tout ce qui est réel est fabulatoire, tout ce qui est fabulatoire est réel, mais il faut savoir choisir ses fabulations et éviter les hallucinations.
mardi, février 28, 2012
Closed for ever
De son vivant, Dieu était fort affairé. Ouvrant son bureau aux aurores, le fermant à la tombée de la nuit, il ne cessait de devoir répondre à des milliards de prières, d'inscrire sur ses fiches individuelles des milliards de péchés et pas mal de bonnes actions. Ses registres devenaient si épais qu'il ne parvenait plus à faire face à toutes ces activités humaines qu'il se devait de tenir à jour sur ses listes. Il n'avait même plus le temps de se pencher sur les urgences de ceux qui lui adressaient sans répit des suppliques, mettaient des cierges dans les églises, se confessaient, demandaient des grâces et des sacrements. Et c'était sans compter les procédures d'accueil et de sélection des arrivants, toujours plus nombreux, à la porte de Saint-Pierre, dont il fallait chaque fois vérifier les états de service dans les registres, avant de les envoyer aux Enfers, au Purgatoire ou de choisir leur rang au Ciel. L'augmentation démographique était devenue telle, que Dieu ne trouvait plus assez de volontaires parmi les morts placés au Purgatoire, pour consacrer leurs journées à ce travail bureaucratique ennuyeux, répétitif et souvent stressant. Pour l'an 2000 après Jésus-Christ, Dieu décida donc de numériser tous ses registres, mais c'était une gigantesque tâche, et un énorme budget. En outre, il ne trouva pas d'algorithme assez subtil pour bien discriminer les âmes pieuses, évaluer les valeurs religieuses et les arrières pensées des morts, et pour garantir une qualité absolue de tri et d'évaluation.
Il devenait incapable de gérer tous les fichiers en temps réel et avait de plus en plus mauvaise conscience de son retard, qui augmentait tous les jours et créait des embouteillages et d'interminables queues aux guichets. Les plaintes et les réclamations aussi, qui s'en suivaient, devenaient ingérables dans un délai raisonnable.
Devant son incapacité à répondre correctement et équitablement à tous, sachant que l'humanité allait grossir encore de quelques milliards d'individus, il décida de fermer son bureau et de prendre sa retraite. Il y avait droit depuis longtemps, étant donné son âge. Et après cette décision difficile mais nécessaire, il put enfin se détendre et être heureux.
Maintenant, il repose en paix. Amen.
Si seulement les humains n'avaient pas imaginé que Dieu veille sur chacun d'eux, les espionne sans cesse, enregistre toutes leurs pensées et leurs actes, et fait le bilan comptable lors de leur mort pour décider de leur éternité, Dieu n'aurait pas été pris dans cette logique infernale et serait resté le dieu inaccessible qu'il avait voulu être depuis toujours. Le Diable est dans les détails.
L'imaginaire humain est rarement cohérent, pour ne pas dire toujours ambivalent, contradictoire, dès qu'on l'examine attentivement, comme nos rêves. Ce sont aussi ces incohérences et ces absurdités qui le rendent si étonnant et significatif pour le mythanalyste.
jeudi, février 23, 2012
Pensée binaire
Pourquoi la pensée binaire occupe-t-elle et structure-t-elle tant notre esprit? Pourquoi lui avons-nous accordé un statut de vérité et une telle puissance logique de raisonnement? Pourquoi avons-nous aujourd'hui, à l'âge du numérique, fondé notre évolution humaine sur les technologies associées à un code binaire, 1 ou 0, qui est devenu l'alpha et l’oméga de tous nos algorithmes, de l'informatique?
Cette tendance humaine remonte loin dans le temps, dans les oppositions asiatiques du yin et du yang, religieuses du bien et du mal, aussi bien que dans la fondation du rationalisme grec. Socrate est le champion déclaré de ce mode de pensée binaire supposé accoucher de la vérité.
- Si ce n'est pas vrai, alors peut-on dire que c'est faux? demande Socrate à l'esclave.
- Oui assurément, répond l'esclave, cela ne peut être que faux.
- Alors tu es d'accord avec moi que c'est faux, demande Socrate.
- Oui, assurément, cela est faux, dit l'esclave.
La logique classique, dite de Port-Royal, identitaire et du tiers exclu, le rappelle avec la plus grande vigueur: A est A, A ne peut pas être B.
Le rationalisme classique correspond à la généralisation de l'individualisme et de la famille conjugale fondée sur l'union durable d'un seul père et d'une seule mère, à l'opposé des sociétés antérieures basées sur les familles indivises et sur la magie.
