizons perçus depuis les côtes ou le point le plus haut. Une personne « continentale » intègre l’idée d’île mais ne prend jamais l’option d’une géographie se limitant à la périphérie de l’île : l’insularité attribue une primauté à l‘ensemble de l’île sans concevoir une historicité continentale. Ma perception scientifique dans ces discours/images lève un pôle de recherches, une mise en perspective s’opposant au Monde par un savoir psychologique. Mon but dégagera les questions sur la synesthésie et la plasticité neuronale des insulaires avec les réponses des géographes ou sociologues ou le psychothérapeute.
Le discours analysera l’insularité en s’attachant aux structures argumentatives de la complexité des enjeux, révèlera la cohérence des influences transcontinentales et insulaires. L’insularité est cette part aveugle en nos cognitions qui maîtrise tout, tout le monde sur une terre entre ciel et eau.
Bernard Troude: Ingénieur généraliste, Ingénieur Designer, Photographe, Dr. en Sciences de l'art et philosophie (Panthéon Paris 1), Chercheur en sciences de fin de vie, Chercheur en plasticité du cerveau, Sociologue, Correspondant chercheur de l'Académie Internationale d'Éthique Médicale. (AIEM), Chercheur Société Française et Francophone d'Ethique Médicale (Sffem), Correspondant / Chercheur Académie Internationale Ethique, Médecine et Politiques Publiques (IAMEPH), Correspondant / Chercheur Laboratoire Health & Palliative Care / New York et Normal (Chicago), Chercheur associé laboratoire plasticité du cerveau Plastir.
Vers une notion complexe d'insularité : la rencontre de la mer et de la terre dans la nouvelle de Colapesce Antonino Arrigo
Chercheur et maître de conférences en Critique littéraire et littérature comparée, Université Kore d'Enna
La mythologie de l’insularité trouve un de ses mythes fondateurs dans la légende de Colapesce, ré-élaborée par Italo Calvino et traitée par Benedetto Croce, derrière lequel ne peut que s’annoncer le thème par excellence du « divin enfant ». Depuis Dionysus et Œdipe, en passant par Jésus, jusqu’aux plus modernes « réécritures » et ré-actualisations littéraires, le thème de l’enfant est peut-être l'un des plus fertiles dans la littérature de tous les temps et de toutes les latitudes. La métamorphose de l'enfant en poisson semble renvoyer, encore une fois, à la figure mythologique de Protée, «un “vieux de
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la mer” aux vertus prophétiques», dont la capacité à prendre différentes formes peut évoquer – dans une optique métanarrative - les capacités métamorphiques du Mythe et du Langage. Comme preuve de son caractère immanent, l’archétype semble nous prouver que l’être «divin est une révélation de l’Être tout-puissant, qui vit en chacun de nous» (J. Campbell), manifestation de la puissance désirante de notre inconscient.
L'enfance miraculeuse, «par laquelle l'on voit qu'une manifestation spéciale du principe divin immanent s’est incarnée dans le monde » (J. Campbell) semble embrasser dans un seul contenant aussi bien le sublime de la Bible que l’«obscène», le «vulgaire» , le monstrum de la littérature de masse. C’est ainsi que les caractéristiques prodigieuses de l'enfant Cola rappellent celles de Jésus protagoniste des Évangiles et - en pleine modernité – celles de l'orphelin héros du mythe de Superman (U. Eco). En effet, le célèbre protagoniste de la bande dessinée est lui aussi orphelin. Comme le remarque Umberto Eco, Superman est une «image symbolique d'un intérêt particulier. Le héros doté de pouvoirs supérieurs à ceux du commun des mortels est une constante dans l’imaginaire populaire, de Hercule à Siegfried, d’Orlando à Pantagruel jusqu'à Peter Pan». Mais pas seulement de l’imaginaire populaire. L'imagination ne possède pas, en fait, deux compartiments étanches, un high brow et l'autre low brow, elle est beaucoup plus « démocratique » que nous ne pouvons l’imaginer. Dans le mythe de Cola Pesce est donc actif également le travail de l’'archétype, le travail de l'imagination qui trouve ses racines dans les profondeurs de l'inconscient.
