tout ce qui est réel est fabulatoire, tout ce qui est fabulatoire est réel, mais il faut savoir choisir ses fabulations et éviter les hallucinations.
lundi, mai 27, 2013
Soleil noir - soleil nocturne
Le numérisme est devenue une sorte de religion pour les uns, une drogue pour d'autres, un outil trivial, mais magique pour les presqu'athées. Et pour les païens une technologie prométhéenne. Ce serait pour les Incas l'effet même du dieu Soleil. Il réchauffe nos psychés, ou les désole s'il ne se manifeste pas sur nos écrans fidèles et impatients. Nous sommes devenus une planète du Soleil numérique: e-earth, comme nous appellent les prêtres de cette nouvelle foi. Notre Voie lactée ruisselle d'étoiles numériques que guettent les orpailleurs.
Soleil d'or? Soleil bleu ? Soleil dont l'éclat noir nous aveugle? Soleil sinistre qui annonce notre catastrophe finale? Soleil de la magie noire dont nous manigançons quotidiennement les algorithmes? Soleil de Faust?
Soleil nocturne? Celui de nos angoisses, de nos rêves, de nos cauchemars et de nos insomnies?
Lorsque les hommes créent un dieu, c'est qu'ils en attendent quelque chose. Quelque chose d'important, de fondamental, qui concerne leur origine ou leur destin. De ce nouvel astre divin, nous, les païens, attendons la réalisation de notre instinct de puissance. Pour recréer le monde à notre image. Les monothéistes lui délèguent leur intelligence, leur âme et en attendent leur salut personnel et des promesses de paradis dans l'autre monde, le virtuel, comme ils ont toujours fait. Les postmodernes, qui ne croient plus à rien, n'en attendent que jouissance immédiate ou résignation.
L'astrophysicien-poète Hubert Reeves dit que nous sommes "fils des étoiles". Homines numerici. Mais ce soleil qui brille dans notre nuit n'est que notre création humaine, notre reflet, le porteur de nos espoirs, de nos cupidités, de notre instinct de plaisir et de mort. Eros - Thanatos -Prométhée. Et ce n'est que le début d'une puissante mutation binaire qui nous entraînera au-delà de toutes nos prévisions, vers des divergences encore impensables.
La mythanalyse du numérique est un grand sujet d'analyse des paramètres de l'aventure humaine. Elle n'est qu'un chapitre actuel de la mythanalyse de la magie.
Libellés :
cyberProméthée,
Eros,
mythanalyse de la magie. soleil obscur,
Thanatos
samedi, mai 25, 2013
mythanalyse du logo de Apple
La célèbre pomme Macintosh qui est devenu le logo de Apple porte la marque de la morsure d'Adam. Nous sommes tous des Adam, séduits par la femme qui nous offre la pomme de la connaissance. Pourquoi demeurerions-nous de stupides décérébrés dans un paradis terrestre assurément ennuyeux, où rien ne peut arriver, des innocents soumis à un dieu qui nous interdit d'évoluer, de savoir, d'agir pour aménager ce paradis terrestre selon nos propres désirs. Satan a tout expliqué à Ève. Et bien sûr, j'aurais mordu la pomme! Et si c'était à recommencer, je le referais. Le prix à payer est immense: travail, souffrances, injustice, violence, et même la mort, chacun son tour.
Mais tout plutôt que l'ennui éternel et la décérébration. Le "fruit interdit'" ce n'est que la connaissance, celle à laquelle nous aspirons tous, celle dont nous célébrons l'obligation scolaire, et dont la quête incessante est le fondement de la dignité humaine. Il faut être un dieu archaïque et buté pour vouloir nous l'interdire. Nous sommes fiers de porter le "péché originel", sans lequel nous ne serions que des innocents stupides. Aujourd'hui comme hier, l'homme rêve de sa propre puissance, il veut devenir un dieu lui aussi. Goethe a génialement mis en scène ce rêve éternel dans son Faust.
Appel réactualise donc ce vieux mythe biblique de la pomme de la connaissance et il n'est pas logo plus vendeur qu'on puisse imaginer. Le vieux mythe n'a rien perdu de sa puissance de séduction.
Le mythologue Georges Lewi a exploré ces imaginaires collectifs qui supportent l'énergie publicitaire des nouveaux Titan du commerce. Il faut lire son "Mythologie des marques"(édition Pearson, 2009). Et aussi son dernier livre: "Les nouveaux Bovary, Génération Facebook, l'illusion de vivre autrement" (Pearson 2012).
Libellés :
George Lewi,
Mythologie des marques.,
mythologue
vendredi, mai 24, 2013
La nouvelle boîte de Pandore
La mythanalyse du numérique n'en finit pas de repérer et déchiffrer les archaïsmes de nos imaginations collectives les plus actuelles. L'ordinateur est désormais entre toutes les mains, du moins dans celles des privilégiés de notre XXIe siècle. La tentation est grande d'y reconnaître une nouvelle déclinaison de la fameuse boîte de Pandore du vieux mythe grec. Pandore était la sœur de Prométhée et savait qu’il ne faut pas ouvrir cette boîte, sous peine de libérer le mal. La conscience et tous les maux qui viennent avec elle.