C'est la mythanalyse qui explique cette domination de la pensée binaire par la théorie du carré parental associant le biologique binaire (un père et une mère) et le déterminisme de l'autre (la société), qui institue la famille individualisée, le monothéisme, le rôle paternaliste du roi, du prince, de l'État, et maternel de notre mère l'Église catholique. Nous avions antérieurement la domination de la logique participative, celle de la magie, de l'alchimie, de l’irrationalisme, en même temps que la structure sociale de la famille indivise, communautaire associant le nouveau-né aux mères et aux pères du groupe (l'oncle maternel ayant plus de pouvoir que le père biologique), et le polythéisme - plusieurs dieux, ayant chacun sa rationalité et son pouvoir.
Mais pourquoi ce fondement biologique et social de la pensée binaire, qui aboutit aujourd'hui au code binaire de l'informatique et à sa célébration urbi et orbi, connaît-il un tel succès au moment précisément où la rigidité de la famille conjugale éclate? Au moment où des pratiques de transexualité s'affirment ainsi que les mariages homosexuels? Au moment où le principe de non détermination en science, les logiques floues, les systèmes complexes, les lois du chaos, la physique quantique remettent en cause le rationalisme classique binaire?
Voilà une grande question, à laquelle il nous faudra répondre.
vendredi, février 17, 2012
mythanalyse du numérique 2
Nous abordons souvent le questionnement mythanalytique du numérique, qui repose sur un code binaire élémentaire, mais qui a réactivé des croyances mythiques parmi les plus archaïques et les plus importantes. Celle de l'unité universelle, celle de la puissance créatrice humaine (CyberProméthée), celle de la lumière, celle de la noosphère teilhardienne et de son point Omega d'achèvement de notre évolution. Avec ces croyances mythiques et à leur appui, nous avons réinventé les délices et les affres d'une magie archaïque, elle aussi, mais qui se traduit par une efficacité technique dont nos plus puissants chamans n'auraient pas osé rêver il y a à peine une génération.
Voilà un domaine de recherche qui nous accapare avec passion. La mythanalyse embrasse bien sûr beaucoup plus que le numérique, mais le numérique s'offre à nous comme un champ d'analyse étonnamment significatif et démontre sans équivoque notre thèse: nous avons autant de mythes que les Grecs, le plus souvent les mêmes, car les mythes sont d'origine biologique autant que sociale, et nous ne le savons pas, parce qu'ils s'expriment autrement, moins selon des figures anthropomorphiques que dans les mythologies anciennes (des dieux et des déesses), mais davantage dans notre imaginaire technoscientifique, économique et écologique.
jeudi, février 16, 2012
Solitude et dépendance
Nous pouvons adopter le tweet/sec ou TPS - tweet par seconde - comme unité de l'intensité numérique. Ainsi nous observons l'augmentation rapide de cette intensité:
- 6939 TPS le 31 décembre 2010 à minuit au Japon pour la nouvelle année 2011
- 500 TPS le 2 mai 2011 lors de la capture de Bin Laden
- 7,064 TPS le 25 août 2011 lors de la démission de Steve Jobs
- 8,860 TPS le 28 août 2011 lors des MTV Video Music Awards
- 25,088 TPS le 9 décembre 2011 lors du Castle in the Sky airs au Japon.
- 9,420 TPS le 8 janvier 2012 lors d'un évènement sportif, le Denver Broncos quarterback
Tim Tebow’s 80-yard overtime touchdown
- 12,233 TPS le 5 février 2012 lors du Super Bowl
Le Japon accumule évidemment les records de TPS quotidiens.
D'une façon plus sensitive, nous avons distingué les petites sensations, le frémissement, le frisson et l'orgasme numérique dans la e-sensibilité.
Jusqu'à quels records irons-nous dans cette pulsion et cette dépendance au numérique? Soyons clairs: le numérique est un catalyseur, une drogue, mais l'intensité que nous mesurons en TPS, c'est en fait celle de la demande de lien social, d'affection avec le corps social, qui exprime positivement le manque symptomatique de solidarité et l'angoisse de la solitude qui étreignent les individus au sein de la masse sociale. Les TPS mesurent un manque, une frustration autant qu'un désir et une dépendance compensatoire.
- 6939 TPS le 31 décembre 2010 à minuit au Japon pour la nouvelle année 2011
- 500 TPS le 2 mai 2011 lors de la capture de Bin Laden
- 7,064 TPS le 25 août 2011 lors de la démission de Steve Jobs
- 8,860 TPS le 28 août 2011 lors des MTV Video Music Awards
- 25,088 TPS le 9 décembre 2011 lors du Castle in the Sky airs au Japon.
- 9,420 TPS le 8 janvier 2012 lors d'un évènement sportif, le Denver Broncos quarterback
Tim Tebow’s 80-yard overtime touchdown
- 12,233 TPS le 5 février 2012 lors du Super Bowl
Le Japon accumule évidemment les records de TPS quotidiens.