Dans une sorte de manifeste pour une pensée méditerranéenne, Franco Cassano devient le porte-parole d'une reprise de nos racines grecques. Racines qui se configurent donc comme une absence de racines, qui prennent pied dans un lieu limbesque comme les côtes. Une pensée méditerranéenne domine la mer et n'a pas peur de son devenir et de ses tempêtes. Non pas le rejet de la mer, mais la rencontre de la mer et de la terre, voilà ce dont notre société a besoin selon le sociologue Cassano. La rencontre de la mer (Mito) et de la terre (Logos) devient donc la stratégie qui nous conduit vers une vision complexe de la dynamique du monde où nous vivons. La société post moderne et globalisée. Faite, aujourd'hui comme il y a deux mille ans, par la raison et par son double: les passions (R. Bodei). A la différence que la société d'aujourd'hui doit retrouver une pensée obscurcie par des siècles de rationalité scientifique, analytique et réductionniste. Offusquée, paradoxalement, par ses “lumières” et par son déterminisme qui s'est nourri depuis longtemps de cette même rationalité scientifique.
À l’abri de l’«Ou bien...ou bien...» classique entre le vrai et le faux, Edgar Morin invente une pensée complexe qui exalte les contradictions, en favorisant le dialogue. Une pensée complexe et méditerranéenne a grandi à l'ombre de son «marranisme», de sa foi sceptique et de son doute en tant que croyant. La pensée Méditerranéenne de Morin contient donc aussi une critique et un dépassement des Lumières. En effet, la raison même peut devenir un dogme, une divinité et un fétiche. Alors que la religion et les mythes, au contraire, protégés par les dogmes, ne font que rendre la raison complexe, en dialogant avec la partie demens de l'Homo Sapiens. La partie même qui a donné vie à la poésie, à la littérature, à la sphère ludique et à la sphère esthétique. Une pensée complexe est fondée, par conséquent, sur la complémentarité entre Mithos et Logos. Les mythes et les contes nous le rappellent.
Antonino Arrigo est titulaire d'un doctorat en «Etudes Anglaises et Anglo-américaines» ainsi qu’en «Méthodologies de la Philosophie». Depuis des années, il mène des recherches sur le mythe, en relation avec la littérature, l'art et ses permanences dans la société post moderne. Depuis 2014, il est chercheur à la Faculté de Littératures Comparées de l'Université d'Enna «Kore». Parmi ses volumes nous mentionnons: René Girard. Cristianesimo, etica, complessità nella società globalizzata (2014), La balena nelle Langhe. Mito ed ermeneutica nell’opera di Herman Melville e Cesare Pavese (2017), Il ritorno del mito (2018); il a publié de nombreux essais et collabore avec les magazines: «Sinestesie on-line», «Letteratura & Società», «Complessità» e «Rivista di Studi Italiani», dont il est membre du comité scientifique.
L’expression de la dualité à travers la métaphore de l’île dans Mercure et Biographie de la faim d’Amélie Nothomb Souâd Benali-Mazouni
Maître de conférences, enseignante, chercheure, Faculté des langues étrangères Université d’Alger 2
L’objectif de cette communication est de montrer que le texte d’Amélie Nothomb affiche une signifiance contradictoire entre son apparence et son sens profond. La comparaison déjà de deux figures prises dans l’œuvre romanesque de cette auteure (Mercure 1998 et Biographie de la faim 2004) en donne un exemple éloquent. En effet, la mer et l’île semblent s’opposer sur bien des points de leur apparence (fermeture / ouverture, terre / eau, rétréci / étendu, plat / profond, etc.). En réalité, elles cumulent encore plus de ressemblances dans leurs traits sémantiques.
Les deux figures « l’île » et « la mer » regroupent des traits de différence apparente et renferment des traits de similitude et de complémentarité dans leur structure symbolique et profonde d’où la dualité abordée dans ce travail. Les deux figures représentent à la fois : l’ici et l’ailleurs, la spiritualité et la matérialité, l’étrange et le familier, l’errance et la sédentarité, le refoulé et le défoulé, le Même et l’Autre, la mouvance et la pause.