Ève était la femme d'Adam. Et lorsqu'elle lui offre la pomme de la connaissance, elle savait de Satan que cette pomme déliait aussi la conscience, la connaissance et tous les péchés du monde. Au paradis terrestre, Adam et Ève étaient deux innocents, décérébrés. Une situation bienheureuse, mais humiliante. La pomme d'Adam, la pomme de la connaissance interdite permettrait de rivaliser avec Dieu. C'est ce que Satan lui avait confié. Comment résister!
Ainsi donc Appel a donc choisi pour son logo de réactiver ce vieux mythe biblique de la pomme. Elle porte la marque de la morsure du premier homme. Bravo à Appel pour ce logo génial! Aujourd'hui, Le choc du numérique excite les uns, déclenche de nouvelles prophéties de puissance humaine, de posthumanisme, accompagnées de leur foules de désirs et de peurs. Le Satanford Institude est occupé, non sans délices démoniaques, à démêler le meilleur et le pire de notre avenir. La puissance informatique de Apple, et sa séduction insistante, se retrouve bien dans le fameux logo. Mais on ne saurait ignorer l’attraction de Google, avec ses moteurs de recherche dans dans tous les champs de la connaissance, qui devient un nouveau Titan ou Prométhée de notre cosmogonie numérique, ni les chimères et les démons de l’intelligence artificielle, qui nous poussent peut-être dans les bras de l’enfer, s’ils ne nous ouvrent pas les portes du paradis.
Nous nous croyons modernes? Oui, mais en réactivant les vieilles figures de nos mythologies occidentales: Satan et Prométhée, la pomme de la connaissance et la boîte de Pandore. Les hommes recherchent toujours plus de puissance et en prennent les risques, aujourd’hui comme dans les premiers temps.
vendredi, mai 10, 2013
Mythanalyse et société, 1983 (5)
L'oiseau chat, dessin à l'ordinateur Mac 128K de 1984, avec Macpaint
Mythanalyse et sociologie
La sociologie
est une physique de la société. Depuis ses débuts, car elle est née dans le
choc des armes et sous le signe des chemins de fer et de la thermodynamique. Avec un zeste de sciences naturelles. Elle rend
compte de la mécanique sociale, idéologique et institutionnelle, de ses leviers
et de ses forces. Quand elle a flirté avec la biologie et les analyses
organicistes, elle n’a pourtant ni su ni voulu mettre en scène la vie, mais
seulement des mécanismes corporels.
Les analogies
cybernétiques contemporaines, qui nous proposent l’image d’une société comme
système traitant de l’information, ont épousé l’évolution de la physique
elle-même des machines, sans mettre davantage le nez dans les fameuses « boîtes
noires ».
Quand elle s’est
mariée avec le structuralisme, la sociologie a rencontré plus que jamais la
mécanique arithmétique et bureaucratique qui domine notre société gestionnaire;
voire des « symboles d’allure logico-mathématique qu’on aurait tort de
prendre trop au sérieux » (Lévis-Strauss). La gestion : fantasme
exorbitant de notre société moderne!
Faut-il donc
croire que la vie sociale est comme la boule terrestre qu’Archimède proposait
de soulever avec un point d’appui et un bras de levier? Archimède : un
fier-à-bras plus calculateur déjà qu’Hercule et Superman. Ce mécanisme et ses
mauvais génies Production et Quantité n’ont fait pourtant qu’empirer jusqu’à
nos jours. Car la sociologie de Saint-Simon, d’Auguste Comte, de Fourier, de
Marx, de Proudhon, de Bakounine, s’animait de souffles révolutionnaires,
utopistes et romantiques. Le positivisme lui-même était un élan prométhéen
avant-gardiste comme un fantasme, que seule l’application besogneuse,
consciencieuse, rationnelle et gestionnaire a transformé en plaie sociale.
Évoluant au fil des logiques du capitalisme d’organisation, la sociologie s’est
mécanisée et quantifiée pour mieux gérer à la demande les achats et les votes.
Triste vie conjugale! Il aura fallu une maîtresse un peu libidineuse pour lui
rendre le goût de vivre : la psychanalyse avec laquelle la sociologie
prend bouche parfois de 5 à 7. De ces nouveaux rapports encore si clandestins
(l’université française n’a encore créé, si je puis dire, aucune chaire de
psychanalyste… ) sont nés de beaux enfants naturels : sociologie
institutionnelle, socio-analyse entre autres, qui ont du mal à se faire une
petite place au soleil. Il est vrai aussi que la psychanalyse avait fait ses
premiers (faux) pas vers la sociologie, sous la pulsion du Professeur lui-même
analyste des tabous, des religions et des malaises de civilisation.
