tout ce qui est réel est fabulatoire, tout ce qui est fabulatoire est réel, mais il faut savoir choisir ses fabulations et éviter les hallucinations.

mercredi, mai 25, 2011

Le mythe de la mort


L'évolution de la nature se fonde sur des cycles où la mort n'est qu'une anecdote locale. C'est ce que nous enseigne l'observation de la végétation et des autres espèces vivantes. La mort recycle et la vie poursuit son foisonnement créatif. Il saute aux yeux que la nature est création et célébration omniprésente de la vie; nous ne devrions donc pas lui reprocher la mort, ni celle des feuilles mortes, ni la nôtre, si elle survient avec le grand âge. Je ne parle évidemment pas ici du drame des accidents mortels qui interrompent la saison normale d'une vie entière.
Les êtres humains divergent sur ce point de la nature à laquelle ils appartiennent pourtant corps et âme. Nous prétendons ne pas être heureux, nous nous déclarons pessimistes, nous nous plaignons de cette "vallée de misère", mais peu nombreux sont ceux qui se suicident. Nous avons terriblement peur de la mort, soit parce qu'elle nous prive de notre bien le plus précieux - la vie -, soit parce que nous avons peur de souffrir avant, pendant et après - et de faire souffrir nos proches.
Et nous avons inventé toutes sortes d'histoires farfelues de survie des esprits après la mort du corps. Nos mythologies en regorgent. Cela semblerait apaiser nos craintes personnelles et la tristesse de la séparation avec ceux de nos proches qui sont morts. Des mythologies-béquilles pour ne pas nous confronter à la réalité matérielle.
Pour celui qui se veut athée, la mort est finale pour lui individuellement. Il retourne à la matière, à la poussière d'étoiles dont il est fait. S'il est un athée heureux, il souhaitera donc retarder le plus possible l'issue fatale, mais il ne doit pas redouter la mort pour lui, lorsqu'elle survient. Son retour à la terre est naturel. Il a profité d'un instant cosmique et apporté une petite contribution à l'évolution de la nature et de l'humanité qui en fait partie.
Nous rêvons cependant d'éternité, cette éternité dont nous avons doté les dieux que nous avons inventés. Les mythes de la mort et de l'éternité sont frères jumeaux. Pourtant, l'éternité, qui n'a pas de fin, ne devrait pas non plus avoir de début. Si elle doit commencer pour chacun de nous avec notre mort, il faut bien que nous ayons été quelque part avant de naître. La croyance en la métempsychose est donc logique. Pour garantir l'éternité, elle nie la mort et l'interprète, de même que la naissance, comme une migration de l'âme. Et pour rester logique et introduire une récompense pour les bons, cette vision bouddhiste a donc créé une hiérarchie des corps. Un homme bon renaîtra dans un corps noble et un méchant dans celui d'un ver de terre. Les raffinements de notre pauvre logique humaine sont aussi pitoyables que la plupart de nos mythologies.
Une bonne question: le progrès existe-t-il dans l'histoire de nos mythologies? Certes, le progrès lui-même est un mythe fondamental. Un bon mythe. Rideau pour aujourd'hui. Mais nous reviendrons voir la pièce demain pour mieux la déchiffrer.
hf