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Nous tenterons d’aborder la question de l’insularité par rapport à la conception bachelardienne de l’eau et de la mer. Nous opterons pour une approche géocritique par laquelle nous étudierons le lieu de l’île (Mortes-frontières dans Mercure) et de l’archipel (Le Vanuatu ou les Nouvelles Hébrides dans Biographie de la faim) par rapport à l’espace maritime qui contient l’île. Nous aborderons l’impact de ces deux romans sur les représentations courantes des lieux qu’ils décrivent. Une analyse, une approche mythocritique s’impose, elle propose une lecture symbolique de la dualité qui elle, fonctionne doublement dans la contrainte et l’opposition mais surtout dans la complémentarité.
Identité sociologique et mythe de l'appartenance : usage (ou abus) viral, politique et religieux de la question des migrants
Francesco Paolo Pinello
Maître de conférences de Sociologie générale, Université Kore d'Enna
Le mythe de Narcisse et Echo. L'identité extrême qui ne veut et ne peut connaître l'altérité, le différent de soi-même (Narcisse), et l'altérité extrême qui ne veut et ne peut connaître l'identité (Echo). Il s'agit de deux extrêmes de l'absolu. De deux points de représentation métaphorique et mythique d'une seule droite conceptuelle polarisée, utile précisément parce que polarisée et absolutisable dans ses deux extrêmes (scindés de l’intérieur), mais pas absolutisable dans les différents points qui séparent un extrême de l'autre, et qui se situent entre l'un et l'autre. Narcisse, qui rejette Echo qui est amoureuse de lui, interagit uniquement avec lui-même et il le fait pour se protéger, pour se sentir plus sûr, de plus en plus sûr. Il se renferme en lui-même, il s'isole. Dans l’identité isolée dans laquelle il vit en se regardant en elle, il construit des relations, même profondes, avec ce qu’il prend comme différent de lui-même, s’ouvrant paradoxalement à cet autre que lui-même, en faisant confiance et en s’abandonnant totalement à cet autre que lui-même, qui n’est rien sinon sa propre identité, sa propre fermeture, son propre isolement. En lui, toute relation sociale, peu à peu, implose, se déstructure, s’annule, perd sa fonction sociale, devient un simple pouvoir absurde et anéantissant, elle devient paradoxalement une relation sociale autodestructrice dans la construction et dans l'affirmation de l'identité même de Narcisse, tant en surface qu’en profondeur.
En devenant son identité même, dans sa construction si conflictuelle et paradoxale, tant en surface qu’en profondeur, Narcisse devient cognitivement déviant et, en même temps, en construisant un double de lui-même (son image réfléchie), il cherche à faire valoir et à imposer son identité, en tendant vers l'absolu, en essayant de transformer la réalité qui l’entoure dans la vaine tentative de l’absolutiser, de la rendre absolument identique à lui-même. Echo, cependant, qui est amoureuse de Narcisse, à l’opposé, existe uniquement en fonction de la relation avec l'autre qu’elle-même. Elle est l'écho de l'autre, de Narcisse, elle ne peut pas vivre et exister indépendamment, elle ne peut que refléter l'autre par lui-même: Narcisse. Elle est condamnée (par des forces mystérieuses, mythiques, divines et humaines en même temps, vitales) à vivre de références, de retours, de réflexions, de fuites loin de tout type de fermeture, d'isolement, fermetures et isolements qui la font souffrir, qui la tarissent (faites donc attention au thème des forces mystérieuses, mythiques, divines et humaines en même temps, vitales, parce que, dans l'analyse du mythe de Narcisse et Echo que je propose ici, il revient dans la migration de Koré, précisément à travers le narcisse (fleur) qui fonctionne comme lien symbolique métamorphique, comme métamorphose symbolique des symboles migratoires). Echo est un écho de Narcisse et elle n’existe que comme écho de lui, sinon comme différent d’elle-même.