Mais une redoutable
difficulté hypothéquait constamment l’idylle naissante. Car la psychanalyse
freudienne travaille des biographies individuelles, traumatismes de naissance
et d’enfance, rapports à un père et une mère. Leur biographie intéresse la
psychanalyse, mais il ne nait pas de pères ni de mères : la mythanalyse
tente d’élucider les structures et les valeurs de la société. Cela résume la
différence.
Ce n’est pas la
psychanalyse qui expliquera le passage du polythéisme au monothéisme, ni la
force inconsciente de ces deux religions dans la société. Ni le fait que l’idéologie
avant-gardiste ait été monothéiste. En revanche, la sociologie nous montre la
coïncidence entre société indivise (où groupe et famille large sont
indistincts) et polythéisme; elle peut suivre l’évolution parallèle de la
structure familiale et de la structure religieuse. Car la généralisation du
monothéisme coïncide avec le développement de la famille conjugale (père, mère
et enfants directs). Même le développement du culte de la Vierge coïncide avec
l’émancipation féminine. La dimension sociologique ne peut procéder par simple
induction généralisatrice à partir de la psychanalyse. Il faut considérer d’emblée
la dimension collective du langage social où s’informe l’expérience
individuelle de la naissance au monde; donc les histoires qui circulent nous
intéressent plus comme pseudo-explications mythiques et source de nos
sentiments, que les biographies individuelles. De mon apprentissage sociologique,
j’ai gardé l’habitude d’aller du général au particulier, comme le veut aussi la
mythanalyse, et non pas de l’individu au collectif, comme le tentera toujours
en vain la psychanalyse sociologisante.
Ce n’est pas une
question de méthode dans la collecte des signes, mais d’hypothèse théorique et du
regard.
Il me semble que
si la mythanalyse quitte les bavardages de salon et travaille sur le terrain,
celui de la société contemporaine au mythanalyste, elle a de grandes chances de
nous permettre de dépasser les débats freudo-marxistes et de répondre à notre
désir actuel d’émancipation. Encore faudra-t-il aussi qu’on cesse de la
confondre avec le journalisme ou le moralisme sur les « grandes illusions
de notre temps » du genre « le bronzage en 24 h c’est un mythe! »
Si nous en
venons maintenant à l’exemple de la société québécoise, telle qu’elle ressort
de cette enquête, la mythanalyse nous invite à y considérer le thème de l’origine
comme mythe central. Un mythe qui renvoie certes à une chronologie historique
précise et fondatrice, mais qui détermine encore les comportements individuels
et sociaux contemporains.
Il est vrai que les
sociétés du Nouveau Monde offrent des cas d’espèce particulièrement fascinants
pour le mythanalyste. Car il existe une origine historique de ces sociétés
conquérantes, des premiers fondements et des premiers drames qui résultèrent de
la rencontre avec les populations indigènes. Naissances difficiles, armées
sanguinaires ou conciliatrices, qui ont laissé dans la mémoire collective les
traces de traumatismes aigus. Naissances préparées par de longues traversées
sur les flots de la mer et à travers des contrées inconnues et hostiles. L’accouchement
manu militari des sociétés américaines et les luttes fraternelles ont marqué l’origine
de leur vie. Ces sociétés ont une date de naissance et des pères (et une mère
océanienne) statufiés sur les places publiques, dans les légendes et les
chansons.
On pourrait en
déduire que la mythanalyse sera de ce fait facilitée. Voire.
Nous avons
évoqué les diverses variantes selon lesquelles semble s’exprimer si fortement
au Québec le mythe de l’origine, qui s’appelle en l’occurrence : mythe du
Nouveau Monde. Nostalgie de l’époque des trappeurs, des pionniers,
particulièrement forte chez les nouvelles générations, goût du voyage, des
langues étrangères (au niveau de l’intention), référence à l’oiseau, à l’île à
découvrir, au voyage sidéral vers de nouvelles planètes apparaissent
fréquemment dans les réponses reçues. L’île, au milieu de la mer, comme un lieu
protégé, isolé du monde extérieur, évoque le sein maternel où l’on pourrait renouer
avec le bonheur perdu. Le goût aussi du retour fusionnel à la nature, les
signes d’eau et d’air peuvent signifier l’innocence retrouvée et la
redécouverte d’une nécessité vitale et fondatrice. Mais le mythe du Nouveau
Monde s’exprime encore pour les vacances dans la nostalgie du paradis océanien,
nature primitive, chaleureuse des tropiques où le soleil brille sur le bonheur
originel.
Le mythe du
Nouveau Monde à conquérir et à créer, c’est de même la demande souvent
mentionnée de fonder une nouvelle société, plus juste, plus altruiste,
pacifique, harmonieuse, égalitaire. Il me semble que c’est encore dans ce même
mythe que le féminisme québécois puise aujourd’hui son énergie réformatrice, en
vue d’une société où les femmes trouveraient une place plus équitable et
harmonieuse dans le partage des pouvoirs avec les hommes : un deuxième
mouvement d’espoir et de libération
renouvelant l’élan qui avait conduit les pionniers quittant la vieille Europe à
travers la mer vers le Québec.