D'une façon plus sensitive, nous avons distingué les petites sensations, le frémissement, le frisson et l'orgasme numérique dans la e-sensibilité.
Jusqu'à quels records irons-nous dans cette pulsion et cette dépendance au numérique? Soyons clairs: le numérique est un catalyseur, une drogue, mais l'intensité que nous mesurons en TPS, c'est en fait celle de la demande de lien social, d'affection avec le corps social, qui exprime positivement le manque symptomatique de solidarité et l'angoisse de la solitude qui étreignent les individus au sein de la masse sociale. Les TPS mesurent un manque, une frustration autant qu'un désir et une dépendance compensatoire.
mercredi, février 15, 2012
Les mythes ne sont pas des bêtises
On entend tous les jours dire que telle ou telle idée, tel ou tel fait est un mythe. Dans le langage courant, un mythe est une fausseté que beaucoup croient vraie par naïveté. Ce serait un mythe que l'alcool fait vivre vieux, que l'âme-soeur se rencontre sur l'internet, que la poudre de corne de rhinocéros est aphrodisiaque, etc. La télépathie est un mythe,etc. Nous entretenons ainsi beaucoup de mythes, que tout esprit rationaliste, c'est-à-dire moderne, s'empressera de démystifier. Et c'est vrai que les humains croient à beaucoup de faussetés. Mais cette confusion d'esprit nous aveugle lorsque nous ne voulons pas admettre que Dieu, le rationalisme, le progrès, l'Histoire, la vérité, la nature, la modernité sont eux des mythes fondateurs de notre civilisation occidentale, voire de notre prétendue lucidité. Il faudrait mettre une majuscule à tous ces mots, parce qu'ils désignent de fait des croyances, c'est-à-dire des récits fondateurs de notre vision de l'origine et de la finalité du monde. Et dans ce cas, il ne s'agit pas de bêtises! Ces mythes architecturent nos imaginaires sociaux, structurent nos valeurs, déterminent nos comportements. Ce sont des imaginaires, mais dont on ne pourra nier le sérieux, ni la réalité sociale.
C'est au nom de ces mythes que nous démystifions la bêtise de nos superstitions quotidiennes. C'est au nom de la modernité et de la lucidité (le mythe de la lumière) que nous nous moquons de ces bêtises d'usage courant.
Rien n'y fait: les hommes mettent confusément les mythes et les faussetés dans le même sac. Ils ne sont pas encore prêts à reconnaître l'importance et l'actualité de ces mythes fondateurs de nos civilisations et à cesser d'appeler mythes nos bêtises. Je constate tous les jours la difficulté, l'incapacité qu'ils ont à prendre conscience de l'importance de la mythanalyse. Sans doute justement parce qu'ils se croient modernes! Et qu'ils croient qu'ils ont Raison. Et lorsque je dénonce cet aveuglement, cet obscurantisme, c'est encore aux mythes de la lumière et de l'ombre que je fais référence pour justifier mon énervement. Nous voilà enfermés dans un cercle vicieux de l'esprit humain. Oui, les grands mythes sont eux-aussi des faussetés, mais de ceux-là nous ne pouvons pas nous passer, même pour dénoncer des stupidités. Tout notre langage et notre pensée sont métaphoriques. Ils véhiculent des images et des références mythiques inconscientes pour raisonner, interpréter et agir. Mais il y a de bons et de mauvais mythes, des mythes utiles et des mythes pervers, de grands mythes et des bêtises banales. Il ne faut quand même pas confondre Dieu et le chocolat.
lundi, février 13, 2012
Pleinement vôtre
Nous tendons à conquérir et à occuper le cyberespace au moins autant que l'espace réel. La nature a horreur du vide, Nous aussi. Le vide angoisse. Nous remplissons l'espace numérique de liens, d'images, de documents, de musique, de tout. Nous remplissons nos disques durs, pourtant de plus en plus immenses. Nous remplissons les fonds océanique de la toile sans répit. C'est devenu un vrai capharnaüm où les robots de nos moteurs de recherche circulent comme des hordes innombrables de harponneurs. Toujours plus plein. Et nous n'en sommes qu'aux premières années de cette cyberbulle qui gonfle cesse. Pourquoi? Avons nous tant de choses à dire, à trouver, à enmagasiner, à archiver, à consommer, à jeter? Faisant le plein de nos espaces, réels, imaginaires ou numériques, nous nous donnons une illusion plus grande d'exister. Le plein, c'est nous, notre projection; nous qui prenons plus d'espace et donc d'existence. Il y a dans ce mot d'existence la particule ex, qui renvoie à l'extérieur. Depuis que nous avons été expulsé de l’utérus maternel et mis au monde, nous avons grandi, grossi, accumulé, conquis. La multiplication cellulaire est le processus même de la vie. La famille grandit. L'espèce humaine aussi se gonfle de milliards d'individus. Et il nous faut marquer nos territoires pour assurer notre sécurité.