Rejetée par Narcisse, peinée et, peu à peu, tarie, elle devient une pierre dans un étang, dans un lac, elle devient une île dans un étang, dans le même plan d'eau, dans le même lac , dans lequel Narcisse va se refléter et reste fasciné par sa propre image réfléchie. Ce plan d'eau, ce lac, dans un autre mythe, le mythe de Koré, devient le lac de Pergusa en Sicile et l'image réfléchie de Narcisse devient l'ouverture pour la descente en enfer de Koré/Perséphone, de la pierre/Echo, à cause de son enlèvement/migration de l'amour. Koré/Perséphone, cette Koré/Perséphone qui, à la différence de Narcisse et avec des rôles inversés, tombe amoureuse d’Hadès et décide de passer avec lui, périodiquement, la moitié de l'année aux enfers. C’est cet enlèvement/migration d'amour de Koré, qui arrive alors que Koré est en train de ramasser des narcisses, c’est cette migration qui transforme l'insularité (le caillou dans l'étang, l'île, Echo tarie) en interaction sociale, en communication, en dialogue, en éloquence, qui fait tomber amoureux l'un/l’une de l'autre Koré/Narcisse et Hadès/Echo, à tel point que Koré/Perséphone, qui n’appartient complètement ni au monde des enfers, ni au printemps, décide de revenir chaque année, périodiquement, chez Hadès, dans le monde des enfers, pour vivre avec lui la période hivernale. C'est cet enlèvement par amour, c’est cette migration qui permet de mettre, à côté du narcisse, aussi l'épi de blé sous forme de symboles, tous les deux, de Déméter, qui permet donc la construction sociale de l'identité et des relations sociales ordonnées et charismatiques/créatives (l’épi).
Au début, entre Narcisse et Echo, il y a une rencontre, une interaction sociale s’établit, mais Narcisse rejette Echo, il ne la ravit pas et, au contraire Echo, amoureuse, est ravie par lui (faites attention au thème de l'enlèvement parce que, dans l’analyse du mythe de Narcisse et Echo que je propose ici, l’enlèvement revient dans la migration de Koré/Perséphone). Il s’agit d’une interaction sociale qui - tandis que Narcisse s'isole et se renferme dans sa propre identité et qu’Echo devient
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l’écho de Narcisse, se transfigurant au point de ne plus être dans la société, mais une pierre/île, ailleurs, dans un plan d'eau – elle se déstructure et s’annihile comme interaction sociale, parce qu’on ne peut pas donner d'interaction sociale, de relation sociale, de construction sociale d'identité, d’appartenance (plus ou moins mythique), sans reconnaissance réciproque, sans communication aussi bien superficielle que profonde, sans éloquence et sans engagement émotionnel, affectif, sans dialogue dans la reconnaissance réciproque et dans le respect réciproque des différentes identités de ceux qui dialoguent, des constructeurs d'interactions et de relations sociales, sans ravissements par amour, sans migrations, sans métamorphoses de symboles, sans eros et sans thanatos.
D'où les références entre le mythe de Narcisse et Echo, analysé à travers le mythe de Koré, et les thèmes de l'identité sociale et de la construction sociale et sociologique de l'identité, de l'appartenance (plus ou moins mythique). D'où aussi les références aux profils religieux de la question et à la possibilité d'un usage, ou d'un abus, viral (viralité des représentations), politico-social et religieux, de la question des migrations.
Francesco Paolo Pinello, maître de conférences de Sociologie générale, Juridique et de la Déviance à l’Université d’Enna “Kore”; membre de l'AIS, Association Italienne de Sociologie; membre du GRIS - Groupe de Recherche et d'Information Socio-religieuse; Président du Comité LIDU de Enna, Ligue des Droits de l'Homme Italienne (Fédération Internationale des Droits de l'Homme des Ligues régionales - AEDH, Association Européenne pour la Défense des Droits de l'Homme); membre du Comité Scientifique de la collection éditoriale “In-between spaces: le scritture migranti e la scrittura come migrazione”, Editions Sinestesie. Il a participé, en tant qu'orateur, à des conférences nationales et internationales. Parmi ses travaux: Profilo di una festa: il pane dei Burgisi e il Corteo di Cerere/Demetra, dans Kore, la ragazza ineffabile, Roberto Deidier, Essais de AA.VV., Donzelli Editore, 2018; Sociologia della massoneria. Lavoro massonico e progettualità sociale, Gruppo Editoriale Bonanno, 2017; Le migrazioni tra secolarizzazione, pluralismo religioso e identità cattolica. Un profilo socio-religioso, dans AA.VV., In-between spaces: percorsi interculturali e transdisciplinari della migrazione tra lingue, identità e memoria, Arrigo-Bonomo-Chircop, Editions Sinestesie, 2017.