Naissance/libération :
comment ce mouvement vital pourrait-il s’accommoder durablement de se soumettre
aux descendants de la vieille Angleterre? Comment pourraient-ils se laisser
durablement castrer? Le mouvement indépendantiste québécois puise son énergie
encore dans le mythe du Nouveau Monde. Les mythes ont la vie dure et
celui-ci, au Québec, est en phase manifestement de réactivation.
La mer. Comme je l’ai suggéré déjà, il me semble important que l’origine du
Québec soit liée à un voyage sur la mer. La mer est originelle. Tout en sort, tout
y retourne. C’est un lieu de naissance : l’esprit plane sur les eaux de la
genèse. Eaux dangereuses, amorphes ou chaotiques, qui précèdent la création du
cosmos. La traversée de la mer ressemble à un voyage initiatique :
séparation, mort et renaissance. C’est aussi l’espace indéterminé, immense,
annonciateur des étendues infinies du Nouveau Monde. C’est de la mer que surgit
la côte du Nouveau Monde. Le signe d’eau, l’origine de la vie, est omniprésent
dans l’existence et l’imaginaire québécois. Et la mer relie encore au souvenir
de la mère patrie.
L’oiseau. L’oiseau est signe d’air, signe d’esprit, de message, de voyage. L’oiseau
québécois est souvent maritime. Les oiseaux annoncent la côte, évoquent la
création, l’innocence du jardin paradisiaque. L’oiseau signifie l’âme, la
religion, la nature primitive.
Le chat. Du chat, on n’est jamais très sûr. C’est un animal ambivalent, libre
ou casanier, bénéfique ou maléfique, un ami fidèle ou sournois. Un ami pour l’hiver.
Le couple
oiseau-chat. L’oiseau est libre. Il voyage vers de nouveaux espaces, tandis que
le chat, animal domestiqué, ne s’écarte ni loin, ni longtemps du foyer. Le
couple oiseau-chat marque cette ambivalence du désir conquérant et du désir
nostalgique ou attaché. Il marque cette difficulté existentielle d’une
attraction et d’un empêchement, du désir du chat auquel l’oiseau échappe sous
peine de mort, de l’union impossible ou destructrice de deux faux amis, de deux
ennemis qu’on associe volontiers, suivant le regard fasciné du chat vers l’oiseau
dévorable. Le couple oiseau-chat signifie cette attitude dangereuse, ce désir
irréalisable d’harmonie paradisiaque, cette séduction menaçante, cette identité
conflictuelle québécoise et sa réconciliation impossible qui semblent
caractériser les idéologies, les individus et les rôles, et que j’ai partagées
et vécues aussi à mon corps défendant comme Européen au Québec.
Le chat a la queue en perchoir…
Il a la queue en point d’interrogation.
Mythanalyse et société, 1983 (4)
KUNST - MYTHOS (ART -MYTHE), intervention à Kassel lors de la Documenta de 1982 (Allemagne)
(Ce texte est paru dans L’oiseau-chat, roman-enquête sur l’identité québécoise, aux éditions La Presse, Montréal, 1983, qui a fait suite à mon exposition-rétrospective d’art sociologique au Musée d’art contemporain de Montréal en 1981-82. Il en constitue la quatrième partie.
Les signes de l’échange symbolique
Si les images liées du Père et de la Mère, de l’Autre et du corps constituent donc la forme (structure et image) du mythe élémentaire, en tant que pseudo-explication de l’origine de la vie et du monde, ce n’est cependant pas à ce moment initial de la vie que nous pouvons le repérer, l’analyser, le rationaliser ou le démystifier. C’est ici et maintenant, dans la situation d’implication sociale et imaginaire où parle l’« adulte » (mot bizarre, à questionner…).
La plupart du temps la plupart des gens parlent naïvement ou inconsciemment le langage du mythe élémentaire (discours de la quotidienneté, discours politique ou scientifique, discours de l’affectivité).
Le repérage interrogatif ou la mise à nu de mythe élémentaire et de ses variations et effets secondaires dans le discours social (individuel et collectif), relève d’une méthodologie d’observation et d’intervention (mise en place de dispositifs interrogatifs ou analyseurs institutionnels) sur le terrain social réel. Comme souvent, on trouve surtout ce que l’on cherche; la théorie du mythe élémentaire sert de référence à l’intervention pratique, dont l’analyse pourra éventuellement confirmer, infléchir ou réfuter l’hypothèse théorique. L’attention se porte sur le repérage des signes culturels évoquant la présence du mythe. Par exemple l’image paternelle d’un chef d’État, les mots-images du discours écologique, etc.
