Nous observons que le salafisme et divers autres intégrismes islamiques se présentent aujourd'hui comme les plus néfastes de ces religions, tant ils revendiquent obstinément l'origine divine des législations sociales, qu'ils prétendent donc maintenir intransigeantes et figées, ce qui les entraîne dans le fanatisme et la violence. Comment peut-on croire encore aujourd'hui qu'en se faisant exploser et en tuant ainsi des personnes au hasard, on ira directement au paradis! Et je n'insiste même pas sur les vierges qui vous y attendent impatiemment. Comment tant de bêtise est-il encore possible? Et tant de barbarie? Comment peut-on encore appliquer la charria, refuser l'égalité des femmes, condamner la démocratie, régner par le spectacle du terrorisme! Les deux autres monothéismes, le judaïque et le chrétien, même s'ils génèrent aussi des dérives intégristes, sont devenus beaucoup plus tolérables dans la mesure où ils composent avec les valeurs de la société civile et le respect des droits de l'homme.
Il ne faut pas pour autant adopter une pensée binaire, qui opposerait schématiquement les mythes bénéfiques et les mythes toxiques. Il est incontestables qu'il y a des aspects bénéfiques dans le christianisme, le judaïsme et l'islam contemporains. Il est vrai de même que des mythes éminemment porteurs comme ceux du progrès, de la démocratie, de la diversité culturelle peuvent aussi générer des effets pervers. Mais il demeure qu'ils sont globalement infiniment plus bénéfiques pour l'évolution de l'humanité que l'archaïsme des religions, car ils reposent non pas sur l'aliénation de la raison et une fabulation fataliste, mais sur les valeurs de lucidité, de raison critique et de liberté individuelle.
La mythanalyse n'est pas tant l'exploration critique des imaginaires sociaux archaïques, que celle des mythes modernes, actuels et tournés vers le futur. Et elle ne se positionne pas comme une démarche neutre et académique: elle se veut prescriptrice. Tout en déchiffrant lucidement le mythe du progrès, dont elle prend totalement en compte la pensée fabulatoire, elle déclare croire à ce mythe et le promouvoir en raison de ses effets bénéfiques. Elle n'oppose pas fabulation et raison, ce qui serait ingénu. Elle est la première à soutenir que le rationalisme est lui aussi une fabulation humaine. Mais parmi les mythes qui nous gouvernent elle choisit ceux qui éthiquement sont les plus inspirants et efficaces. Et elle condamne sans équivoque les dérives de l'islam qui nous ramènent au pire des archaïsmes, un archaïsme qui a été déjà celui du catholicisme de triste mémoire à l'époque des croisades et de l'inquisition, mais que le catholicisme a été capable de rejeter en composant aujourd'hui avec la modernité.