L'isola della vedova di Tuxá: l'impatto sociale di una diga nel Brasile nord-orientale Leandro Durazzo
PhP Candidate, Università Federale de Rio Grande do Norte
Até 1988, o povo indígena Tuxá do nordeste brasileiro vivia entre a margem do rio São Francisco e suas ilhas fluviais. Conta a tradição – e assim ouvimos muitas vezes, pela boca dos mais velhos – que havia mais de trinta ilhas ocupadas por eles, nas quais trabalhavam a terra e trabalhavam sua ciência, isto é, praticavam seus rituais e mantinham constante comunicação com os Encantados, mestres cosmológicos junto aos quais prestam respeito e buscam orientação. Entretanto, durante a década de 1980 houve a implantação de uma barragem rio abaixo. A hidrelétrica de Itaparica inundou as ilhas naquele trecho, bem como cobriu completamente algumas cidades às margens do curso d'água, entre as quais estava a antiga Rodelas, onde os Tuxá desde há muito habitavam. Os Tuxá foram realocados para a nova cidade, junto dos outros moradores do município. A companhia hidrelétrica responsável pela obra, CHESF, vinculada ao governo federal brasileiro, traçou alguns projetos de reassentamento e indenização aos atingidos pela barragem. Muitas famílias de trabalhadores rurais não-indígenas tiveram sua parte nos reassentamentos, mas os Tuxá se viram desatendidos: por serem povo indígena, a terra devida a eles – pela antiga aldeia inundada, bem como pela Ilha da Viúva – deveria ser concedida como uma terra de usufruto coletivo, e não como um reassentamento padrão, nem como propriedades particulares. Pela especificidade do caso indígena, e certamente por uma falta de vontade política dos responsáveis, ainda hoje os Tuxá não possuem sua terra demarcada, vendo-se há trinta anos como índios sem terra na qual voltar a plantar e viver. Mas a Ilha da Viúva, hoje submersa, ainda se faz presente como um lugar de habitação da memória tuxá.
Dois elementos nos permitem compreender a importância da Ilha da Viúva para os Tuxá contemporâneos, sejam aqueles mais velhos, que viveram na ilha e passaram pela mudança, sejam os mais novos, que sequer viram o rio antes da barragem. Primeiramente, a memória contada e recontada pelos anciãos, e mesmo pelos Tuxá adultos, sempre toma a vida na ilha como referência. Afinal, era lá que viviam a maior parte da semana, trabalhando nas roças e dançando o toré, um ritual lúdico e fundamental para a socialidade do povo, em que se dança e canta ao som dos maracás, oferecendo preces aos companheiros, humanos e não-humanos, vivos e encantados. Era lá também que se faziam os trabalhos da ciência, ou seja, os rituais mais secretos e restritos aos indígenas, nos quais a presença de não-índios era vetada. Para os Tuxá, é impossível pensar na vida atual sem a remissão à memória da Ilha da Viúva. Por mais que não houvesse luxo e excesso, e as dificuldades econômicas certamente se fizessem presentes, a memória da ilha recorda de um cotidiano de fartura, trabalho e convívio coletivo pouco visto atualmente. As roças plantadas, as árvores frutíferas, os peixes fartamente pescados e os abundantes animais de caça contrastam com a vida atual, em que o rio represado já não corre nem carrega consigo tantos animais para caça e pesca, e as árvores já não oferecem tantos frutos. Realocados em uma nova aldeia contígua à cidade e, por isso mesmo, urbanizada, a vida dos Tuxá de Rodelas já não se pauta por uma
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convivialidade tão constante e central como antes. Se na Ilha da Viúva as roças eram trabalhadas por diversas pessoas, favorecendo a circulação de sujeitos entre as áreas de plantio, essa mesma circulação permitia que se compartilhassem mais momentos de comensalidade, por exemplo, pois a fartura do plantio e da pesca oportunizavam momentos de refeições conjuntas. Ainda que hoje a aldeia de Rodelas apresente certa convivialidade e comensalidade, sobretudo entre grupos familiares e casas focais, a memória da ilha realça uma representação cuja ênfase atesta, por si só, sua importância contrastiva.