Quelle que soit l’admiration qu’inspire Mircea Eliade et Lévi-Strauss, et quelle que soit la difficulté de l’entreprise, nous éprouvons un besoin existentiel de travailler sur la société contemporaine où nous sommes impliqués plutôt que dans l’exotisme historique ou ethnologique des religions et des mythes du passé ou d’ailleurs. Encore que l’artiste et le sociologue doivent aussi se faire une méthode du nomadisme, qui leur permet la distanciation, l’étonnement, et même au retour un regard plus aigu sur leur propre tribu, parisienne par exemple. Car le poisson doit sortir de l’aquarium pour voir son eau et sa vitre familières.
L’accomplissement du « désir dans la valeur d’échange », selon l’analyse de Jean Baudrillard, renvoie à un système de signes étroitement codés dans le langage social. Tout parle ou bavarde, même quand on ne l’écoute pas. Tout émetteur de langage (conceptuel, visuel, affectif ou gestionnaire) sélectionne les signes de son discours et les charge d’intentions et de sens socialement codés, explicitement ou à son insu. Aucun objet ni personne ne bavarde pour ne rien dire, ni ne peut s’exprimer hors langage. Et il est clair que nous échangeons plus de signes symboliques que de valeurs d’usage. C’est donc dans « l’échange symbolique » que nous tenterons de repérer les structures et les signes reproducteurs de mythes.
lundi, mai 06, 2013
Mythanalyse et société,1983 (3)
Enquête à Lyon sur l'art d''aujourd'hui, octobre 1982. Affichage aléatoire des lés de papier. Une trentaine d'affiches et de panneaux de signalisation.
L’Histoire et la répétition. La mort de Prométhée
Prométhée est mort, enfin après un si long supplice, délivré des aigles qui lui dévoraient le foi, délivré de son angoisse, délivré par un surhomme et demi-dieu. Il a pu jouir d’une longue retraite au vert, dans la paix de l’âme et du corps. Baroudeur d’occasion, toujours prêt sans doute à renaître…
Libellés :
art sociologique,
avant-gardisme,
histoire,
Lyon,
Montréal,
Oiseau-chat,
postmodernisme
dimanche, mai 05, 2013
Mythanalyse et société, 1983 (2)
(Ce texte est paru dans L’oiseau-chat, roman-enquête sur l’identité québécoise, aux éditions La Presse, Montréal, 1983, qui a fait suite à mon exposition-rétrospective d’art sociologique au Musée d’art contemporain de Montréal en 1981-82. Il en constitue la quatrième partie.)
Le mythe élémentaire
Si la question est ambitieuse, la réponse en revanche sera très modeste. Le mythe se constitue par implication réelle de chaque individu, qui lors de sa « venue au monde » attribue au père et à la mère toutes les vertus explicatives et agissantes pour sa satisfaction ou sa douleur (son bien ou son mal, son désir, son plaisir ou sa frustration, pour le plein ou pour le vide, pour l’accomplissement de sa vie ou son manque, etc.). Telle est la situation concrète vécue par chacun de nous avec son intensité extrême et sa force inéluctable de constitution de l’image du monde (de son origine, de son existence et de sa finalité), qui sera à jamais pour chacun de nous la référence « originelle » définitive. La conscience de son rapport au monde et aux forces positives, négatives ou conflictuelles, que se fabrique alors chaque « nouveau-né » est à la fois image originelle du monde, explication originelle du monde et structure originelle de son rapport au monde, au masculin, au féminin, à l’autre, au chaud, au froid, au dur, au mou, etc.C’est le mythe élémentaire (image, explication, structure), dont tous les autres mythes paraissent n’être que des effets secondaires. Mais quel mythe nous incite-t-il à insister sur l’élémentaire et à lui soumettre des effets seconds? Quelle structure parentale induit-elle cette logique?
Ce mythe élémentaire est plus encore structure (orientée par le désir et le rejet) qu’image. Car il n’est pas vécu comme image à regarder « objectivement » ou extérieurement à soi, mais comme situation relationnelle au père, è la mère, à son propre corps, à l’étranger, à l’espace-temps, etc., avec des modes d’action de type magique, polythéiste, monothéiste, ou technico-rationnel selon les situations et les moments.
Ce vécu n’est pas explicité avant que la société ne lui prête ses formulations langagières et culturelles, les histoires qui circulent partout.
L’éducation sociale et familiale se chargera de donner aux souvenirs de ce vécu originel les formes dominantes de sa civilisation et de son idéologie.
Tous nos mythes, toutes nos rationalisations, tous nos rapports au monde se sont constitués en référence originelle à ce moment exceptionnel de la « venue au monde » et des premiers temps de la vie, même si, bien évidemment, la suite de la biographie individuelle et des imprégnations culturelles viendront modifier, brouiller ou refouler cette « conscience originelle » dans le subconscient de l’adulte. Mémoire originelle qui remonte à la surface quand vient la vieillesse de l’adulte et que se relâchent les filtres de l’autocensure. Moment si exceptionnel que le souvenir en resurgit, quand sur le tard l’adulte perd la mémoire!