Diminuer de volume, rétrécir comme une peau de chagrin - l'expression le dit bien -, c'est une tristesse, une perte d'existence, le début d'une disparition. L'annonce de la mort et l'anxiété qui l'accompagne.
Etre, c'est prendre de l'espace. Exister, c'est prendre de l'espace à l'extérieur. De la hauteur, de la largeur, de la profondeur, de l'espace en trois et quatre dimensions. Les métaphores du langage autant que nos désirs et nos usages individuels et sociaux le rappellent sans cesse.L'espace c'est nous. L'imaginaire mythique de cette plénitude, de cet épanouissement, de ce développement, de cette croissance, de cet enrichissement, de cette grossesse, de cette conquête, de cette mondialisation est tout simplement biologique.
dimanche, février 12, 2012
mythanalyse du tweet
Allumer une cigarette et aspirer la fumée, c'est le symptôme d'une demande d'affection, d'un désir d'emplissement, de lien, de sécurité et d'apaisement, qui réactive le tétage du nouveau-né au sein maternel. Le désir de twitter, d'envoyer un court message aux autres, même lorsqu'on a rien à dire, à peine un prétexte, le plus souvent anecdotique, c'est un substitut au désir d'allumer une cigarette, qui lui aussi ne comporte pas de message, si ce n'est le désir de lien virtuel au sein maternel qu'on éprouve. La bouche demande un apaisement et emplit les poumons, comme le lait maternel emplissait l'estomac du nouveau-né, pour assurer son existence. La fumée est le corps virtuel de la société. Elle euphorise, comme le lien du tweet. Elle érotise, comme le tweet (désir d'amour).
La pulsion qui nous faisait allumer une cigarette s'exprime désormais par le tweet. L'envie nous en prend plus ou moins souvent, éventuellement de plus en plus en cas de dépendance.
L'avantage du tweet sur la cigarette, ce n'est pas seulement qu'il ne nous infligera pas un cancer des poumons, ce n'est pas seulement non plus qu'il coûte moins cher que les paquets de cigarettes, c'est surtout qu'il socialise beaucoup plus, du moins virtuellement, que la cigarette. Il ne se contente pas d'aspirer: il exprime. Il envoie un volute qui est un message à distance, adressé à nos abonnés, à nos amis sur twitter. Le tweet que nous exprimons sera virtuellement lu par quelques centaines ou milliers d'abonnés. Peu importe que personne ne prête beaucoup d'attention aux tweets des autres. En réalité, on twitte pour soi.
Le tweet répond à une pulsion numérique. Il relève d'une dépendance existentielle que nous avons développée vis-à-vis du corps virtuel de la société, du besoin d'y impulser une vibration individuelle. Il exprime le besoin d'exister, de se lier aux autres internautes pour qu'ils aient conscience de notre existence. Nous avons besoin de cette conscience extérieure qui reconnait et confirme la nôtre. Le tweet est un message qui semble réel, que d'autres liront. Le tweet, c'est la fumée de la cigarette qu'on allumait, quasiment tout aussi éphémère et volatile que la fumée, mais qui nous donne l'illusion de l'être beaucoup moins et de concrétiser réellement notre lien au corps social (maternel), d'appeler à un échange de messages avec les autres qui le prendront en compte.
Durkheim parlait du lien organique de l'individu au corps social comme d'une nécessité. Il lui opposait l'anomie des désordres sociaux et de la solitude propice au suicide. Nous investissons beaucoup dans ce lien à la société qui est l'extension du lien au corps maternel. Le mythe de l'unité, de la solidarité, des liens sociaux, des hyperliens numériques a un fondement biologique, celui de l'unité originelle du fœtus avec le corps maternel. Nous en gardons adultes la nostalgie, nous en éprouvons la nécessité vitale, symbolique, économique, culturelle. Nous devons assumer adultes la séparation, sa nécessité, mais nous en compensons le manque de toutes sortes de manières, individuelles et institutionnelles. Les religions et les Eglises en sont les modalités les plus répandues. De même, aujourd'hui, les médias sociaux tels que Facebook en tirent des milliards. La cigarette et le tweet en sont des variantes laïques gestuelles, quasiment rituelles.
samedi, février 11, 2012
vendredi, février 10, 2012
Psychanalyse
Pilules défoulantes, inversantes, renversantes, toxiques chez la plupart des patients, à ne pas prescrire dans les cas graves.
dimanche, février 05, 2012
samedi, février 04, 2012
vendredi, février 03, 2012
mercredi, février 01, 2012
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