Um segundo acontecimento diz respeito à entrada de muitos Tuxá em cursos formais de educação superior em diversas universidades brasileiras. O acesso à academia e a certos repertórios não-indígenas, como as ciências ocidentais e o campo do discurso acadêmico, permite aos Tuxá lutarem por suas terras e pelo reconhecimento de sua causa agora em outro âmbito, complementar àquele dos movimentos indígenas que historicamente se consolidam em torno das relações com o Estado. Os indígenas não apenas vão aos órgãos reguladores atrás de seus direitos e do reconhecimento das dívidas que ainda devem ser pagas: dentro das universidades, estudantes e pesquisadores tuxá começam a se fazer ouvir em espaços pouco ou nada acessados até os anos 1990. As áreas de abrangência dessa onda indígena na academia cobrem desde cursos mais pragmáticos para o atendimento à comunidade, como medicina e direito, até outros dedicados a refletir sobre os discursos e as representações sociais que se cristalizam sobre os povos indígenas, como ciências sociais e letras. Além de permitir a formação de professores, esse envolvimento dos Tuxá com áreas das ciências sociais e humanas os capacita para debater, nas arenas acadêmicas e sociais, com aqueles discursos hegemônicos e colonialistas que vêem os índios como representantes do passado ou sujeitos sem agência nem direitos, nada mais distante da realidade. Assim como nenhum homem é uma ilha, nenhum povo indígena se encontra ilhado em um passado mítico, e nenhuma ilha produtiva é deixada para trás apenas por ser atingida por um “grande empreendimento” estatal e desenvolvimentista: os jovens tuxá que hoje adentram o mundo acadêmico o fazem com a memória da Ilha da Viúva muito viva em suas mentes, e remam contra a maré de descaso político em busca de um futuro em que terão novamente as possibilidades de viver na terra e da terra, como o fizeram seus antepassados nas ilhas do rio São Francisco.
Leandro Durazzo, antropólogo, trabalha junto ao povo Tuxá de Rodelas, Bahia, para sua tese doutoral no Programa de Pós-Graduação em Antropologia Social da UFRN, Brasil. É bolsista CAPES.
La mythanalyse comme instrument d'empowerment et de rédemption de la marginalité Salvatore Squillaci
Sociologue, chargé de cours de Démo-ethno-anthropologie à l'Université de Catane
La proposition vise à optimiser, d’une façon dynamique, fonctionnelle et innovante, des contenus, des valeurs et des perspectives cognitives de la mythanalyse intégrables avec les finalités des modernes processus socio-éducatifs, formatifs et réhabilitatifs qui caractérisent la Mission des différentes institutions, publiques ou privées, qui sont particulièrement impliquées dans les parcours de conception et de mise en œuvre de projets visant au rétablissement et à la réinsertion sociale de catégories particulières de jeunes, souvent stigmatisées comme déviantes, criminelles, ou trop marginales et fragiles, et donc à jamais irrécupérables. Dans l'imaginaire collectif, des facteurs tels que: le niveau élevé de problèmes de comportement, la marginalité de disvaleur, la complexité sub-culturelle recouverte par les « groupes différentiels » exclurait la capacité d'obtenir des résultats optimaux dans le traitement de réhabilitation à travers des parcours spéciaux et des actions de ré-éducation/formation pro-sociale sur le terrain.
Par conséquent, le potentiel théorique et pratique de la mythanalyse comme expression d'une approche éducative, intégrée, innovative et holistique de recherche-action qualitative appliquée et dédiée, pourrait être un outil efficace pour mettre en œuvre un processus d'empowerment et une complète pleine conscience individuelle-collective , comme base pour la rédemption des acteurs sociaux mentionnés ci-dessus par rapport aux préjugés et à la stigmatisation sociale intrinsèquement inhérents à l'imaginaire collectif. Dans le sens spécifique, compte tenu du thème de la mythanalyse en référence au facteur de valeur de l'insularité comme “fait total”, spécifique à l’essence du Moi et de l’Autre que soi, il apparaît crucial pour la réalisation de soi de chacun et de tous, de s'engager de manière constructive dans les processus de découverte, de partage, de responsabilisation et de témoignage pratiqué du sens qualitatif de l'Insularité et, surtout, de sa propre dignité insulaire.