Pour le nouveau-né, père, mère, tierce personne sont TOUT ce qui existe, tout ce qui crée, tout ce qui donne ou prend, tout ce qui aime ou rejette. Monothéisme ou polythéisme, par exemple, en découlent comme conséquence de la structure familiale ou apparaît le nouveau-né.
Cette pseudo image-structure explicative de l’origine de tout connaîtra aussitôt des variations individuelles (génétiques ou culturelles). Mais elle constitue notre référence « absolue ». Chaque être humain l’a connue/vécue. Son interprétation culturelle explicite constituer une « formation mythique »; mais son effet inconscient sur les individus et les groupes demeure le plus souvent implicite ou caché. Elle a une sorte d’universalité : celle de la venue au monde de chaque être humain avec sa conscience (relativement) vierge – dans un rapport parental au monde (relativement) universel. (Cela étant admis, on pourra d’ailleurs apporter toutes les nuances relativistes souhaitables.)
De façon générale, nous ferons remarquer que cette interprétation de la formation mythique originelle est modeste, psychogénétique, matérialiste et simple au point que les esprits sophistiqués pourront la compliquer à loisir pour tenir compte de tous les effets secondaires, perturbateurs, relativistes, et l’enrichir aussi pour mieux rendre compte de la diversité humaine et culturelle, sans que cela nuise – au contraire – à cette interprétation fondamentale. Toutes ces recherches complémentaires, c’est précisément ce qui pourra constituer le corps déchiffré et le regard perçant de la mythanalyse.
Libellés :
identité québécoise,
Montréal,
Oiseau-chat,
Qui penses-tu être?
samedi, mai 04, 2013
Mythanalyse et société, 1983 (1)
(Ce texte est paru dans L’oiseau-chat, roman-enquête sur l’identité québécoise, aux éditions La Presse, Montréal, 1983, qui a fait suite à mon exposition-rétrospective d’art sociologique au Musée d’art contemporain de Montréal en 1981-82. Il en constitue la quatrième partie.)
Apparaît sur la scène la jeune déesse Mythanalyse. Elle n’est sans doute pas la plus belle, mais nous séduit d’emblée. N’est-il pas vrai que les sciences humaines sont parmi les divinités les seules que nous ayons vu naître, et dont nous sachions qu’elles ne sont pas éternelles?
La Mythanalyse s’entretient avec La Sociologie, bientôt rejointe par L’Histoire. Puis La Sociologie s’écarte, au passage de quelques francs-tireurs, et va flirter avec Le Roman. Ils s’asseyent sous un parasol rose.
Tandis que des structuralistes jouent à la marelle, au premier plan arrive le commissaire de police, qui se met au garde-à-vous pour présenter son rapport à un supérieur hiérarchique.
Le commissaire tourné vers le public : « On a trouvé dans la poche de pantalon du cadavre le document photocopié que voici (il lit d’une voix monocorde) :
-Les Théories sont des romans, lyriques ou policiers. La Physique n’est qu’une fiction romanesque : amours fatales entre la matière et l’énergie. La Dialectique doit tout son charme et sa nécessité au mystère de la naissance… des enfants. La Communication fait écho au désir de renouer avec la mère. Le mythe de l’âge d’or (ancré à l’origine et au but ultime de l’Histoire) résonne du souvenir du fœtus dans le sein maternel (espace de quiétude circulaire, hors temps). Le vocabulaire est mythique; les principes sont l’héritage du premier prince; les organisations sont les organes du corps social; seul le maître les maîtrisera en y jetant un peu de lumière pour en élucider les obscurs secrets; si le phallus – géométrie, droit, rectitude, histoire – a dominé l’humanité jusqu’à nos jours, quel sera le vocabulaire du mythe maternel? Et celui de la femme? L’étymologie nous en apprend plus sur notre image du monde que toutes les théologies et les physiques réunies.
Les mots sont des concepts-images. Car « c’est poétiquement que l’homme habite », affirmait Hölderlin à un journaliste du Star Magazine. L’origine du monde est un irrationnel. Le monde est un irrationnel. Sans qu’on puisse esquiver le principe de réalité, ni savoir quelle réalité est réelle.
Il faut classer (tout se classe, même la société) dans le tiroir des rationalisations imaginaires : aussi bien la magie ou les religions que la philosophie et le rationalisme » Il n’y a pas tant de différence qu’on le dit (au sens psychanalytique où la société « rationalise » ses fantasmes et les moyens techniques d’action sur le monde qui leurs sont liés). Certains y ont vu des « âges de l’humanité »; or ils sont souvent simultanés, comme on peut l’observer dans la civilisation occidentale actuelle. Ces trois modes de pensée et d’action semblent sous-tendus par le même mythe originel.