Focus insularité: tradition, mémoire collective, mythes, rites, cultes, unicité multiethnique, patrimoine culturel, sources orales, légendes, “cunti”, histoires de vie, autobiographies. Dimension sémantique: héritage immatériel éthique et esthétique, humanitaire et spirituel de la descendance réciproque, appartenance, identité, anima loci, communitas, civitas, coexistence civile orientée vers le bien commun.
Salvatore Squillaci est diplômé de la Faculté des Sciences Politiques de Catane. Il a travaillé comme chercheur pour I.SVI., Département de Sociologie de Catane. Il a complété des études spécialisées en Economie de la Sicile, en Psychologie
Mythanalyse de l'insularité - Colloque International en Sciences Humaines et Sociales Catania 21-22 mai 2018

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sociale, en Anthropologie culturelle et en Sociologie de la Santé. Il a été sociologue, membre de la direction du Département de Santé mentale et des Toxicomanies de l'ASP de Catane, et s’est s’occupé de l’organisation, de la formation, de la recherche-action, de la conception, de l'évaluation de la qualité perçue « par le bas », de la prévention primaire des formes multiples de troubles sociaux, de la violence relationnelle, de la déviance et des addictions problématiques/pathologiques, anciennes et nouvelles, au niveau local, pénitentiaire et scolaire. Il a été Chargé de cours en Sociologie générale et en Anthropologie culturelle dans divers cours, séminaires, ateliers thématiques et masters dans divers cursus de l'Université de Catane et de la LUMSA.
Etudes et recherches en cours: Promotion ethno-anthropologique de la qualité des relations humaines et des mondes vitaux de la communauté. Recherche ethno-historique, démo-ethno-anthropologique et culture de la Tradition dans des contextes socio-éducatifs, territoriaux, culturels et anthropiques. Phénomène migratoire, Multiculturalisme, Multi- ethnicité, Racisme, Droits de l'homme, Fanatisme religieux, Terrorisme. Appartenance, coexistence et Altérité en tant que patrimoine culturel commun; Post-modernité, changement global, nouveaux rituels et mythes collectifs des multitudes à la recherche d'une identité; Processus de communication sociale, dépendances hyper-technologiques et formation virtuelle sans but.
Mythes et rites mineurs : analyse institutionnelle d'une insularité bivalente
Maria Lucia Pellegrino
Doctorat de recherche en Sciences Humaines et Sociales, Département d'Histoire, Société et Études de l'Homme, Université du Salento
Certains chercheurs en sciences sociales lisent les rites mineurs exclusivement sur la base de «connotations» empiriques supposées - tandis que d'autres les prennent comme des «déterminations» subjectives, dans le sens où, si d'une part la personne «subit» une dictature des sens qui filtrent les perceptions perçues, d'autre part elle "construit" une représentation de contenus mentaux qui leur sont liés. Un effet dû à l'ambivalence linguistique, provoquée par différentes stratégies gnoséologiques du sujet qui doit se limiter, ou à détecter les traits distinctifs des rites mineurs (les connotations empiriques), ou à en raconter les représentations mentales particulières (les déterminations logiques).
Les conditions qui peuvent faire partie d'un «ordre conceptuel» qui, d'une part, tend à classer les différents chiffrements sémantiques dans le protocole de « connotations » qui sont propres à l’ordre empirique (descripteurs) - tandis que, d'autre part, il tend à mettre le gradient ontique dans des "déterminations" qui sont propres à l'ordre logique (définitions). Il s'ensuit que le rite mineur peut être détecté contextuellement - bien au-delà de l’implicite empirique - par la forme explicite d'un «correspondant» mythe mineur. C’est-à-dire, alors, que le rite mineur a en lui-même une bi-valence constitutive qui permet de l’annexer aussi bien au monde concret de l'empirisme, qu’à sa représentation logique. Un double jeu que le sujet est autorisé à faire grâce à la manière «différente» de jouer les approches avec lesquelles il procède dans la perception gnoséologique. Cette perception ne réduit pas les rites à des organisations de la pensée positive, elle les reconnaît plutôt comme des relations – d’où la nécessité de clarifier la distinction entre les «choses» regroupées dans des structures «concrètes» et les «rites» rattachés aux structures «symboliques».