Quand Jean-François Lyotard en appelle aux flux énergétiques, seuls capables de déborder tous les appareils langagiers et institutionnels, toutes les cristallisations qui bloquent la dynamique créative, a-t-il conscience qu’il convoque au retour le « Chaos », le désordre et les ténèbres, ce flot noir, amorphe et ravageur qui régnait à l’origine, selon le mythe, avant que le langage n’instaure l’ordre d’un cosmos apparemment si désiré?
Qu’est-ce que la mythanalyse? Disons simplement qu’elle tend à repérer, déchiffrer et reformuler en un langage critique les mythes collectifs qui déterminent les processus inconscients, individuels et sociaux : ces histoires toutes faites avec lesquels nous pensons, nous vivons.
Par « origine », nous ne désignons pas un point zéro d’une histoire linéaire du monde, mais un lieu mythique de référence explicative, contemporain à chaque individu, à chaque culture, à chaque société. Et cela même si l’exemple crucial de la naissance individuelle suggère l’idée d’une naissance du monde lui-même. C’est par analogie avec la biographie individuelle que nous identifions le plus souvent cette origine au point de départ imaginaire d’une « histoire de l’humanité ». Mais l’origine est toujours contemporaine. Elle est comme le point de fuite de l’espace inventé par le Quattrocento : elle se déplace avec nous. Elle est l’image intense, ici et maintenant, où s’ancrent nos explications imagées du monde. Nous sommes là, ex-istants à chaque instant, sortant de l’origine, venant au monde continuellement. L’origine est un imaginaire. Comme la ligne d’horizon.
Les mythes sont les explications imagées des origines du monde. Ils sont le plus souvent déjà là dans les mots, comme Heidegger nous invite à le découvrir pas à pas. Ils sont largement exprimés dans les contes, légendes et religions, dans les structures de la langue, dans l’imagerie banale et les stéréotypes de la vie quotidienne, dans l’aménagement de l’espace public et privé, dans ce qui s’érige, circule, se live, dans l’échange symbolique, dans les cultures populaire et savante, dans les sciences, dans le positivisme, dans la logique. Partout. Les mythes ne sont pas pour autant explicités comme tels : ils nous déterminent à notre insu. Les mythes ont des transparences auxquelles nous sommes aveugles, même et surtout s’ils fonctionnent comme références explicatives : par la « vertu » des histoires que met en scène le savant ou le politique (quand bien même les histoires sont quantifiées ou systématisées).Car nous ne prêtons pas attention à leur mode de constitution et à leur contenu essentiel. Nous les prenons, quand ils sont étiquetés « mythes », pour des histoires d’enfants, des légendes naïves ou des fables. Dans l’immense majorité des cas, nous sommes inconscients de leur résonance de leur présence actuelle, sous d’autres formes implicites de notre culture contemporaine, fût-elle rationaliste, positiviste ou cybernétique. Ce sont les métamorphoses cachées, camouflées de ces mythes, que la mythanalyse tente d’élucider, de mettre è nu, de révéler, d’expliquer, de comprendre, d’expliciter : autant de variations du vocabulaire courant qui montrent aussitôt que la mythanalyse baigne elle-même dans le mythe, qu’elle ne saurait s’en extraire assez pour le distancer et nous émanciper; qu’elle ne pourra jamais montrer du doigt ses objets de connaissance : le doigt ne se montre pas lui-même.
La mythanalyse ne peut que déstabiliser les clichés de la connaissance, délacer quelques masques, derrière lesquels ne se cache aucun visage nu.
Je rêve d’écrire : la critique de la raison mythique.
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mercredi, mai 01, 2013
Les débuts de la mythanalyse, 1979 (6)
Le mythe élémentaire
D'une question d'artiste étonné par le mythe de
l'idéologie avant-gardiste, nous voilà amenés à rejeter l'histoire comme temps
du progrès et nous voilà conduits à réfléchir sur le mythe élémentaire qui, à
travers ses métaphores historiques, demeure le principe explicatif de la
civilisation occidentale, bien plus largement que dans la question artistique
qui a servi de base à cette méditation.
Je crois qu'il s'agit de cette image très simple et
banale, déjà tant évoquée dans cette recherche, la plus proche de chacun de
nous, liée à l'histoire individuelle de chacun de nous, puisqu'aussi bien nous
connaissons l'origine apparente de notre propre vie : une mère et un père.
Signalisation routière imaginaire, Père-Fille, Angoulême,
Ils ne sont pas exactement l'origine de notre vie, qui se
joue dans un mystère, mais l'image où se fixe notre naissance, l'image de
référence par excellence, celle du père liée à la force, à la volonté, à
l'ordre, au principe de réalité, et celle de la mère liée à la nature, à la
vie, à l'amour. Ce sont les deux principes chinois, le yin et le yang, tout aussi
bien que les deux images élémentaires de l'Occident, pour prendre deux
civilisations éloignées à l'extrême.
La mère c'est le yin, c'est la matière ; le père, c'est
le yang, c'est l'énergie. La physique contemporaine n'est guère sortie
elle-même de ce dualisme dont elle renouvelle régulièrement les termes, ni de
la transformation ou interchangeabilité des deux, qui créerait le processus ou
l'équilibre de l'être. Pour raisonner sur le temps mythique, on pourrait
considérer le temps qu'ont inventé les physiciens pour y inscrire les processus
qu'ils décrivent. Ce n'est pas un temps historique à coup sûr! Mais c'est
peut-être un temps mythique,
celui de l'entropie et de la négentropie, de la
réversibilité, de la répétition, etc. Toute la physique est devenue une
métaphysique du mythe élémentaire. Si elle a expérimenté les effets de plus en
plus complexes qu'elle sait décrire, répéter, contrôler, appliquer dans la
technique, son vocabulaire des pourquoi, ses dénominations sont autant de
concepts-images mythiques, c'est-à-dire qui se servent du recours au mythe
élémentaire comme principe d'explication.
Faudrait-il que la physique devienne autre chose qu'une
histoire de famille ? Ou l'histoire de famille (c'est-à-dire l'image
pseudo-explicative par l'apparence de la création ex nihilo due à la mère et au
père et les relations affectives établies par l'enfant vis-à-vis de ses
parents) est-elle l'histoire élémentaire qui structure, par identification ou
analogie, toute notre connaissance, toute notre activité humaine ?
Si tel est le cas, notre temps mythique est le temps
familial ! Ou plus exactement, une relation dirigée vers le père et vers la
mère.
L'homme n'oublie-t-il pas tout - apparemment - de sa
naissance ? Et n'ignore-t-il pas tout de sa mort ; l'origine et la fin de
l'humanité ?
Ne craint-il pas le Père (Dieu) ? Ne veut-il pas prendre
sa place (l'homme prométhéen) ?
Mais l'histoire de l'humanité n'est pas plus la poursuite
linéaire du progrès final que la biographie d'un individu.
Ce qui caractérise tout mythe, c'est qu'il est une
explication imagée de l'origine ou de la fin, donc une pseudo-explication
considérée comme cause efficiente. Tel est le cas de l'explication de la vie
par la mère et le père, à partir de quoi nous pensons tout. En aucune façon, le
repérage du mythe dans l'idéologie de l'histoire ne nous permet davantage que
d'y renoncer comme à une illusion, dès lors qu'elle devient aliénante, comme
c'est le cas dans la vie
quotidienne, dans l'art ou dans la politique
contemporaine. Ce repérage ne saurait nous dire ce qu'est le temps en soi ou
comment nous le penserons demain. Là surgissent les limites de notre raison
critique.
Il n'est même pas exclu que d'autres civilisations, ou la
nôtre demain, recourent à d'autres mythes que celui lié à la naissance
parentale pour organiser leur pensée et leur activité.
C'est une question intéressante, sans doute, de
s'interroger sur l'universalité de ce mythe à travers les différentes cultures
que nous connaissons et de se demander si ce mythe élémentaire occidental,
apparemment le même que nous avons repéré dans l'ancienne philosophie chinoise,
ne se retrouverait pas toujours et partout, comme Lévi-Strauss l'imagine de la
prohibition de l'inceste comme structure élémentaire de la parenté et de la
mythologie. Sans doute n'est-ce pas sûr, mais il n'est pas nécessaire non plus
de le postuler dans cette
réflexion sur la fin de l'histoire de l'art. Espérons
qu'un jour, cette question pourra être examinée systématiquement. Et de fait
Lévi-Strauss le postule déjà implicitement puisque la prohibition de l'inceste
ne saurait être universelle si le mythe parental ne l'était pas. Jung le compte
comme archétype de première importance dans une analyse qui a peut-être le tort
de multiplier à l'excès le nombre des archétypes et de les organiser dans un
inconscient collectif dont l'existence réelle, affirmée par Jung, échappe
curieusement à l'analyse mythique, alors que cet inconscient collectif est
lui-même l'expression naïve d'un archétype parmi tous ceux que repère Jung.
L'homme est à l'image de ses parents, comme à l'image de Dieu
dans le christianisme. Toutes les religions du monde ont imaginé un Père, une
Mère ou un Couple originel. Seul, le matérialisme, qui recourt au mouvement
mécanique des atomes, tente vraiment d'échapper au mythe parental.
Ce mythe constitue moins une image, ou représentation du
monde, qu'une structure, un système de relations intenses, impliquant le désir,
la satisfaction, le rejet, la complémentarité, l'opposition, la souffrance.
C'est ainsi que se sont construites aussi notre métaphysique, notre physique,
etc.
Le mythe élémentaire, et les mythes secondaires sont des
systèmes relationnels, comme celui de l'enfant par rapport à ses parents et aux
objets extérieurs, avant d'être fixés dans des images.
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