Maria Lucia Pellegrino a un Doctorat de recherche en Sciences Humaines et Sociales; maître de conférences de Sociologie de la marginalité et de la déviance elle a mené des activités de recherche et de didactique pour l'enseignement de l'Ethnographie de l'Université du Salento. Elle est membre fondateur de la Société Internationale d'Ethnographie (Paris), dont elle est vice-présidente. Auteur de plusieurs publications, parmi lesquelles: Etnografie (2012: avec Patrick Boumard et Vito A. D’Armento) Una via etnografica al lavoro sociale (2012); Scritture e proto-scritture etnografiche (2013); L’école qui vient (2015); Etnografie del dissenso (2017: avec Patrick Boumard, Vito A. D’Armento, Antonio Carnevale et Maurizio Merico).
L'apprentissage de l'art de la joie
Rossella Jannello
Journaliste et counselor, titulaire d’une maîtrise en Sciences Sociales à l'Université de Catane
Cet article se propose d'explorer une question: existe-t-il un archétype féminin méditerranéen et sicilien en particulier? Nous croyons que oui. Le définir n’est cependant pas facile. Apparemment victime prédestinée et témoin soumis et silencieux de l'Histoire et des histoires, la femme sicilienne a au contraire toujours montré au fil du temps, une capacité spécifique à construire sa vie malgré les événements, poursuivant obstinément ses rêves, quels qu'ils fussent. Presque une conscience angoissante de l'affirmation nécessaire de sa différence en tant que femme. Presque un matriarcat silencieux. Un écho que l'on retrouve dans l’imaginaire collectif et dans les traditions populaires, où le féminin méditerranéen est représenté comme doté d’une force extraordinaire et particulière, capable d'exercer un pouvoir, apparemment soumis,
Mythanalyse de l'insularité - Colloque International en Sciences Humaines et Socialies Catania 21-22 mai 2018
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sur les hommes. Mais aussi dans les chroniques, dans les histoires et dans les souvenirs de famille, où émergent les grandes et les petites difficultés et leur relation tourmentée avec les hommes.
Pour cela nous passerons en revue quelques exemples littéraires, tirés d’œuvres d'écrivaines entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle, mais aussi d’œuvres conservées dans les Archives de la mémoire et de l'imaginaire de l’Organisation de Volontaires “Le Stelle in Tasca” qui montrent non seulement un grand désir de raconter et de se raconter de la part des femmes, mais aussi le besoin de retrouver leur propre force dans les événements dramatiques de la vie.
Un regard aussi sur quelques faits historiques qui parlent de femmes siciliennes extraordinaires, contemporaines ou non, capables d'amorcer l'histoire, ou simplement de résister pour empêcher que l'histoire ne les submerge. Enfin, un regard sur l'art et sur la représentation iconique et symbolique de la femme méditerranéenne.
Rossella Jannello vit et travaille à Catane, où elle est née. Titulaire d’une maîtrise en Sciences politiques et sociales, counselor, journaliste professionnelle. Sur "La Sicilia" de Catane elle a écrit de nombreuses histoires ordinaires et extraordinaires de femmes et d'hommes, en s’occupant de Travail, de Santé et d’Urgences sociales. D'autres histoires dans ses récits qui se trouvent dans différentes collections, dans l'essai "Sogno arcano" (La Parola, Rome, 2011, écrit en collaboration avec le psychanalyste Riccardo Mondo), dans le livre "La Bella Angelina" (Carthago, Catane, 2017) et dans le numéro monographique de M@GM@ - Revue internationale de sciences humaines et sociales, en collaboration avec le sociologue Orazio Maria Valastro. En tant que counselor, elle collabore avec l'Aspic de Catane dans le domaine de la formation. Elle est également chroniqueuse des Archives de Pieve Santo Stefano et écrivain autobiographe de l’Organisation de Volontaires “Le Stelle in Tasca”. Elle fait partie du jury Thrinakìa, Prix international d’écritures autobiographiques, biographiques et poétiques, consacré à la Sicile.
Mythanalyse de l'insularité - Colloque International en Sciences Humaines et Socialies Catania 21-22 mai 2018.